Dimanche 8 et lundi 9 novembre 1874

De Une correspondance familiale


Lettre de Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril (Morschwiller) à Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)


original de la lettre 1874-11-08B pages 1-4.jpg original de la lettre 1874-11-08B pages 2-3.jpg


Morschwiller 8 9bre 1874.

Mille remerciements, ma bien chère Aglaé, pour ta bonne lettre que j’ai reçue avec un vif plaisir. Comment, tu me dis que tu es confuse de ne m’avoir pas écrit plus tôt, est-ce que je ne comprends pas tout ce que tu as à faire. Cette pensée que ta vie est si remplie par tant de travaux divers, me préoccupe, je crains que tu en fasses trop, que tu te fatigues et voudrais tant pouvoir amoindrir un peu ton travail. Je t’en supplie, soigne-toi comme tu sais si bien soigner les autres. Ce que tu me dis, chère Aglaé, touchant la santé de notre petite Marie[1] me fait bien plaisir. L’avis de M. Brouardel[2] est précieux, et je suis bien contente de savoir ce qu’il a prescrit, la chère enfant s’y soumettra sans murmurer, j’en suis sûre, surtout en sachant que ce moyen la dispense de douches auxquelles elle avait tant de peine de s’habituer malgré les tendres soins que tu y apportais. Quant à la chère petite Emilie[3], elle va bien, grâce à Dieu, et il me semble que depuis sa maladie, sa constitution s’est fortifiée de toutes façons. Voilà les études recommencées et je regrette bien que Madame Charrier[4] se soit encore éloignée du Jardin Des Plantes. Je crains que sa nièce[5] ne décide un peu trop de toutes choses ; à l’âge de cette demoiselle il y a malheureusement assez souvent une fièvre pour faire avancer le plus possible que les personnes âgées devraient savoir réprimer. Au reste toi si sensée et réfléchie tu sauras bien diminuer les études si elles sont trop prolongées et multipliées. Il faut certainement inspirer aux enfants l’amour du travail, mais il y a dans les meilleures choses une mesure qu’il ne faut pas dépasser, puis le travail doit être subordonnée à la santé. (Du 9) J’ai appris par Léon[6] que tu as écrit à Charles[7] et que tu lui dis que le mal de gorge de ta bonne mère[8] va mieux, fais-lui mes tendres amitiés et dis-lui que je me joins à son cher entourage pour l’engager à se bien soigner. Mon mari[9] est pris dans ce moment par le rhume causé probablement par ce temps de brouillard que nous avons depuis plusieurs jours. Rosalie[10] qui est sujette aux maux de gorge en a été atteinte Dimanche dernier de manière à me causer quelque inquiétude, mais le repos, le chlorate de potasse, une tisane faite avec pommes reinettes, pruneaux, et miel, tout cela réuni a opéré d’une manière favorable, elle va assez bien à présent. Cette jeune fille qui nous est fort attachée, est malheureusement d’une santé délicate.

Madame Dumas[11] comment va-t-elle ? son déménagement et emménagement dans une saison comme celle-ci ont dû la fatiguer beaucoup. Je pense souvent à elle ainsi qu’à Madame Pavet[12], fais-leur je te prie, à toutes deux mes meilleures amitiés. Je suis sans nouvelles de Besançon[13] et je suis souvent préoccupée du moment des couches de ma chère Adèle[14]. Que Dieu permette que tout aille bien ! Tu as su l’évènement de la mort de cette pauvre Marianne[15] qui laisse quatre enfants[16], cette femme était exténuée, son mari a un visage qui fait peine à voir, il est bien à plaindre. Je ne t’écris pas souvent, ma bien chère Aglaé, mais tu me connais, tu sais combien ma pensée est sans cesse avec vous tous, je n’ai donc pas besoin de prendre la plume pour le dire. Adieu bonne Aglaé si dévouée je t’embrasse comme je t’aime ainsi que nos chères petites[17] et Monsieur Alphonse[18], mon mari et Léon se joignent à moi pour vous envoyer à tous mille amitiés.

Félicité Duméril

J’embrasse le bon petit Jean[19] et la bonne petite Marthe[20].

Je suis bien aise de savoir Madame Fröhlich[21] de retour à Paris et aussi bien que possible pour la santé, ses chères filles[22] la soignent bien.

Mille remerciements pour ta visite à mes bonnes cousines Cordier[23] et Devers[24]. Toutes deux sont si intéressantes !


Notes

  1. Marie Mertzdorff.
  2. Paul Brouardel, ami et médecin.
  3. Emilie Mertzdorff.
  4. Caroline Boblet, veuve d’Edouard Charrier.
  5. Nièce de Mme Charrier à identifier.
  6. Léon Duméril.
  7. Charles Mertzdorff., père de Marie et Emilie.
  8. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  9. Louis Daniel Constant Duméril.
  10. Rosalie, domestique chez les Duméril.
  11. Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
  12. Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
  13. Besançon où habite la famille Soleil.
  14. Adèle Duméril, épouse de Félix Soleil, enceinte d’Auguste Soleil.
  15. Marie Anne Wallenburger, épouse de Melchior Neeff.
  16. Dont Marie Eugénie, François Xavier, Marie Anne Neeff.
  17. Marie et Emilie Mertzdorff.
  18. Alphonse Milne-Edwards, époux d’Aglaé Desnoyers.
  19. Jean Dumas.
  20. Marthe Pavet de Courteille.
  21. Eléonore Vasseur, veuve d’André Fröhlich.
  22. Adèle et Marie Fröhlich.
  23. Félicie Berchère, épouse de Charles Cordier.
  24. Maria Berchère, épouse de Giuseppe Devers.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Dimanche 8 et lundi 9 novembre 1874. Lettre de Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril (Morschwiller) à Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_8_et_lundi_9_novembre_1874&oldid=39697 (accédée le 22 décembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.