Mercredi 18 février 1880
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 18 Février 1880
Mon Père chéri,
Quel bonheur de penser que bientôt tu nous arrives et que nous allons de nouveau être tous réunis ; il me semble qu’il y a longtemps déjà que tu nous as quittés et cependant voilà les journées qui recommencent à passer avec une effrayante rapidité, les semaines se succèdent sans qu’on ait rien fait et sans qu’on s’en rende compte. Tu nous retrouveras contents et heureux comme tu nous as laissés plus même peut-être si c’est possible. Nous continuons toujours la bonne habitude prise dès le commencement de nous voir tous les jours, le plus souvent M. de Fréville[1] vient dîner ici et le soir nous travaillons au livre d’adresses ; quant au contraire il ne dîne pas avec nous il vient faire sa petite visite dans la journée et c’est comme cela que Samedi dernier nous t’avons écrit ensemble seulement la pauvre lettre a été souvent interrompue par des parenthèses qui amenaient de longues conversations et je suis sûre que nous avons bien mis une heure à la composer ; aussi le style et les idées devaient s’en ressentir. C’est aujourd’hui que M. de Fréville a rendez-vous avec M. Cauderon[2] notre futur propriétaire pour signer avec lui le bail du pavillon ; donc quand tu arriveras toutes les affaires seront arrangées et nous pourrons t’y conduire comme si c’était déjà notre demeure ; seulement Dieu merci j’espère que quand nous t’y recevrons pour vrai ce sera un peu mieux tenu que ce ne l’est actuellement ; on recule d’horreur devant un désordre et une saleté pareils.
Nous voilà enfin au bout de notre vie mondaine ; Lundi encore nous avons dansé chez Mme Mangon[3] et nous nous y sommes beaucoup amusées malheureusement il y a fallu nous en arracher à 11h1/2 pour aller chez Mme Bussy[4] où avait lieu la soirée de contrat de Mlle Reynier[5] c’était plus sérieux on faisait de le musique mais ce qui nous a amusé cela a été d’étudier tous les cadeaux qu’elle avait reçus et qui étaient exposés dans un petit salon.
Hier, Mardi nous avons eu Mme de Fréville[6] qui venait nous inviter tous à dîner pour le 26, elle a choisi cette date afin que tu sois de retour et elle m’a chargée toujours d’avance de te transmettre son invitation. A la fin de la journée nous avons reçu aussi la visite de M. Raoul Duval[7] et de son gendre M. Sautter[8] que bon-papa[9] nous avait annoncés ; ils ont été tous deux extrêmement aimables et nous avons vraiment été touchées de la manière si charmante et si affectueuse dont ils venaient à nous, on a beaucoup parlé des souvenirs d’autrefois, de petite mère[10], de bon-papa Duméril[11]. M. Sautter doit nous amener ses 2 petites filles[12] afin que nous fassions leur connaissance. M. Duval m’a dit qu’il avait fait de toute la famille Duméril un tableau généalogique très complet, que ce tableau il venait de le copier pour moi et qu’il me l’enverrait. Tu comprends ma joie car j’ai toujours désiré mieux connaître nos degrés de parenté avec toute la famille.
Adieu, mon Père bien aimé, je t’embrasse de toutes mes forces qui du reste sont très considérables je n’ai nulle envie de suivre la règle générale et de me mal porter parce que je vais me marier, il me semble au contraire que le bonheur ne devrait jamais faire maigrir.
the little bride[13],
Marie
Je suis vraiment bien fâchée que cette pauvre Mme Mairel[14] se soit crue forcée de me faire un cadeau ; je vais lui écrire pour la remercier mais si tu n’y vois pas d’inconvénient j’attendrai ton arrivée pour m’exécuter de sorte que j’aurai vu l’objet et dans ce moment je ne suis pas sensée encore savoir qu’elle me donne quelque chose. Je commence à être un peu saturée de lettres.
J’embrasse bien fort bon-papa et bonne-maman[15], tante[16] a reçu ce matin la lettre de bonne-maman dont elle la remercie 1 000 fois.
Notes
- ↑ Marcel de Fréville, fiancé de Marie Mertzdorff.
- ↑ Émile Cauderon.
- ↑ Noëlie Dumas, épouse d’Hervé Mangon.
- ↑ Anne Adélaïde Baudouin épouse d’Antoine Alexandre Brutus Bussy.
- ↑ Marguerite Reynier, qui va épouser Henri Couriot.
- ↑ Sophie Villermé, veuve d’Ernest de Fréville.
- ↑ Charles Edmond Raoul Duval, dit Charles Edmond Raoul-Duval.
- ↑ Louis Sautter, époux de Lucy Raoul-Duval.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril ; voir la lettre du 2 février 1880.
- ↑ Caroline Duméril (†), première épouse de Charles Mertzdorff.
- ↑ André Marie Constant Duméril.
- ↑ Marthe et Marie Sautter.
- ↑ The little bride : la petite mariée.
- ↑ Joséphine Müller épouse d’Alphonse Eugène Mairel.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mercredi 18 février 1880. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_18_f%C3%A9vrier_1880&oldid=59160 (accédée le 18 décembre 2024).
D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.