Samedi 10 octobre 1874
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Jardin des Plantes 10 8bre 1874
Mon père chéri, chéri,
Il me semble que voilà bien longtemps que je ne suis venue te dire un petit bonjour car voilà déjà deux fois qu’Emilie[1] s’est chargée de la correspondance.
Je peux te dire que nous allons tous parfaitement bien. La purge lui a fait un effet merveilleux depuis ce jour elle n’éprouve plus de coliques et est tout à fait rentrée dans son état normal ; cependant ce matin elle est encore un peu dérangée tout en ayant bon appétit et bonne mine. Moi j’ai un peu mal aux dents depuis hier mais je pense que ce ne sera rien car voilà le beau temps.
Mais mon petit papa que je te mette au courant des grandes nouvelles du jour et que tu connais peut-être déjà. Mme Charrier[2] quitte la rue de Seine et va s’établir dans un petit hôtel 108 rue du Bac, de plus Mme Charrier ouvre à partir du 28 Octobre prochain son cours d’études générales ; c'est-à-dire que deux fois par semaine (Lundi & Vendredi) on aura un cours pour préparer les élèves à leurs classes et aux examens, leur apprendre l’allemand, l’anglais et le dessin ? En voilà de l’innovation n’est-ce pas petit père ? Du reste tu dois avoir reçu le prospectus. Hier Tu vois de là-bas notre bouleversement seulement en y réfléchissant plus nous avons vu que pour nous il n’y a absolument rien de changé car le cours du Mercredi subsiste avec l’ancienne organisation il n’y a donc que l’éloignement et l’ennui de quitter ce bon vieil appartement de la rue de Seine pour le petit hôtel. Hier Vendredi nous avons été chez Mme Arnould[3] que nous avons trouvée chez elle avec Mathilde[4] en plein emménagement car ils apportent la plus grande partie de leurs meubles pour s’établir à Paris pour tout l’hiver. Paulette[5] est à St Gobain auprès de sa sœur Lucy[6] ce qui lui fait bien plaisir. Mme Arnould est tout à fait de l’avis de tante[7] sur la nouvelle organisation du cours et n’enverra Paule que le Mercredi. Ah ! j’ai oublié de te dire que maintenant le cours va durer 9 mois et qu’il n’y aura plus de cours d’été par contre nous aurons une semaine de vacances au jour de l’an et une autre à Pâques ce que je trouve une grande amélioration.
De là nous avons été rue du Bac faire visite à Mme Charrier et nous avons vu le fameux petit hôtel qui nous préoccupait tant. C’est très somptueux il y a 3 étages un joli petit jardin et la remise est changée en récréation couverte. Mme Charrier va bien et paraît enchantée de toutes ses nouveautés tante lui a dit que nous continuerions le Mercredi et voilà tout ce qu’elle a parfaitement compris. Nous avons été ensuite chez Mlle Viollet et dans l’escalier nous avons rencontré MmeTourasse[8] et ses filles[9] elle pense juste comme nous et Marthe ne suivra aussi que le Mercredi.
Ce matin tante a reçu une lettre de Mme Denormandie[10] qui est toute émue du prospectus qu’elle n’a pas bien compris à la campagne elle croit que Mme Charrier se sépare de Mlles Bosvy[11] et Viollet et elle veut suivre ses demoiselles sinon elle fera comme nous et ne suivra que le Mercredi. C’est curieux comme tout le monde s’entend aussi je crains bien que cette pauvre Mme Charrier n’ait pas grand monde. Tout cela nous a beaucoup agitées et je te dirai même un peu amusées car le nouveau me paraît toujours drôle je crois que toutes les petites filles sont de même.
Nous venons d’aller voir la ménagerie des reptiles[12] c’est splendide.
Ce matin Emilie a fait notre chambre avec une grande ardeur et elle l’a très bien faite parce que François[13] vient de partir pour 8 jours dans son pays prendre un peu de vacances et Maria[14] est forcée de faire son ouvrage.
Adieu, mon petit papa mignon j’aurais encore bien des choses à te raconter mais il ne me reste que juste assez de place pour t’embrasser bien bien fort et te dire combien je t’aime.
Ta fille Marie
Bonne-maman Desnoyers[15] ne parle pas encore de retour. M. Rousseau qui demeure là dans la petite cour est bien malade. Nous devions aujourd’hui aller à Poissy chez Mme Sauvel[16] mais nous n’irons que chez Mmes Cordier[17] et Devers[18].
Embrasse bien je te prie pour moi ce cher bon-papa et cette chère bonne-maman[19] et dis-leur que je les aime énormément. Nous ne savons rien d’oncle Auguste[20] mais il y a une 8aine de jours nous avons reçu des cartes p.p.c.[21]
Notes
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Caroline Boblet, veuve d’Edouard Charrier.
- ↑ Paule Baltard, épouse d’Edmond Arnould.
- ↑ Mathilde Arnould, sa fille.
- ↑ Paulette, Paule Arnould.
- ↑ Lucy Arnould, épouse d’Alfred Biver.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Marie Louise Hemmet, épouse de Paul Achille Tourasse.
- ↑ Marthe, Alice, Jeanne et Pauline Tourasse.
- ↑ Marguerite Amélie Guyot-Sionnest, épouse de Victor Paul de Denormandie.
- ↑ Marguerite Geneviève Bosvy.
- ↑ Ménagerie des reptiles au Jardin des Plantes.
- ↑ François, employé par les Milne-Edwards.
- ↑ Maria, employé par les Milne-Edwards.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers, à Montmorency.
- ↑ Amélie Martin, veuve d’Étienne Alexis Sauvel.
- ↑ Félicie Berchère épouse de Charles Cordier.
- ↑ Maria Berchère, épouse de Giuseppe Devers.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
- ↑ Charles Auguste Duméril.
- ↑ Carte de visite déposée et portant la mention abrégée « pour prendre congé » qui prévient d’une absence.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 10 octobre 1874. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_10_octobre_1874&oldid=35304 (accédée le 18 décembre 2024).
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