Dimanche 18 et lundi 19 juin 1876
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris le 18 Juin 1876.
Mon Père chéri,
Merci mille fois pour ton bon petit mot que nous avons reçu ce matin et qui je t’assure nous a fait bien plaisir car nous désirions vivement savoir comment s’était fait votre voyage. Nous pensons bien à toi, il me semble qu’il y a déjà bien bien longtemps que tu nous as quittés et il n’y a pas deux jours ! Comme ce mois va être long heureusement que nous allons encore être bien occupées jusqu’au à notre départ.
Hier après notre leçon de Mlle Bosvy[1] nous nous sommes habillées (ce détail pourrait être supprimé) puis je suis allées avec tante[2] chez bonne-maman Desnoyers[3] tandis que Mumele[4] étudiait son piano ; elle n’allait pas mal quoique toujours bien fatiguée et elle s’apprêtait à partir pour Montmorency où elle restera jusqu’à demain soir.
En sortant de là nous avons pris une voiture puis cherché Emilie plus deux rideaux et nous voilà parties. Première station chez Mlle Viollet notre maîtresse du cours qui vient de perdre son père[5] avec lequel elles vivaient elle et sa sœur[6] ; elle ne recevait pas et tante n’a pu qu’y déposer une carte ; de là notre coche nous a conduites au Palais royal où tante voulait faire rajeunir ses [rideaux] hélas cela ne se rajeunit pas et les taches jaunes reparaissent…
Lundi 19. Mon Père chéri, que d’excuses à te faire ! c’est bien ma faute si cette lettre n’est pas partie hier et aussi un peu celle d’Emilie que j’avais priée de la finir et qui l’a oubliée. Voilà ce qui est arrivé. Après avoir étudié mon piano je me suis mise à mon bureau pensant causer longtemps avec toi ; mais voilà que tante arrive (il était 4h) me dit qu’elle va à Grenelle faire visite aux Duquenne et à Vaugirard reconduire Jeanne Pavet[7] qui était sortie pour la journée et me demande si je ne veux pas l’accompagner. La tentation était grande ; car oncle[8] avait bien dit qu’il viendrait nous prendre pour nous promener, mais il était tellement occupé par son exposition depuis 5h du matin que je doutais fort qu’il mît ce projet à exécution. Je suis donc partie et mon pauvre petit père est resté là ce qui était fort mal j’espère bien qu’il ne m’en voudra pas ? Nous avons été à Cluny prendre une voiture et avons fait nos deux visites ; nous avons trouvé toute la famille Duquenne on a parlé des Duméril et en particulier d’oncle Léon[9] que M. Arthur[10] se rappelle très bien. Nous ne sommes rentrées que pour dîner. Oncle était rentré n’en pouvant plus de fatigue et avait convié M. Filhol[11] également épuisé. Après le repas nous avons fait un tour dans la ménagerie ;
Ce matin j’ai eu Mlle Duponchel[12] avec laquelle j’ai d commencé à dessiner une branche de lilas et des marguerites ce qui m’a beaucoup amusée. Après le déjeuner nous avons eu MmeFoussé[13] « the ninth lesson » and you we have learned what said Mahmond to his vizier for Mahmoud was the most impatient of monarchs. But I cannot a great conversation to do. Ensuite j’ai étudié mon piano et maintenant nous allons nous habiller et aller Mme Pavet[14] où se joue la fameuse comédie anglaise. Tu riras peut-être si je te dis que nous nous réjouissons beaucoup car nous n’y comprendrons rien mais nous connaissons toutes les élèves qui sont soit de nos amies, soit d’anciennes élèves du cours, soit des élèves de Mme Roger[15].
J’oubliais de te dire que Samedi nous avons été faire visite à Mme Tourasse[16] où nous avons passé plus d’une heure nous avons visité toute leur maison qui est neuve et très jolie. Marthe[17] et ses sœurs[18] ont été très gentilles et nous avons été très contentes de notre course. Nous avons aussi été chez Mme Dupoirieux[19] mais Pauline[20] prenait une leçon de chant de sorte que nous l’avons à peine vue et que nous n’y sommes restées que peu de temps.
Adieu, mon petit Père chéri, mignon, pardon encore pour ce long silence j’espère bien qu’il ne se renouvellera plus. Je t’embrasse comme je t’aime, ta fille affectionnée
Marie Mertzdorff
Fais je te prie toutes nos amitiés à bon-papa et bonne-maman[21] quand tu les verras.
Notes
- ↑ Marguerite Geneviève Bosvy, professeur d’arithmétique.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ « Mumele » : Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Jean Baptiste Viollet.
- ↑ Marie Viollet ?
- ↑ Jeanne Pavet de Courteille.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Léon Duméril.
- ↑ Arthur Duquenne.
- ↑ Henri Filhol, qui présente au Muséum les résultats de son expédition scientifique.
- ↑ Marie Louise Duponchel, professeur de dessin.
- ↑ Céline Silvestre de Sacy, épouse de Frédéric Foussé, professeur d’anglais.
- ↑ Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
- ↑ Pauline Roger, veuve de Louis Roger, professeur de piano.
- ↑ Marie Louise Hemmet, épouse de Paul Achille Tourasse.
- ↑ Marthe Tourasse.
- ↑ Alice, Jeanne et Pauline Tourasse.
- ↑ Maria Prévot, épouse de Charles Nicolas Dupoirieux.
- ↑ Pauline Dupoirieux.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Dimanche 18 et lundi 19 juin 1876. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_18_et_lundi_19_juin_1876&oldid=39421 (accédée le 18 décembre 2024).
D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.