Samedi 6 août 1870

De Une correspondance familiale

Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son épouse Eugénie Desnoyers (Paris)

original de la lettre 1870-08-06 A page1.jpg original de la lettre 1870-08-06 A page2.jpg


6 Août 8 h soir.

Ma chère Nie

Tu sais que l'on ne travaille que jusqu'a 6 h du soir. les ouvriers sortent de bonne heure. J'allais t'écrire avant le souper, mais j'en ai été distrait.

Je n'ai pas beaucoup de détails à te donner de Vieux-thann. Ce matin j’ai à 6 h j'ai pris un bain qui n'est pas de luxe après 30 h de chemin de fer, quoique tout le long trajet ne m'ait pas trop fatigué, ainsi aujourd'hui j'ai trotté toute la journée sans repos.

Ce matin en lisant dans le Courrier du bas-Rhin les détails de l'affaire de Nied Wissembourg[1] j'étais navré de voir ainsi, par incurie sacrifier 4 à 5 régiments. Cela m'a pas mal secoué pour toute la journée.

Ce soir à souper Marianne[2] la portière m'apporte un bout de papier que m'adresse Minery. Mac Mahon a pris 40 canons & 18 000 Prussiens[3].

J'étais dans le village aux informations, déjà tous les drapeaux aux croisées ! Je demande de qui la dépêche, d'un employé du chemin de fer. Que Thann est de même en fête. C'est donc vrai ? que Dieu le veuille.

Le Préfet[4] m'avait envoyé une circulaire pour me demander à organiser quelques lits pour les blessés dès le 27. Rien n'est fait encore, je suis resté quelques jours de trop dans les délices de Capoue[5]. Nous cherchons à réparer. 20 lits sont demandés grande vitesse à Paris ; avec certificat du maire pour que le ministre[6] les fasse expédier d'urgence. Lundi je vais m'occuper des matelas etc. J'espère fin de la semaine avoir déjà une petite organisation. Je fais décidément organiser la maison du village. Il y a 4 planchers à faire. dans chaque chambre 2 & 3 lits. une bonne cuisine & salle à manger. Avec cela nous pouvons soulager que quelques misères. Je mettrai aussi 3 lits à la disposition des officiers, ce seront les chambres de Maman[7]. Je vais faire publier, il se peut que quelques personnes consentent à recevoir des blessés ou à donner des lits. Dans ce dernier cas je prendrai l'une des écoles. Enfin, tu vois, chérie, que nous ne sommes plus aux affaires. Je suis continuellement avec nos pauvres soldats. Ce sont les personnes à donner les soins aux malades, qu'il sera peut-être difficile à trouver ?

Que Dieu protège la France.

Demain je ne saurais t'écrire, dès 7 h à la mairie, j'y reste jusqu'à midi & ½. Comme probablement, il faudra passer à un second tour de scrutin qui recommence à 1 h jusqu'à 6 h du soir, le tout ne sera fini que vers 8 h. C'est long. Ici il n'est pas question de .'écrire>

A Thann il n'est pas de même. Curé[8] & maire[9] se démènent, travaillent depuis des semaines. Tout à l'heure l'on m'assure que notre M. Tschirret du bureau est <à> la tête de la liste & pas le moins illustre. Jugez du reste. Honneur à St Thiébaud. Thann avait bien besoin de toutes ces lumières pour se relever, car il est tombé bien bas !

Lundi & Mardi chômage à la fabrique, faute de travail. Partout l'on diminue le travail, mais les ouvriers sont conservés. Mme André[10] a un peu de quoi alimenter son monde. Ne travaillant que 8 jours sur 12 je compte payer 10 jours.

J'aurais voulu ce soir aller à Thann aux nouvelles, mais j'ai préféré rester avec ma Nie à laquelle je souhaite une bonne nuit. Demain midi je serai de pensée avec vous, tâcherai de vous suivre à Rennes & la route. Tu voudras bien embrasser nos bonnes petites filles[11] pour le papa. Espérons que bientôt je saurai vous chercher, la maison est bien, bien vide. Je t'embrasse comme je t'aime. Mais n'oublie pas de bien embrasser pour moi papa & maman[12], bonne poignée de main au gros frère[13] & si vous écrivez à Julien[14] ne m'oubliez pas.

CharlesMertzdorff

Les journaux ne donnent aucun détail sur l'affaire du camp de Châlons. Si Julien vous écrit, bien vite donne-moi extrait de sa lettre. Je suis bien content de te voir avec maman. Pauvre mère elle a besoin d'être entourée.

reçu ou mieux trouvé à mon arrivée ici lettre de faire-part de Mme Veuve Frédéric Dollfus[15] du mariage de sa fille Berthe[16] avec M. Sayous, Docteur es lettres, Professeur au Lycée Charlemagne. prière d'envoyer des cartes ou mieux aller faire visite avec les enfants.

daté de Paris le 21 Juillet : c'est ancien comme tu vois. Ne pas tarder.


Notes

  1. Référence inconnue #ftn1
  2. Référence inconnue #ftn2
  3. Référence inconnue #ftn3
  4. Référence inconnue #ftn4
  5. Référence inconnue #ftn5
  6. Référence inconnue #ftn6
  7. Référence inconnue #ftn7
  8. Référence inconnue #ftn8
  9. Référence inconnue #ftn9
  10. Référence inconnue #ftn10
  11. Référence inconnue #ftn11
  12. Référence inconnue #ftn12
  13. Référence inconnue #ftn13
  14. Référence inconnue #ftn14
  15. Référence inconnue #ftn15
  16. Référence inconnue #ftn16

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Samedi 6 août 1870. Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son épouse Eugénie Desnoyers (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_6_ao%C3%BBt_1870&oldid=35628 (accédée le 26 avril 2024).

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