Vendredi 19 janvier 1877
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris le 19 Janvier 77.
Mon cher Papa,
Merci mille fois pour ta bonne lettre et pour tous les détails que tu nous donnes ; tu ne saurais croire combien tout ce que tu dis nous intéresse ; du reste j’ai reçu il y a 2 jours une lettre de Marie Berger qui me parle beaucoup du fameux bal et qui paraît s’y être énormément amusée. J’espère qu’elles deviennent mondaines nos amies ! encore un bal à Thann puis, peut-être, un autre à Mulhouse à ce que me dit Marie. Nos robes sont commandées nous aurons des jupons de velours noir et par-dessus une tunique blanche en étoffe légère qui est paraît-il comme de la mousse je crois qu’elles seront très jolies.
Mercredi j’ai été faire plusieurs visites avec tante[1] ce qui m’a amusée, nous avons été chez Mme Bérard[2] et Mme Orfila[3] ; cette dernière a une fille[4] juste de mon âge qui est très gentille, c’est une élève de Mme Foussé[5].
Hier Jeudi nous avons eu le cours ; Emilie[6] y a été en voiture avec bonne-maman[7] qui est restée tout le temps ; moi je ne suis partie qu’un peu plus tard avec tante et nous y avons été à pied en faisant une foule de courses ; j’ai eu ma leçon de beaux-arts ; Jeudi prochain nous devons aller à Saint-Sulpice étudier les colonnes. Aussitôt après le cours d’histoire[8] nous avons pris une voiture et nous avons été faire visite à Mme Gosselin[9] elle a été comme toujours très aimable avec nous ainsi que sa fille Adrienne qui est vraiment charmante quoique fort gâtée ; je crois qu’on lui refuse peu de choses ; aussi elle a très envie d’aller au bal de l’Elysée mais son père n’a pas voulu demander de billets cela l’étonne beaucoup et elle en est à se demander si ce n’est pas pour lui faire une surprise en les lui apportant au dernier moment. Elle est la seule qui ait vécu de 4 enfants par contre sa mine ne fait pas pitié.
De là nous avons été chez Mme L. Delisle[10] à la bibliothèque nationale elle aussi nous a reçues d’une façon charmante et nous y sommes restées assez longtemps ; enfin nous avons repris le chemin du logis où nous ne sommes arrivées que juste pour l’heure du dîner.
Aujourd’hui j’ai eu ma leçon de dessin, je fais Néron de face ou plutôt de ¾ ce qui n’est guère commode aussi Mlle Duponchel[11] m’aide. Je viens d’étudier mon piano maintenant je vais vite faire un peu d’histoire ou de littérature mais pendant une heure seulement je m’habillerai nous irons à la douche puis à la leçon de Mme Roger[12] à 3h nous laisserons Emilie et j’irai avec tante chez Mmes Liesta[13], Péligot[14] et [Rich][15] qui toutes trois ont des jeunes filles tu vois que je me lance ; jamais de ma vie je n’aurai fait autant de visites mais tout le monde est si bon pour nous que cela ne m’ennuie vraiment pas. Nous reviendrons ensuite aux chœurs pour prendre Mumele et tu connais le reste du programme de plus nous aurons probablement Marthe[16] à coucher.
Merci encore mon bon petit papa pour les billets de loterie que tu as bien voulu me prendre. Marie Des Cloizeaux n’en revenait pas quand je lui ai dit hier que je t’avais tout donné et que je lui en redemandais pour moi.
Adieu mon bon petit père ; ci-joint une lettre de tante Z[17] arrivée hier pour toi. Je t’embrasse de toutes mes forces comme je t’aime, ta fille Marie
Notes
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Probablement Madeleine Anaïs Combres, épouse de Jacques Étienne Bérard et mère de "Mme Orfila".
- ↑ Stéphanie Bérard, épouse d’Augustin Félix Orfila.
- ↑ Paule Anne Gabrielle Orfila.
- ↑ Céline Silvestre de Sacy, épouse de Frédéric Foussé, professeur d’anglais.
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie (« Mumele »).
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Cours d’histoire avec M. Pasquier.
- ↑ Marie Bussy, épouse de Léon Gosselin et mère de Etienne (†), Lucie (†) et Adrienne Gosselin.
- ↑ Laure Burnouf, épouse de Léopold Delisle.
- ↑ Marie Louise Duponchel, professeur de dessin.
- ↑ Pauline Roger, veuve de Louis Roger, professeur de piano.
- ↑ Marie Baudon-Desforges, épouse de Louis Liesta et mère de Marthe Liesta.
- ↑ Eugénie Rosalie Bernardine Piéron, épouse de Eugène Melchior Péligot et mère de Berthe Péligot.
- ↑ Possiblement Gabrielle Bernardine Lousteau veuve de Baptiste Rich, et mère de trois filles et un fils.
- ↑ Marthe Pavet de Courteille.
- ↑ Emilie Mertzdorff, épouse d’Edgar Zaepffel.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Vendredi 19 janvier 1877. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_19_janvier_1877&oldid=60494 (accédée le 7 décembre 2024).
D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.