Lundi 25 octobre 1886
Lettre d’Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à ses nièces Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville et Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Brunehautpré-Campagne-les-Hesdin)
Lundi matin[1]
Mes chères petites filles,
C’est à vous deux que je m’adresse ; et je commence par vous remercier de vos lettres ; elles ont été bien nombreuses et je vous en suis reconnaissante ; car lorsque l’une de vous a quelque chose, j’éprouve le besoin de recevoir de fréquentes nouvelles. Combien je souhaite que ce vilain rhume disparaisse avant ton retour à Paris, ma chère Marie, et que tu commences un bon hiver ; cette année c’est encore plus indispensable[2] ; aussi ce que tu me dis me fait grand plaisir ; j’espère que tu te débarrasseras complètement de la toux et qu’elle ne traînera pas en longueur. Je comprends ton plaisir et celui de Jeanne[3] d’être avec Émilie[4], ce sont de bons moments de réunion qui redonnent de l’Intimité.
Quel bonheur de voir Émilie si bien portante et si active. J’ai quelques petites nouvelles à vous donner. Louis Target a quitté Bordeaux et est envoyé à Bourges, il pense que ce ne sera que pour 6 mois. En ce moment il est avec femme[5] et enfant chez Mme Maugis[6] près de Paris. Mme Leblond[7] part seule retrouver son mari à Constantine, elle désire revoir un peu ce beau pays, puis elle rentrera avec M. Leblond dans un mois pour aller je ne sais où. Elle laisse ses 2 petites filles[8] à sa belle-mère[9]. Mme Festugière[10] ferme en ce moment Bourguignolles ; puis elle ira passer les 3 premiers jours de Novembre à Jersey près de Georges[11]. Édouard Clavery a été très souffrant cet été avant d’aller à la mer ; il va bien maintenant, et passe aujourd’hui sa licence ès lettres. La petite henriette[12] a eu une jaunisse des plus fortes qui l’a rendue très malade ; elle n’est pas encore tout à fait remise. On ne pense revenir qu’à Noël ; Mme Clavery mère[13] seule est rentrée.
C’est aujourd’hui la séance à l’Académie dans laquelle M. Grandidier[14] doit parler. Je vais y aller avec Marthe[15]. Marcel[16] est venu déjeuner avec nous hier, ce qui nous a fait grand plaisir, il m’a paru avoir très bonne mine.
Votre bon-papa[17] va parfaitement, et votre bonne-maman va bien tout en n’ayant pas aussi bonne mine. Je les ai vus hier très longuement ; j’ai appris que Marie Riche[18] avait un gros garçon ; que le petit Jean Duméril grossit de 30 g par jour, que sa mère[19] va bien mais n’avait pas de lait ; que le père est dans la joie.
M. et Mme Fernet[20] vont mieux ; aussitôt qu’ils seront assez bien, on les emmènera chez M. Delisle[21] ; la jeune fille qui reste[22] est celle qui doit épouser son beau-frère[23] ;
J’ai vu Mme Arnould[24] qui est encore fatiguée tout en n’étant pas malade. Paule[25] va très bien. Edmond[26] vient d’avoir un fort mal de gorge, et cela chez sa grand-mère[27] où il s’était réfugié, pendant qu’on peignait l’appartement ; il était mieux Samedi. On n’était pas inquiet.
Camille Trézel[28] doit venir Samedi passer quelques jours à la maison pour voir Henri[29]. Mme Pavet[30] et Marthe sont revenues hier soir de Rome ; Alphonse[31] qui était souffrant va bien.
Je suis très contente que tu aies écrit à ton bon-papa Desnoyers[32], je t’en remercie ; il m’a demandé ton adresse pour te répondre ; son rhume va mieux.
En ce moment, pour réparer le lavoir, on le refait complètement, après avoir abattu le vieux. C’est radical. Comme il faut toujours se réjouir, j’aime à penser que ce sera un bon travail qui durera. Depuis quelque temps je fais beaucoup de comptes ; et plus que jamais je remercie le ciel de ne pas m’avoir accablée de ses bienfaits comme il l’a fait pour Damas[33].
J’aime beaucoup mieux tailler des tabliers de pauvres que de faire des soustractions. Il y a cependant là aussi un côté triste, les pièces d’étoffe disparaissent si vite qu’on les croirait en beurre exposé au soleil.
Adieu, mes enfants chéries grands et petits, je crois que ce bavardage est assez long, et que je puis vous quitter après vous avoir embrassées tendrement,
AME
Que diriez-vous d’un mariage entre M. Stackler[34] et Marguerite Audouin[35], c’est une idée qui sourit beaucoup à Louise[36] et dont je parlerai peut-être.
Votre oncle[37] va bien, il travaille beaucoup.
Notes
- ↑ Lettre sur papier deuil, écrite peu après la naissance de Jean Duméril (fin septembre 1886) et le jour de la communication d'Alfred Grandidier devant les Cinq Académies (25 octobre 1886).
- ↑ Marie Mertzdorff-de Fréville est enceinte de son quatrième enfant.
- ↑ Jeanne de Fréville, fille de Marie.
- ↑ Émilie Mertzdorff-Froissart, sœur de Marie.
- ↑ Thérèse Maugis, épouse de Louis Target.
- ↑ Félicie Lachapelle-Marchand, épouse d'Alfred Maugis.
- ↑ Jeanne Duval, épouse de Charles Gaston Leblond.
- ↑ L'une des deux fillettes est Constance Raymonde Germaine Leblond.
- ↑ Marie Aglaé Lecomte, veuve d'Hippolyte Leblond.
- ↑ Cécile Target veuve de Georges Jean Festugière.
- ↑ Georges Festugière.
- ↑ Henriette Clavery.
- ↑ Amica Le Roy de Lisa, veuve d'Amédée Clavery.
- ↑ Alfred Grandidier présente sa thèse sur le peuplement africain de Madagascar.
- ↑ Marthe Pavet de Courteille.
- ↑ Marcel de Fréville, l'époux de Marie.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril, époux se Félicité Duméril.
- ↑ Marie Berger, épouse de Paul Henri Rich et mère de Jacques Rich ?
- ↑ Marie Mesnard, épouse de Paul Duméril.
- ↑ Émile Fernet et son épouse Pauline Burnouf. Ils viennent de perdre trois de leurs filles.
- ↑ Léopold Delisle, beau-frère de Pauline Burnouf-Fernet.
- ↑ Angélique Émilie Marguerite Victoire Fernet.
- ↑ Charles Henry Godin.
- ↑ Paule Baltard, épouse d'Edmond Arnould.
- ↑ Paule Arnould, épouse de Louis Duval, a accouché en juillet de Louise Duval-Arnould.
- ↑ Edmond Arnould.
- ↑ Adélaïde Lequeux, veuve de Victor Baltard.
- ↑ Antoine Camille Trézel.
- ↑ Henri Trézel.
- ↑ Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille et mère de Marthe.
- ↑ Alphonse Pavet de Courteille.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Damas Froissart.
- ↑ Henri Stackler.
- ↑ Marguerite Audouin épousera Léonce Delagarde en 1888.
- ↑ Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille ?
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Lundi 25 octobre 1886. Lettre d’Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à ses nièces Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville et Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart (Brunehautpré-Campagne-les-Hesdin) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_25_octobre_1886&oldid=55490 (accédée le 3 octobre 2024).
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