Mercredi 2 novembre 1870 (D)
Lettre d’Émilie Mertzdorff (à Morschwiller chez ses grands-parents) à ses parents Charles Mertzdorff et son épouse Eugénie Desnoyers (Vieux-Thann)
Mercredi 2 Novembre
Chère mère mon cher petit papa,
Je vous aime de tout mon cœur et j'espère bientôt vous revoir. Ce matin j'ai demandé à Cécile[1] mes portraits j'étais encore dans mon lit je les ai embrassés en pensant à vous mes chers parents. Après je me suis levée mais comme il faisait extrêmement de vent je n'ai pas été à la messe, il n'y a que bonne-maman[2] qui y a été.
Pendant qu'on me peignait j'ai joué avec une chaise je l'ai attachée par le pied, et c'était mon cochon après je suis descendue pour déjeuner. Après j'ai été faire une dictée avec bonne-maman, il n'y avait que deux fautes, un accent, et l'autre je ne m'en rappelle plus. Puis j'ai demandé à t'écrire, pour te dire combien je t'aime ainsi que mon cher père. Hier je n'ai pas dessiné j'étais trop paresseuse.
Je vais te raconter notre journée tu sais déjà la matinée jusqu'au dîner. Après notre repas j'ai été me promener dans le jardin avec Cécile, mais madame la pluie l'a interrompue. J'ai fais des dessins avec une ficelle que je tortillais autour de mes doigts et de mes mains, j'ai fait la table les chandelles et le berceau. Puis comme bonne-maman voulait appeler Rosalie[3] pour nous lire un passage de la Bible je crois que s'était un sermon sur la montagne et comme cela nous ennuyait beaucoup ainsi que Cécile nous nous sommes bien vite mises à jouer aux dominos pendant que bonne-maman était sortie je ne sais pour quelle cause.
Après cela nous avons joué aux cartes, toujours avec Cécile. Marie[4] n'a jamais perdu. Mais comme bonne-maman devait aller chez madame Tachard[5] nous sommes remontées toutes les 3 dans notre chambre. Là nous avons joué à des petits jeux assis. Puis Cécile et moi nous nous sommes battues, moi j'étais Prussienne et Cécile Française. Nos petits gâteaux de Milan étaient exquis. Nous avons soupé et je me suis bien vite couchée car je mourais de sommeil. J'ai dormi comme un petit sabot. Il est 10 heures 55 minutes je travailler aux surprises, et prendre du repos.
Ce matin Cécile voulait mettre mon mouchoir au sale mais moi je n'ai pas voulu car c'était le tien que tu m'avais donné quand j'ai tant pleuré car je n'en avais pas, et comme tu t'étais mouchée dedans j'ai absolument voulu le garder alors Cécile et moi nous nous sommes débattues enfin comme j'ai donné quelques coups à Cécile elle a lâché le mouchoir et je me suis empressée de l'empocher.
N'as-tu pas de petites lettres de Paris[6] ou de tante Zaepffel[7]. Viens nous chercher avec père et les petites Berger[8], vont-elles toujours bien ces chères amies. Il fait un vent terrible, les volets tremblent ce qui fait beaucoup de tapage, c'est si triste le mauvais temps, surtout quand on n'est pas avec ses parents chéris.
Adieu chère mère et cher père je vous embrasse si fort si fort pour vous montrer ma tendresse et pour vous persuader qu'il faut venir me chercher et me ramener à Vieux-Thann.
Ta chérie petite Emilie Mertzdorff
Bien des amitiés de la part de Cécile elle te fait dire que tes petites filles sont très sages et ont très bien dormi.
Notes
- ↑ Cécile, bonne des petites Mertzdorff.
- ↑ Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Rosalie, domestique chez les Duméril.
- ↑ Marie Mertzdorff, sœur aînée d’Émilie.
- ↑ Marie Koechlin, veuve de Pierre Tachard.
- ↑ Des lettres de la famille Desnoyers sont attendues.
- ↑ Émilie Mertzdorff, épouse d’Edgar Zaepffel.
- ↑ Marie et Hélène Berger.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Mercredi 2 novembre 1870 (D). Lettre d’Émilie Mertzdorff (à Morschwiller chez ses grands-parents) à ses parents Charles Mertzdorff et son épouse Eugénie Desnoyers (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_2_novembre_1870_(D)&oldid=57013 (accédée le 3 octobre 2024).
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