Lundi 21 avril 1879
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 21 Avril 1879.
Mon Père chéri,
Je suis désolée de voir que tu t’es tourmenté au sujet de mon malheureux pied auquel ta lettre m’a fait penser de nouveau mais que j’avais totalement oublié car il va tout à fait bien depuis plusieurs jours ; c’est la vérité vraie tu sais ; j’ai repris mes deux bottes et mes bottes neuves que je ne sens pas plus que les plus larges pantoufles, il ne reste plus même aucun vestige de mon cor et mon doigt s’est revêtu d’une belle peau neuve ainsi tu vois qu’au fond cela a été un mal pour un bien et si je t’en ai parlé cela n’a été que pour te prévenir que le remède était énergique ; et j’avais peur que tu n’en abuses. Maintenant je t’en supplie, mon Père chéri, n’y penses plus et ne va pas t’imaginer que j’ai bien souffert parce que ce n’est pas vrai et tu sais qu’on ne peut pas m’accuser de trop bien supporter la douleur.
Te voilà j’espère bien convaincu et nous pouvons quitter pour toujours ce sujet fort peu intéressant. Merci, mon bon petit Père, pour ta bonne et si longue lettre que nous avons reçue ce matin, je vois avec joie que tu vas bien quoique tu ne nous en parles pas. Comme Vieux-Thann devient mondain ! Ce n’est plus notre bon Vieux-Thann tranquille d’autrefois ! Vous deviez former un singulier cortège[1] avec vos fleurs et vous avez sans doute bien diverti les passants et excité l’administration de vos voisins Kestner par votre allure démocratique.
Il fait aujourd’hui un temps abominable depuis ce matin il tombe des torrents d’eau ; nous ne pouvons décidément pas conserver le soleil 2 jours de suite. Depuis qu’Emilie[2] t’a écrit hier il ne s’est absolument rien passé qui mérite de t’être rapporté aussi ce n’est qu’un petit mot d’amitié que je te griffonne en ce moment.
Emilie prend sa leçon de Mlle Bosvy[3], tante[4] compte avec la bonne de Mme Dumas[5] et dans un instant nous allons malgré le temps partir chez M. Flandrin[6] où je n’ai pas été depuis bien longtemps. Dans ce moment je travaille à copier les modèles de M. Beauregard[7] qui viendra Jeudi me donner une leçon et j’ai encore bien à faire pour terminer ma tâche.
La fameuse loterie de Saint-Médard est tirée mais malheureusement les billets que je t’ai fait prendre ne t’ont pas amené le gros lot comme je te l’avais prédit ; tu as gagné des petits objets de layette qui si tu veux bien vont passer avec les nôtres à la loterie des sœurs d’Ivry. C’est un feu roulant.
Adieu mon Papa chéri que j’aime, je t’embrasse de tout mon cœur comme je t’aime
Ta fille,
Marie
As-tu des nouvelles de tante Z[8] ? Quand Laure[9] se marie-t-elle ?
Notes
- ↑ Charles Mertzdorff, Caroline Gasser, épouse de Frédéric Mertzdorff, Anne Marie Munsch et son frère l’abbé Ernest Munsch en cortège.
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Marguerite Geneviève Bosvy.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Cécile Milne-Edwards, épouse de Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
- ↑ A l’atelier du peintre Paul Flandrin.
- ↑ Ange Louis Guillaume Lesourd-Beauregard.
- ↑ Emilie Mertzdorff, épouse d’Edgar Zaepffel.
- ↑ Laure Zaepffel, qui va épouser Henri Velin.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Lundi 21 avril 1879. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_21_avril_1879&oldid=40375 (accédée le 22 décembre 2024).
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