Dimanche 11 et lundi 12 mai 1873
Lettre de Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril (Morschwiller) à Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)
Dimanche 11 Mai 1873[1]
Bien chère Aglaé,
Quoique je ne sois pas venue de suite te trouver dès mon retour à Morschwiller, ma pensée n’en était pas moins avec toi, avec nos chéries[2], avec Charles[3] et ton bon mari[4], je vous voyais tous les uns après les autres ainsi que les chers habitants du quai de Béthune[5]. Mon voyage s’est fait fort heureusement en compagnie de Madame Dollfus-Dettwiller[6] qui voyageait avec sa fille[7] et son neveu[8], tous trois ont été remplis d’attentions pour moi ; à mon arrivée à Mulhouse j’ai trouvé mon mari[9], nous étions heureux de nous revoir et de pouvoir parler ensemble de notre si chère famille[10] que je venais de quitter, quand je dis famille, tu sais bien que toi, M. Alphonse, tes chers parents[11] en faites partie, si ce n’est par les liens du sang, c’est bien par les liens du cœur.
Dès mon entrée à la maison, nos jeunes bonnes sont venues à ma rencontre avec des visages heureux de me revoir, elles ont bien travaillé en mon absence, et mon mari m’a dit qu’il n’avait eu qu’à se louer de leur service. A présent que je suis loin de vous, je voudrais bien recevoir quelques lignes me disant comment vous allez tous, tu avais un peu mal à la gorge lorsque je t’ai quittée, j’espère que le beau temps qui est revenu va te faire du bien ainsi qu’à ta bonne mère[12] que j’embrasse bien fort. Si je le pouvais, je te gronderais de m’avoir envoyé tes chaussons ; avec les semelles que j’avais achetées, j’ai eu très chaud, puis nous avons eu des chaufferettes jusqu’à Belfort. (Du 12) Je reprends ma lettre ce matin, ma bien chère enfant que nous aimons tant, hier je n’ai pas pu continuer ma conversation avec toi, voulant accompagner mon mari à Lutterbach où nous avons été en nous promenant. Hier a eu lieu à Vieux-Thann la première communion et je viens d’apprendre, par M. Walmer notre commis qui y était allé, un accident que j’ai toujours craint. Une jeune fille avec son cierge a mis le feu à sa compagne, heureusement qu’on a pu l’éteindre promptement, et la pauvre enfant en est quitte pour de légères brûlures au visage et aux mains. Hélas ! cette première communion rappelle celle de l’autre année, à cette époque nous étions tous heureux[13].
Je m’arrête, je veux comme toi me soumettre à la volonté de Dieu et m’armer de force et de courage. Les Êtres chéris qui sont au Ciel nous le commandent, nous les savons heureux, ils prient pour nous et nous sourient.
Les brochures et la lettre de M. L’abbé[14] sont parties, j’ai eu le plaisir de remettre moi-même à sa marraine[15] celle qui lui était adressée. C’est une femme d’un certain âge dont la santé paraît bien ébranlée, elle a été heureuse de recevoir une lettre de son filleul qu’elle aime beaucoup. Cette pauvre dame m’a parlé des épreuves qu’elle a eues dans la vie, elle a perdu une fille qui n’avait pas voulu se marier afin de se consacrer entièrement à sa mère, deux autres sont religieuses. Je retournerai la voir car il m’a semblé que ma visite lui faisait plaisir ayant pu causer avec moi de l’excellent abbé dont elle était heureuse d’avoir des nouvelles.
Adieu ma bien chère Aglaé, je t’embrasse comme je t’aime ainsi que nos chéries que je suis par la pensée dans l’emploi de leurs journées. Mille amitiés de notre part à Charles, M. Alphonse et tes chers parents.
Félicité Duméril
Ne m’oublie pas auprès de Cécile[16].
Le petit Tachard[17] va un peu mieux
Notes
- ↑ Lettre sur papier deuil.
- ↑ Marie et Émilie Mertzdorff.
- ↑ Charles Mertzdorff.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Quai de Béthune où habite Charles Auguste Duméril.
- ↑ Catherine Dettwiller, épouse de Gaspard Dollfus.
- ↑ Probablement Ida Dollfus.
- ↑ Probablement Gustave Dollfus.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Les Mertzdorff et les Duméril.
- ↑ Jules Desnoyers et son épouse Jeanne Target.
- ↑ Jeanne Target.
- ↑ Communion de Marie Mertzdorff, en 1872, avant le décès d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff.
- ↑ L’abbé Victor Bertsch.
- ↑ Joséphine Bertsch, veuve de Joseph Gerspach.
- ↑ Cécile, bonne des petites Mertzdorff.
- ↑ André Pierre ou son frère Pierre Albert Tachard.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Dimanche 11 et lundi 12 mai 1873. Lettre de Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril (Morschwiller) à Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_11_et_lundi_12_mai_1873&oldid=61758 (accédée le 15 novembre 2024).
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