Mardi 29 juillet 1856
Lettre de Caroline Duméril (Paris) à sa cousine Adèle Duméril (Trouville)
Mardi matin 29 Juillet 1856
Il y a bien longtemps ma chère enfant, que je ne t’ai écrit, j’ai voulu le faire plusieurs fois et j’ai toujours une chose ou l’autre qui m’en a empêchée. Ton père[1] t’aura raconté combien mon séjour à Montmorency m’a été agréable mais tu devais bien t’en douter. Depuis mon retour, c’est-à-dire depuis huit jours j’ai déjà eu le plaisir de revoir les habitantes[2] du cottage ; Mardi dernier, Eugénie a passé quelques jours avec moi et hier soir je les ai vu toutes deux ; elles ont passé par Paris en allant à <Armensart>, chez leur oncle M. Prévost, j’espère les revoir demain ou après-demain, Julien[3] est avec elles, mais je ne l’ai pas vu. Il est très content dans ce moment, parce qu’il compose avec les différents élèves de son professeur ; dans la composition d’orthographe, il n’a eu que 3/4 de faute et le second en a eu 1/4, tu vois donc que le succès est brillant et complet. Tu peux annoncer une bonne nouvelle à ton père, c’est que bon-papa[4] a reçu hier la lettre suivante de M. Breguet.
- « Je me suis occupé de votre neveu[5], et je crois pouvoir le caser, mais pour cela, il faudrait qu’il vînt passer quelque temps chez moi afin de faire un apprentissage, et qu’il vît tous les différents appareils en usage, et la manière de s’en servir. Je ferai mon possible pour lui être utile, toujours jaloux que je suis de faire quelque chose qui puisse vous être agréable. Recevez etc. »
Bon-papa a été bien content de cette lettre et il a de suite écrit à Alphonse qui je le pense ne tardera pas à arriver. Aujourd’hui, maman[6] et moi allons chez Mme de Tarlé[7] et chez Mme Raimbeaux[8] où nous passerons, je pense, une heure ou deux.
Ce soir, la famille Dunoyer doit venir ; Charles[9] va passer très incessamment son baccalauréat es sciences. Hier, j’ai reçu une lettre de Paul[10] en réponse à celle que je lui avais écrite pour sa 1ère communion ; ma tante[11] lui a joint quelques mots affectueux ; elle me dit avoir reçu de bonnes nouvelles de vous. Annonce de ma part à ton père, que mon oncle[12] n’a pas racheté de pipe !
Vous voilà assez favorisés par le temps, vous devez en profiter pour faire de belles promenades et les bains, dans ce moment, doivent être bien bons ; la rivière est chaude, hier on avait froid en en sortant. Guillonnez-vous[13] toujours ? et toujours avec le même charme ? ma rivale, comment va-t-elle, te tourne-t-elle toujours la tête ?...
Dimanche dernier nous avons eu Léon[14], il a fait une promenade avec bon-papa et le jeune Masclef, quant à moi j’ai préféré rester. Le matin, à la messe de huit heures, j’ai vu toute la pension Joret[15] qui occupait la chapelle de M. le Curé[16], nous nous saluâmes aimablement et Emilie Sergent m’a fait un petit bonjour particulier auquel j’ai répondu le plus gracieusement possible, toujours à ton intention et en ton nom. C’est M. le Curé qui a dit la messe, il était chez à Paris, Samedi, quand on lui a porté le vin.
Bon-papa compte toujours partir Vendredi il pense aller dîner Jeudi, chez mon cousin Horace Say. Nous n’avons pas de nouvelles fraîches de Lucy[17], bon-papa ira la voir aujourd’hui. Je suis chargée de dire à ton père que M. Oudart a demandé une tortue à faire, bon-papa croyant que c’était la tortue à ventre rouge que vient de dessiner Mlle Alberte, est resté incertain et n’a rien décidé. J’espère que mon oncle saisira le sens de ce que je viens de dire, quant à moi je ne le comprends pas fort bien. Ce qui t’intéressera beaucoup aussi c’est que M. Gubler a épousé hier, Mlle David d’Angers[18] ; une nouvelle que tu comprendras mieux c’est que Mlle Géant va se marier. Nous n’avons pas le moindre signe de vie de M. Devers ; il est étonnant qu’il n’ait pas répondu à la lettre de ton père, il est pourtant bien probable qu’il n’est pas parti Vendredi, comme il en avait l’intention.
Adieu, ma chère petite Adèle, j’attends bientôt une longue épître de toi ; en attendant, je t’embrasse bien, bien fort et t’envoie tout ce que je pense de plus affectueux.
Ta cousine et amie
Crol
Je te fais notre interprète auprès de tes parents[19] pour leur distribuer mille choses amicales.
Mon bon souvenir à Louise ; je ne lui dis rien de Montmorency parce que je pense qu’elle a reçu une lettre depuis mon retour : j’étais pourtant chargée de bien des choses pour elle de la part de Marie.
Nous avons été fort peinés d’apprendre la disparition de ce pauvre Emile[20]
Bonne-maman[21] qui vient de lire ma lettre t’envoie un petit mot tout particulier et bien affectueux.
Ma tante Adine t’a envoyé le cachet d’une dame de Cahors.
Notes
- ↑ Auguste Duméril.
- ↑ Eugénie Desnoyers, et sa sœur Aglaé.
- ↑ Julien Desnoyers, jeune frère d’Eugénie et Aglaé.
- ↑ André Marie Constant Duméril.
- ↑ Alphonse Duméril.
- ↑ Félicité Duméril.
- ↑ Suzanne de Carondelet, épouse d’Antoine de Tarlé.
- ↑ Cécilia Sévelle, épouse d’Emile Raimbeaux.
- ↑ Charles Félix Arthur Augustin Dunoyer.
- ↑ Paul Duméril.
- ↑ Alexandrine Brémontier (dite Adine), mère de Paul.
- ↑ Charles Auguste Duméril, époux d’Alexandrine Brémontier.
- ↑ Verbe forgé à partir du nom des Guillon.
- ↑ Léon Duméril, frère de Caroline.
- ↑ Caroline orthographie parfois « Jauret », parfois « Joret ».
- ↑ Jean Charles Moreau, curé de Saint-Médard.
- ↑ Probablement Lucy Raoul-Duval, épouse de Louis Sautter.
- ↑ Le docteur Nicolas Adolphe Gubler épouse Jeanne Hélène, fille du sculpteur Pierre Jean David, dit David d’Angers.
- ↑ Auguste et Eugénie Duméril.
- ↑ « Emile » non identifié.
- ↑ Alexandrine Cumont, veuve d’Auguste Duméril (l’aîné).
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mardi 29 juillet 1856. Lettre de Caroline Duméril (Paris) à sa cousine Adèle Duméril (Trouville) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_29_juillet_1856&oldid=61483 (accédée le 21 novembre 2024).
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