Vendredi 6 février 1880
Lettre de Marie et Emilie Mertzdorff (Paris) à leur père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 6 Février 1880.
Je ne veux pas sortir mon Père chéri, et laisser passer l’heure de la poste sans venir te remercier bien fort pour la dépêche d’hier et pour la lettre de ce matin ; oui, vraiment, tu es bien un papa gâteau et moi une fille fort gâtée qui n’a qu’à souhaiter pour voir aussitôt remplir tous ses désirs ; merci donc encore mon petit papa pour cette nouvelle générosité qui vient s’ajouter à tant d’autres et qui va nous permettre de nous installer dans cette petite maison qui nous paraît si gentille. Je vois d’après ta lettre que j’ai été un peu trop diffuse dans mes explications de l’autre jour et que tu n’avais pas encore eu le temps de suivre avec détail toutes mes explications, qui du reste doivent être assez peu claires ; hier dans l’après-midi nous avons continué la chasse aux appartements ; une seule chose était possible mais toutes les chambres au nord ne nous séduisaient pas ; ce matin M. de F.[1] a été encore à une dizaine d’adresses qui lui avaient été données par une agence et il vient de venir nous rendre compte de son voyage d’exploration ; partout nous trouvons encore des inconvénients ; cuisines en sous-sol, appartements au nord sans jardin ou bien loyer beaucoup trop élevé && enfin tout cela nous enracine encore davantage dans notre pavillon de la rue Cassette et je pense qui demain M. de F. ira tâchera de conclure l’affaire.
Mon père chéri,
Marie n’a pas le temps de terminer sa lettre et j’en profite pour venir te remercier moi aussi de la longue et gentille lettre que j’ai reçue ce matin.
Je voudrais que tu puisses voir de tes yeux ce petit pavillon où notre imagination voit déjà la future Madame allant et venant, donnant ses ordres à Armand[2] et se trouvant heureuse sous tous les rapports. Je suis sûre que [tu] ratifierais complètement le choix qu’ils ont fait de cette maison, et du reste c’est bien grâce à toi qu’ils pourront s’y installer. Je crois qu’on terminera l’affaire dès demain.
Hier soir nous avons été chez Mme Delisle[3] ; tu sais ce que ce sont les soirées sérieuses où l’on s’assoit dans un salon, où l’on dit quelques mots et où l’on regarde ce qui se passe autour de soi. L’amusement n’est pas extrême, mais on ne peut cependant pas dire que ce soit ennuyeux. M. de F. est venu avec son beau-frère[4] et il a retrouvé là un de ses amis M. Robert de Lasteyrie qu’il a présenté à Marie. C’est celui qui a sauté au plafond lorsque M. de F. lui [a] annoncé son mariage et qui lui a répondu par vive Mme de Fréville. Malheureusement sa femme[5] n’était pas hier soir chez Mme Delisle.
Adieu mon père chéri, tante[6] dit qu’il faut partir ; je t’embrasse de tout mon cœur.
Emilie
Notes
- ↑ Marcel de Fréville, fiancé de Marie Mertzdorff.
- ↑ Armand, employé (encore imaginaire ?) des de Fréville.
- ↑ Laure Burnouf, épouse de Léopold Delisle.
- ↑ Roger Charles Maurice Barbier de la Serre, époux de Louise Sophie de Fréville.
- ↑ Antoinette Boucher des Forges (enceinte de Marthe de Lasteyrie qui naîtra en mai).
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Vendredi 6 février 1880. Lettre de Marie et Emilie Mertzdorff (Paris) à leur père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_6_f%C3%A9vrier_1880&oldid=36072 (accédée le 7 octobre 2024).
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