Vendredi 11 mars 1859
Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa mère Félicité Duméril (Paris)
11 Mars 1859
Ma chère Maman
J'espère bien que tu ne m'en veux pas et papa[1] non plus de ce que j'ai été si, si longtemps sans vous écrire mais vous comprenez n'est-ce pas combien j'ai eu à faire, la semaine dernière pour faire nettoyer et déménager et cette semaine pour nous installer et nous organiser, en outre Mardi j'ai eu mon premier dîner et tu sais qu'avec toutes choses nouvelles et des domestiques qui ne sont pas au courant de votre genre de vie on a bien à faire. Maintenant c'est encore bien autre chose, Dimanche, je donne un grand dîner, nous serons 10. Les Zaepffel[2] viennent de Colmar puis nous avons invité les Heuchel[3] et les Henriet[4], tu vois que c'est sérieux et en outre un Dimanche avec l'église, les choses sont encore moins faciles à arranger ; mais je préparerai tout la veille d'autant plus que nous faisons un peu de cérémonie et sortons toutes nos plus belles choses. Ajoute à cela que nous mettons tremper demain pour la lessive, qu'aujourd'hui nous comptons tout le linge sale, que mes affaires ne sont pas finies de ranger ; que j'ai encore beaucoup à faire pour baby, que je veux préparer de l'ouvrage en prévision pour Marie[5] pendant que je serai au lit etc. et tu comprendras, ma chère maman que tout mon temps est bien pris quoique nous nous levions à 6 h 1/2. Au reste j'aime beaucoup cette vie active et m'en trouve à merveille ; j'ai pris mon second bain et hier le docteur Conraux qui est venu me voir m'a trouvée en aussi bonne voie que possible et m'a ordonné pour régime de continuer à manger, dormir et me remuer comme je le fais. Je suis toute heureuse en pensant que dans quinze jours je t'aurai là, tu seras si bien dans cette chambre et si près de moi que tu m'entendras je crois respirer. Avant ton départ ma pauvre maman, je crois que je te donnerai bien à faire encore.
D'abord 1° tu sais que la sage-femme que j'aurai et dont M. Conraux nous a beaucoup fait l'éloge hier, nous disant que nous pouvions avoir toute confiance en elle, a accouché et soigné Mme Mertian[6] et toute sa famille ; nous voudrions donc bien avoir des renseignements positifs sur cette femme et savoir médicalement ce qu'en pensait le grand-père de Mme Mertian qui était médecin ; maintenant veux-tu bien nous rendre le service de prendre ces informations, soit en écrivant à Mme Fröhlich[7] ou directement à Mme M. ou bien Charles[8] a encore eu une autre idée, voudrais-tu aller toi-même à Montataire y passer une journée et causer avec Mme Mertian. Fais là-dessus ce que tu voudras, ma chère maman et en tous cas nous te remercions bien.
Article 2 après mes couches je ne pourrai plus mettre mon corset actuel qui est si bien fait et qui me rend tant de service. Crois-tu qu'après, en envoyant mes mesures à Mme <Marture> elle pourrait me faire un autre corset, j'aime tant ceux qu'elle fait, on y est si bien ; pourrais-tu lui écrire un mot à ce sujet.
Artticle 3. voudrais-tu commander chez Roussel[9] une cuillère à sucre allant avec notre service je pense qu'il s'en rappelle la forme et également marquée C.M. A propos, figurez-vous qu'il y a 2 ou 3 jours nous avons retrouvé le petit couteau dans le bas de la maison où il avait été jeté avec le foin, j'ai été bien contente
Artticle4. peux-tu m'acheter 12 devants de chemises ordinaires pour mettre aux vieilles chemises de Charles.
Tu ne saurais croire combien nous sommes heureux chez nous et comme tout y est beau, je crains que tu ne trouves trop de luxe. J'allais oublier de prévenir papa que la semaine prochaine, après le 15, il aura la visite de notre tapissier[10] qui fait le voyage de Paris et que Charles a chargé d'acheter et de faire le meuble de notre salon ; palissandre et damas jaune, il se présentera chez vous avec un mot de moi et puis à papa de vouloir bien l'accompagner dans quelques courses. Je te demande pardon, mon cher père de cette nouvelle corvée mais nous serions bien contents que tu présidasses à ses achats et fasses donner ton goût tout en le surveillant et en le retenant dans des bornes de prix raisonnables.
Adieu, mes chers parents, il faut vraiment que je vous quitte, maman[11] m'attend au premier
mille merci pour vos bonnes lettres et toutes les peines que vous prenez pour nous ; nous vous embrassons du fond du cœur
Tout à vous votre fille
Crol
Je vous renvoie la note de Chabrol en vous priant de la payer.
Je suis extrêmement contente de Marie, elle ne perd pas une minute, travaille beaucoup et très bien ; je crois que tu en seras contente.
Notes
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Charles, a épousé en seconde noce Edgar Zaepffel.
- ↑ Georges Heuchel et son épouse Elisabeth Schirmer.
- ↑ Louis Alexandre Henriet et son épouse Célestine Billig.
- ↑ Marie Martin, femme de chambre chez les Mertzdorff.
- ↑ Probablement Caroline Désirée Roussel, épouse d’Henry Mertian.
- ↑ Eléonore Vasseur, épouse d’André Fröhlich.
- ↑ Charles Mertzdorff.
- ↑ Eugène Roussel-Doutre, orfèvre à façon installé 10 rue de Braque à Paris.
- ↑ M. Ronner.
- ↑ Sa belle-mère Marie Anne Heuchel, veuve de Pierre Mertzdorff.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Vendredi 11 mars 1859. Lettre de Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa mère Félicité Duméril (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_11_mars_1859&oldid=60483 (accédée le 9 octobre 2024).
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