Vendredi 19 février 1875
Lettre d’Emilie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 19 Février 1875.
Mon doux papa,
Voilà bien bien longtemps que je ne t’ai écrit et tu dois trouver ta toute petite bien paresseuse mais vois-tu, le temps passe si vite, les minutes passent comme devraient passer les secondes et par conséquent les heures passent comme devraient faire les minutes mais c’est une réforme bien difficile à faire et je ne me chargerai pas de d’essayer car je crois que Phébus ne veut pas arrêter son char. Toujours est-il que les jours ont passé si vite que je n’ai pas même pu dire bonjour à mon papa chéri.
Tu es bien gentil petit père de m’avoir écrit pour mes 14 ans[1]. Bonne-maman Duméril[2] m’a aussi écrit mais je ne lui ai pas répondu ; aussi je te prends pour l’interprète de tous mes remerciements et de toutes mes amitiés.
Tante[3] qui t’a écrit mercredi t’aura probablement dit que Cécile[4] partait à Lyon pour voir sa mère qui est très faible et très souffrante en ce moment. Nous n’avons pas encore de ses nouvelles, j’espère <que> tout va pour le mieux.
Je vais maintenant te dire nos places. Marie[5] selon son hab sa nouvelle habitude a rapporté un 0 faute et elle est 2de en analyse logique. Quant à moi je n’ai qu’ à t’offrir que des horreurs et certes si tu n’étais pas mon petit papa je ne te dirais pas mes places, figure-toi que j’ai eu 6 fautes dans ma dictée, je suis première tout de même, mais cela n’en est pas plus honorable parce que la dictée était très facile, et puis, figure-toi que j’ai fait 12 fautes dans mon analyse. Mlle Viollet était à ce qu’elle m’a dit « courroucée » en voyant cela. J’ai été première dans les concours de vive voix. Marie aussi.
Hortense[6] est ici depuis hier pour faire une robe à une poupée qu’oncle[7] veut envoyer aux en Hollande aux petites Van Iterson[8]. La robe est en soie bleu avec une queue elle est déjà très avancée. Hortense partira ce soir après le dîner avec oncle, car elle a une leçon de danse chez Mme Buffet[9] à 9h1/4.
Hier, Marie est allée prendre sa leçon de couture chez Mme Charrier[10] car tante t’a dit sans doute que’une demoiselle[11] venait y apprendre à mettre des pièces et à faire les reprises sans que cela se voye voie on ne sent même pas la couture. Elle y va tous les jours depuis Lundi (Mercredi excepté) Samedi les leçons seront finies. Elle les prend avec Paulette[12]. Jeudi j’ai été jouer chez tante Louise[13] puis je à la fin de la journée je suis allé restée avec Hortense et le soir il y a eu le dîner de famille car il est remis maintenant au Jeudi. Ce matin nous avons travaillé, nous avons pris notre leçon d’allemand[14] et moi j’ai été chez tante Louise, où après avoir joué j’ai fait ma dictée avec Marthe[15] elle avait 12 fautes et moi 5 ce n’est pas étonnant qu’elle en ait autant car elle n’avait pas étudié toute les règles. En rentrant je me suis mise à mon analyse de catéchisme je n’en suis encore qu’à la 4e page. Ce soir Paulette en ramènera Marie et je pense qu’elle restera un petit instant.
Je n’ai pas encore fait mon piano, c’est pour cela que je me dépêche tant et que j’écris si mal. Tante et Hortense travaillent activement à la robe de poupée.
Mon bon petit père chéri comment vas-tu toi ? Tante a n’est pas encore sortie aujourd’hui elle a moins mal à la gorge et oncle vient de lui dire qu’il lui permettrait très probablement d’aller demain à la leçon de piano. Ce petit temps de repos n’aura pas fait de mal à cette bonne tantine. Bonne-maman Desnoyers[16] n’est pas mal, elle ne tousse pas, mais elle a l’air un peu fatiguée et ne sort pas encore. Bon-papa[17] a moins fort sa douleur de côté parce qu’il y a mis un emplâtre qui lui a beaucoup rougi excité la peau de sorte qu’il en souffre en ce moment. Cependant hier il était sorti. Adieu mon papa chéri je t’embrasse bien bien fort, et je te charge d’en faire autant à bon-papa et bonne-maman Duméril[18].
Mille pardons de la saleté de ma < >
Ta petite fille qui t’aime et t’embrasse de tout son <cœur>.
Emilie Mertzdorff.
Hortense, tante, Marie, oncle, tout le monde enfin t’embrasse et te fait bien des amitiés.
Notes
- ↑ Emilie Mertzdorff est née le 14 février 1861.
- ↑ Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril Duméril.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Cécile, bonne des demoiselles Mertzdorff.
- ↑ Marie Mertzdorff, sœur d’Emilie.
- ↑ Hortense Duval.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards revient d’un voyage scientifique aux Pays-Bas.
- ↑ Marie Pauline Louise Target, épouse de Louis Joseph Buffet.
- ↑ Caroline Boblet, veuve d’Edouard Charrier.
- ↑ Mlle Bertrand, maîtresse de courure.
- ↑ Paule Arnould.
- ↑ Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
- ↑ Leçon d’allemand avec Mme Lima.
- ↑ Marthe Pavet de Courteille.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Vendredi 19 février 1875. Lettre d’Emilie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_19_f%C3%A9vrier_1875&oldid=35833 (accédée le 15 novembre 2024).
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