Dimanche 31 janvier 1813

De Une correspondance familiale

Lettre d’André Marie Constant Duméril (Paris) à ses parents François Jean Charles Duméril et Rosalie Duval (Amiens)

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N°216

Paris le 31 janvier 1813

C. DUMÉRIL, Commissaire du Gouvernement pour présider les jurys de Médecine des Départements, Membre de la Commission des Remèdes secrets, Professeur de la Faculté de Médecine de Paris, Secrétaire de la Société établie en son sein, etc.  

A

M[1]es chers parents,

j'ai le plaisir de vous annoncer que j'ai été nommé hier à minuit médecin de l'hôpital du faubourg Saint-Laurent dit maison desanté. j'ai principalement désiré d'obtenir cette place, que remplissait avec beaucoup de distinction monsieur Delaroche père, afin de pouvoir la céder un jour à mon beau-frère[2] qui avait suivi la pratique de son père depuis près de huit années mais qui ne pouvait y être nommé parce qu'on exige que les médecins des hospices civils à Paris aient l'âge de quarante ans. on me les a supposés et en effet il ne s'en faut pas d'une année complète. depuis que j'ai pris cette résolution toutes les personnes qui me portent de l'intérêt m'en ont félicité de manière à me faire désirer la place d'autant plus vivement qu'elle était plus sollicitée. je n'exagère pas en vous disant que j'ai été obligé de faire plus de 80 démarches soit médiatement soit immédiatement, d'écrire peut-être trente lettres pour cet objet. quoique beaucoup de personnes se soient donné beaucoup de peines pour m'obliger, principalement MM. Delessert[3], Biot, Berthollet, Texier médecin particulier du Ministre, Leroux Doyen de la faculté, etc. je dois principalement ma nomination à M. Corvisart qui m'a témoigné le plus grand dévouement et au général Dejean[4] qui a finalement emporté la décision, depuis près de douze jours le Ministre[5] la lui ayant promis d'une manière positive.

Je serai obligé de faire exactement le service de cet hôpital au moins pendant neuf mois consécutifs, ensuite nous avons à peu près la certitude par M. Delessert qui est un des administrateurs des hospices que le conseil ne trouvera pas mauvais que mon beau-frère me remplace ou plutôt me supplée et qu'on fermera les yeux tout à fait à cet égard. quoique la route soit directe de chez moi au faubourg St-Laurent il me faudrait au moins une heure chaque jour pour y aller et une autre pour en revenir. je me suis en conséquence décidé à changer de logement et comme Madame Delaroche[6] est elle-même dans le cas de quitter celui qu'elle occupe, nous avons l'espoir de pouvoir habiter la même demeure. nous avons même vu rue Montmartre près le boulevard deux appartements au second qui nous conviendraient et dont nous allons offrir aujourd'hui 3 500 F. pour moi, je serais parfaitement logé et environ pour 1 800 F que payeront mon traitement comme Secrétaire de l'école et la moitié de celui de l'hospice qui est de 1 500 F, abandonnant l'autre moitié à mon beau-frère qui continuera de faire le service avec moi. par le fait de cette nomination je suis décidé à me livrer à la pratique et j'ai quelque raison d'espérer que je serai bientôt lancé dans cette nouvelle carrière qui si elle n'est pas tout à fait aussi agréable et autant dans mes goûts me donnera au moins une sorte d'indépendance que l'état des choses doit faire désirer à tout homme qui a le malheur de réfléchir et de prévoir.

M. Radiguet[7] vient de venir me voir. il avait oublié 2 lettres dont on l'avait fait porteur dont une de Désarbret[8]. je sais d'avance qu'il me parle d'un hochet. je l'ai chez moi depuis le départ d'Auguste. mais médard[9] n'a pu trouver le morceau d'ambre qu'on voulait y fixer. je crois qu'il n'y a pas grand mal car cette matière est fort fragile. je vais lui écrire de venir y fixer un morceau d'ivoire. j'en chargerai M. Radiguet qui viendra dîner chez moi mardi et j'écrirai par lui à Désarbret.

Auguste a reçu dans le courant du mois ou au moins il lui a été ordonné une somme de 44 000 F dans laquelle se trouve compris à peu près tout son arriéré. il m'a mandé ces jours-ci qu'il irait à Alost dans les premiers jours de février, que sa femme lui avait mandé que son petit garçon était un peu souffrant probablement pour les dents. Je vais lui écrire.


Notes

  1. L’en-tête est imprimé ; la date est complétée à la main.
  2. Etienne François Delaroche devait succéder à son père Daniel, décédé le 30 novembre 1812.
  3. Probablement François Marie Delessert, connu comme philanthrope.
  4. Jean François Aimé Dejean.
  5. Emmanuel Crétet, ministre de l’Intérieur.
  6. Marie Castanet, veuve de Daniel Delaroche.
  7. Nicolas Radiguet.
  8. Joseph Marie Fidèle dit Désarbret et Auguste (l’aîné), frères d’AMC Duméril. Auguste est marié à Alexandrine Cumont (dont les parents vivent à Alost) ; leur fils Charles Auguste est né en 1812.
  9. Domestique d’AMC Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original (il existe également une copie dans le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril, 3ème volume, p. 96-99)

Annexe

A Monsieur

Monsieur Duméril père

Petite rue Saint Rémy n°4

A Amiens

Pour citer cette page

« Dimanche 31 janvier 1813. Lettre d’André Marie Constant Duméril (Paris) à ses parents François Jean Charles Duméril et Rosalie Duval (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_31_janvier_1813&oldid=59524 (accédée le 22 décembre 2024).

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