Dimanche 22 novembre 1874

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1874-11-22 pages 1-4.jpg original de la lettre 1874-11-22 pages 2-3.jpg


Cabinet d’oncle[1]

Dimanche 21 9bre 74.[2]

Mon Père chéri,

C’est vraiment bien mal à nous[3] de ne pas t’avoir encore donné de nos nouvelles c’est d’abord parce qu’elles sont excellentes, et ensuite parce qu’hier nous nous fiées l’une sur l’autre et qu’une fois l’heure de la poste passée nous nous sommes adressées des reproches mutuelles.

Nous allons parfaitement bien tous, le coryza d’Emilie est complètement passé elle seule n’ était un peu souffrante. Et toi mon bon petit Papa chéri, comment vas-tu, as-tu fait bon voyage[4] ? J’espère que oui et compte bien en avoir l’assurance demain matin. Pourvu que tu ne sois pas trop fatigué tu es vraiment trop bon d’avoir fait ce voyage il nous a fait tant de plaisir.

Aujourd’hui rien d’extraordinaire. Messe de 8h puis promenade dans la ménagerie[5] avec les Brongniart jusqu’au déjeune. Puis oncle [m’ a raccommodé] et m’a donné ensuite un ravissant petit bougeoir bleu en émail, puis à 1h au catéchisme ni Emilie ni moi n’avons été interrogée mais juge de ma surprise lorsque M. l’abbé Picon en rendant les analyses dit 1ère division cachet d’honneur Marie Mertzdorff je n’en revenais pas et j’ aussi Emilie m’a dit que j’avais fait une bien drôle de figure cela m’a fait bien plaisir. Emilie a eu les 1ères palmes. Puis en sortant Mme Brongniart[6] nous a ramenées chez bonne-maman Desnoyers[7] où tante[8] avait passé le temps du catéchisme.

Elle est toujours au lit cependant je crois qu’elle n’a plus rien ou peu de chose à la poitrine ce qui il la tient maintenant c’est un embarras de l’estomac ou des intestins ce soir elle allait mieux et m’a chargée de te le dire en t’embrassant bien de sa part. Nous sommes rentrées et avec oncle nous avons été chez Mme Pavet[9], Jeanne[10] est encore au lit mais sa jambe va mieux. Puis nous sommes encore retournés chez bonne-maman où nous avons trouvé la famille Clavery et maintenant la journée est passée sans que je m’en sois aperçue et malgré mes bonnes résolutions d’hier au soir me voilà écrivant encore à la hâte à mon bon petit père heureusement pour moi qu’il est bien indulgent.

Hier Samedi nous avons eu Mlle Duponchel[11], ma petite tête avance et continue à m’amuser beaucoup j’ai terminé le fusain et ai déjà indiqué les 1ères ombres.

A ton prochain séjour à Paris il faudra que nous allions au Louvre en voir l’original. Puis nous sommes vite parties chez Mme Roger[12] elle a trouvé que nous n’avions pas trop mal solfié et elle dit qu’Emilie a la voix très juste et que plus tard elle chantera très bien.

En sortant de chez elle nous n’avons pu céder à la tentation et sommes montées embrasser Paulette[13]. Nous y avons trouvé M. et Mme Biver[14] c’est vraiment un bien gentil ménage Lucy surtout est ravissante ils sont ici pour une huitaine de jours à peine pour la fête de M. Arnould[15].

Vendredi nous avons passé notre récréation chez Marthe[16]. La pluie a complètement cessé, tu l’as je crois emmenée avec toi car depuis ton départ il fait beau et plutôt froid (1 degré ce matin à 7h). Mon bon père, je crois que je n’ai absolument plus rien à te dire on parle pas mal de M. <Chr   > mais je crois que tout est exactement comme avant ton départ comme en m’étendant <sur> ce sujet que je ne connais pas du tout je ne serais nullement intéressante, je termine en t’embrassant bien bien fort et en te répétant combien je t’aime et j’ai été heureuse de te voir.

Ta fille qui t’aime énormément

Marie

J’embrasse bien fort bon-papa et bonne-maman[17], du reste si je fais ce dont j’ai envie ce soir je m’en vais leur écrire.


Notes

  1. Alphonse Milne-Edwards.
  2. Plutôt dimanche 22 novembre.
  3. Marie et sa sœur Emilie Mertzdorff.
  4. Charles Mertzdorff est venu quelques jours à Paris.
  5. La ménagerie du Jardin des Plantes.
  6. Probablement Catherine Simonis, épouse d’Edouard Brongniart.
  7. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  8. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  9. Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
  10. Jeanne Pavet de Courteille.
  11. Marie Louise Duponchel, professeur de dessin.
  12. Pauline Roger, veuve de Louis Roger, professeur de piano.
  13. Paulette, Paule Arnould.
  14. Lucy Arnould et son époux Alfred Biver.
  15. Probablement Edmond Arnould.
  16. Marthe Pavet de Courteille.
  17. Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Dimanche 22 novembre 1874. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_22_novembre_1874&oldid=51515 (accédée le 28 mars 2024).

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