Mercredi 8 juillet 1863
Lettre de Félicité Duméril (Vieux-Thann) à Eugénie Desnoyers, amie de sa fille décédée (Montmorency)
Vieux Thann 8 Juillet 1863
Merci, bien merci, ma douce enfant, pour ta lettre qui m'est arrivée hier. Je t'attendais à l'anniversaire du jour de douleur éternelle[1]. Dans la souffrance, dans le déchirement de mon cœur, il n'y a que toi, si intimement liée à ma bien aimée, qui puisse m'apporter quelque soulagement. Tes paroles, je les recueille comme si elles me venaient d'elle, aussi il me semble que le jour où je pourrais voir nos chères petites[2] dans tes bras, dans ceux de ton excellente mère[3], de la tendre et dévouée Aglaé[4], ce jour-là je respirerai plus librement. Cette vive et profonde blessure qui est dans mon cœur durera autant que ma vie, mais c'est à toi qu'il est réservé d'y apporter un baume doux et salutaire. Combien tu es bonne de me tenir si bien au courant de tout ce que vous faites, je puis vous suivre et vous voir le Dimanche réunis en famille. Comme toi, ma chère enfant, je remplis sans cesse mon temps ; sans le travail que deviendrait-on sur cette terre ? Dis à ton bon père[5] de se soigner et de le faire pour sa famille et ses amis. Cet air de Montmorency est un si bon air, je voudrais que tous vous puissiez le respirer le plus possible. M. Edgar Zaepffel est à Vichy dans ce moment, il y est à cause de maux d'estomac dont il souffrait beaucoup : de grandes peines sont survenues aussi dans sa famille ; depuis un an il a perdu un frère excellent laissant quatre enfants, et une nièce charmante âgée de dix-sept ans[6]. Madame Edgar Zaepffel[7] est toujours bonne et aimable, elle attend son beau-frère et sa belle- sœur M. et Mme de Rheinwald[8] avec leur nièce[9]. Madame de Rheinwald est une femme d'un vrai mérite qui porte une sincère affection à nos chères petites. Demain Jeudi Charles[10] les aura à dîner chez lui avec sa famille et moi je partirai Vendredi dans la matinée pour aller rejoindre pour quelques jours mon bon mari et Léon[11]. Je laisse ici nos chères petites en de bonnes mains et parfaitement entourées. Miky me rappelle sa tendre mère par la mémoire, l'intelligence, le désir de faire des petites surprises agréables, la petite Emilie n'est pas jolie mais elle a une tournure charmante et fait bien des progrès en toutes choses. D'après le désir de Charles, les cheveux des chères petites ont été coupés, elles sont à présent à la titus et s'en trouvent bien pour le temps de chaleur que nous avons. Je t'envoie deux petites mèches de leurs cheveux que tu ne peux manquer de recevoir avec plaisir. Je ne puis assez te dire, ma chère enfant, ce qu'est Adèle[12] à notre égard, mon cœur est plein en pensant à elle, à son dévouement, à sa tendresse pour nous. Ma bonne mère[13] va bien mais je regrette toujours qu'elle ne puisse se décider à prendre la plume pour m'envoyer quelques lignes.
Adieu ma douce enfant que j'aime tant, embrasse bien fort pour moi ton excellente mère et Aglaé. Nos souvenirs affectueux à ton bon père, M. Alphonse[14] et Julien[15].
F. Duméril
Notre bonne Cécile[16] sachant que je t'écris me prie de la rappeler à ton souvenir, elle est du nombre de ceux qui connaissent ton mérite et le confondent avec celui de notre bien aimée.
Notes
- ↑ Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff et fille de Félicité, est décédée le 7 juillet 1862.
- ↑ Marie (Miky) et Emilie Mertzdorff, filles de Caroline.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards et sœur d’Eugénie.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Marie Ursule Henriette Eugénie Zaepffel, née vers 1849, décédée le 18 mai 1863.
- ↑ L’épouse d’Edgar Zaepffel, Emilie Mertzdorff, est la sœur de Charles.
- ↑ Camille Charles Auguste de Rheinwald et son épouse Louise Zaepffel.
- ↑ Possiblement Marie Zaepffel.
- ↑ Charles Mertzdorff.
- ↑ Félicité habite auprès de ses petites-filles à Vieux-Thann ; son époux Louis Daniel Constant Duméril et leur fils Léon demeurent à Morschwiller.
- ↑ Adèle Duméril, nièce de Félicité.
- ↑ Alexandrine Cumont, veuve d’Auguste Duméril l’aîné.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards, beau-frère d’Eugénie.
- ↑ Julien Desnoyers, frère d’Eugénie.
- ↑ Cécile, domestique chez les Mertzdorff, attachée au service des fillettes.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Mercredi 8 juillet 1863. Lettre de Félicité Duméril (Vieux-Thann) à Eugénie Desnoyers, amie de sa fille décédée (Montmorency) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_8_juillet_1863&oldid=35244 (accédée le 21 novembre 2024).
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