Trouville (Calvados)
Trouville est mentionné pour la première fois en septembre 1844 par André Marie Constant Duméril au moment où il séjourne au Havre chez son beau-frère Michel Delaroche : il fait alors une excursion en empruntant le bateau à vapeur jusqu’à Honfleur puis une voiture jusqu’à Trouville. Quelques années plus tard (à partir de 1848), cette station balnéaire devient un lieu de villégiature estivale pour son fils Auguste Duméril et sa famille. Seules exceptions : un séjour à Fontainebleau pendant l’été 1854 et en 1857 à Lion-sur-Mer, nouvelle station balnéaire du Calvados, à une quinzaine de kilomètres au nord de Caen. Le livret Trouville-sur-Mer. Itinéraire de l'étranger aux environs de Trouville, suivi d'une carte routière à l'usage spécial du promeneur (2e édition, 1854)[1] mentionne dans la « liste des étrangers arrivés à Trouville depuis le commencement de la Saison des Bains (1853) », qui représente « avec les enfants et les domestiques, un total d’environ 1 500 personnes », Mme et M. Duméril [Auguste], docteur en médecine et Mme et M. Duméril [Louis Daniel Constant], négociant, chez M. Louvet ; mais aussi : M. et Mme Dolfus, chez M. de Gisors ; Guizot fils ; Mme la baronne Oberkampf ; Mlle et M. Prunelé, propriétaire ; Mme Nay, de Paris ; M. Chartier, rentier, de Paris ; etc.
Lorsque Trouville commence à attirer les peintres à la fin de la Restauration, ce n’est qu’un petit village de pêcheurs, situé à l’embouchure de la Touques sur la côté normande. Le grand « découvreur » de Trouville est sans conteste Charles Louis Mozin (1806-1862) qui débute au Salon de peinture de 1827. L’artiste qui pose son chevalet sur cette langue de sable ne tarit pas d'éloges sur « les dunes et la grève encore vierges ». Ses toiles ont largement contribué à faire connaître la station aux Parisiens. On note dans le journal L'Illustration (en 1844) que « nulle part, la plage n'est aussi belle qu'à Trouville, véritable tapis de velours semé de paillettes d'or et d'argent. » D’autres artistes suivront comme Eugène Boudin, le plus connu, mais nombre d’autres peintres y trouvent aussi leur bonheur.
De leur côté, les écrivains participent largement de cet engouement. Dès 1831, Alexandre Dumas vient séjourner à Trouville, en quête d’un « coin perdu ». Puis c’est au tour de la famille Flaubert d’y passer ses vacances : en 1836, Gustave rencontre Elisa, épouse de Maurice Schlésinger, directeur de la Gazette et Revue musicale de Paris. L’écrivain évoque cette rencontre dans Les Mémoires d'un fou et les deux versions de L’Education sentimentale. Surnommée « le fantôme de Trouville », Elisa incarne la femme inaccessible.
En 1847 (par ordonnance royale du 6 juin), le village de pêcheurs se trouve considérablement agrandi par l’annexion de la commune voisine d’Hennequeville et bouleversé par l’implantation d’un casino. Durant l’été 1858, le duc de Morny, demi-frère de Napoléon III, est invité à Trouville par son médecin, le Docteur Oliffe qui dirige le salon du casino, théâtre de la vie mondaine et balnéaire. A cette occasion, Morny lance l’exploitation du rivage de sable et du marais pour créer la ville de Deauville. L’architecte parisien Desle-François Breney, inspiré par le baron Haussmann, en dresse les plans et en devient le premier maire. La nouvelle station est pourvue de champs de courses en 1862, puis d’une ligne de chemin de fer l’année suivante. Deauville et Trouville sont réunies par un pont et deviennent pour les Parisiens « le royaume de l’élégance ». Le succès est consacré par la vogue des bains d'eau salée, prônés par Trousseau et Royer-Collard au début du Second Empire.
Petit à petit, les hommes d'affaires de la capitale élisent la station jumelle comme leur lieu de villégiature privilégié et se font construire de fastueuses résidences sur le front de mer. A côté de villas de style gothique ou autre, un pavillon Renaissance est l’œuvre de l’architecte Alphonse-Henry de Gisors, concepteur du palais du Luxembourg et cité à plusieurs reprises dans la correspondance des Duméril.
[voir en annexe des vues, plus tardives, de la plage et des villas de Trouville]
Notes
- ↑ Transcription à l’adresse : http://www.normannia.info/pdf/trouville1853.pdf.
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Pour citer cette page
« Trouville (Calvados) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), URI: https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Trouville_(Calvados)&oldid=56515 (accédée le 14 novembre 2024).
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