Mercredi 6 mai 1874
Lettre de Marie Mertzdorff et Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Mercredi
Mon père chéri
Certainement tu ne te doutes pas de l’heure qu’il est et mon bon cousin Georges[1] est sans doute encore bien endormi. Il est 6 h ¼ et j’ai déjà fait ma gothique[2].
Mais tranquillise-toi petit père tes filles[3] n’ont pas changé complètement leurs habitudes et c’est par une erreur grossière qu’elles se sont levées à 5 h au lieu de 6 h. Et encore nous sommes-nous bien dépêchées pour être prêtes et ce n’est qu’en allant déjeuner à la demie qu’en ne rencontrant personne j’ai reconnu ma méprise. Emilie est enchantée mais moi je le suis moins car ma pauvre tête est lourde et je crains d’être bien fatiguée au bout de la journée. Mais ce n’est qu’un bien petit malheur.
C’est aujourd’hui qu’oncle[4] commence son cours.
du cours
En effet, mon cher Charles ces vilains petits oiseaux ont commencé de bien grand matin leur journée et cependant ils n’ont pas eu le temps de terminer ce griffonnage ; ils n’ont cependant pas perdu leur matinée mais c’était M'ercredi et on tenait à repasser les leçons. Je viens donc vous demander pardon mon cher Charles, d’être obligée de vous adresser ma prose à la place de celle de vos deux chéries, je ne suis cependant pas fâchée de pouvoir de suite vous remercier de votre bonne lettre ; je vais transmettre les fameux papiers à Mme Festugière[5]', vous êtes bien aimable d’avoir pris la peine de vous occuper de cette affaire. Combien il est triste de voir les gelées détruire en quelques heures de si belles espérances. Je ne crois pas qu’il y ait de grands malheurs sous ce rapport aux environs de Paris ; il fait presque froid par moment mais nous n’arrivons pas à une véritable gelée.
On comprend toutes vos préoccupations et oserai-je vous avouer que je suis toute effrayée de vous voir toujours augmenter vos sujets de préoccupations en cherchant à grandir votre boutique ; hélas dans l’industrie c’est toujours comme cela, pour se maintenir il faut s’augmenter.
Je regrette que vous ne soyez pas en ce moment petit oiseau et qu’il ne vous soit pas permis de pénétrer chez Mme Charrier[6]' ; vous jouiriez en entendant répondre Emilie, on fait un concours de géographie historique ; et notre petite Emilie répond avec un calme superbe et obtient ses jetons ; aussi n’y a t-il que la moitié de ma personne qui cause avec vous car l’autre moitié écoute les questions et réponses ; du reste Marie vient de parfaitement réussir son concours d’histoire et a même eu des compliments de Mme Charrier. Elles méritent bien toutes deux de réussir car elles travaillent admirablement ; elles sont bien contentes d’être en vacance, car pour Mercredi prochain elles n’ont qu’un concours de récitation à préparer ; puis dans 10 jours la distribution des prix. Nous avons le projet de bien nous amuser pendant ces quelques jours je puis même dire semaines (puisque le cours d’été ne commence que dans 3 semaines) ; nous devons lire, coudre, nous promener, voir les amies le plus possible ; enfin je suis bien sûre que le temps passera très vite. Je suis bien contente que la 1ère communion se trouve au commencement de J'uin ; de cette façon notre petite Emilie aura eu le plaisir de suivre tout son cours et va maintenant se trouver n’avoir rien autre à faire que son catéchisme et un peu de piano ; car bien entendu elle ne reprendra le cours d’été qu’après la 1ère communion. Cette bonne petite chérie va très bien ; elle tousse encore un peu, mais c’est une queue de rhume qui n’est pas inquiétante ; elle a beaucoup d’entrain et ne paraît pas fatiguée.
Dites mille choses à bonne-maman'[7] de ma part, remerciez-la de sa lettre que j’ai reçue hier ; je parlerai de M. Duméril[8] à Mme Buffet[9] V'endredi prochain.
Maman'[10] n’est pas allée à Montmorency, papa'[11] avait sa société d’histoire de France ; elle n’est pas malade mais a un peu mal à la gorge.
Adieu mon cher Charles, les enfants vous embrassent bien tendrement et je vous envoie nos meilleures amitiés
AM
Dans quelques instants le cours sera terminé, nous allons reconduire les amies. Mlle Arnould[12] se marie dans 15 jours.
Notes
- ↑ Georges Duméril.
- ↑ Gothique : exercice d’écriture.
- ↑ Marie et Emilie Mertzdorff.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Cécile Target, veuve de Georges Jean Festugière ; elle attendait l’acte de naissance de Marie Anne Communaux.
- ↑ Caroline Boblet, veuve d’Edouard Charrier.
- ↑ Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Alfred Duméril.
- ↑ Marie Pauline Louise Target, épouse de Louis Joseph Buffet.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Lucy Arnould va épouser Alfred Biver.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mercredi 6 mai 1874. Lettre de Marie Mertzdorff et Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) à Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_6_mai_1874&oldid=35220 (accédée le 21 novembre 2024).
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