Mercredi 12 avril 1876

De Une correspondance familiale


Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris)


original de la lettre 1876-04-12 pages 1-4.jpg original de la lettre 1876-04-12 pages 2-3.jpg


Mercredi 12 avril matin 7 h.

Marie chérie ta lettre m’a fait le plus grand plaisir, car elle m’assure que tu ne tousses presque plus. J’en dis autant de mon rhume, qui est passé & espère ne pas recommencer de si tôt.

Dimanche j’ai fait une visite aux Berger. & je me suis laissé retenir pour le souper, de sorte qu’il était 10 h du soir lorsque je me suis retiré. Visite qui compte comme tu vois.

En arrivant j’ai trouvé M. & Mme B.[1] au jardin avec M. Deguerre[2] & Mlle André. Cet heureux fiancé est installé à Vieux-Thann comme chez lui voilà déjà plusieurs mois qu’il passe auprès de sa fiancée ; ce qui n’arrive pas fréquemment. Il est du reste très bien & gagne beaucoup à être connu. Cependant à les voir ensemble l’on est persuadé que le jeune homme est bien plus jeune que la fiancée qui vieillit beaucoup. Les Demoiselles B.[3] étaient chez la voisine Stoecklin[4] où l’on a dansé au son d’un (harmonium) l’on s’est très bien amusé nous a t-on dit & il faut le croire, car l’on est arrivé à faire tourner l’Oncle Georges[5] avec Mme Stoecklin. Il y avait pas mal d’enfants, mais les cavaliers pour ces Demoiselles manquaient & c’est entre elles qu’elles tournaient.
Hélène est un peu enrhumée & marie va tout à fait bien. Lili est maigre mais grandit beaucoup.
L’on a beaucoup parlé de vous[6] & l’on voudrait bien vous revoir.
Cet été, il n’est pas question d’aller à la mer, l’on remplacera [cette] bain de mer par une villégiature à Gérardmer.

Du reste tout ce monde a si bonne mine que l’on n’a pas à se préoccuper des santés & M. Berger trouve que pour lui ce n’est pas du tout gai de rester ainsi un mois tout seul. Et je trouve qu’il a parfaitement raison.

Le mariage de Mlle Marie est fixé au 25 du mois, l’on a été assez gracieux pour m’inviter à la noce ; mais tu sais que j’avais une bonne excuse pour m’en dispenser. Je préfère ma noce à Paris ; ne le penses tu pas ? Du reste On l’a parfaitement compris & n’a pas autrement insisté.

J’ai eu la visite de M. le Curé[7] qui est venu me demander à donner quelque liberté aux ouvriers pour demain Jeudi Saint jour de l’adoration perpétuelle. De sorte que 2 jours de suite Jeudi & Vendredi l’on ne travaille pas la matinée.
Nous sommes excessivement pressés & il faudra regagner le temps perdu par des veillées jusqu’à 10 h ce qui est un peu dur pour les pauvres ouvriers.

Depuis hier pluie, & même ce matin neige, qui fait une boue des plus désagréable & nous contrarie beaucoup pour les travaux à faire à l’extérieur.

Les montagnes sont blanches & par contre aussi tous nos pauvres arbres qui étaient si bien en fleur. Il ne fait pas froid & il faut croire que le mal ne sera pas grand.

En ce moment l’on dévalise la serre pour l’Eglise je ne sais trop si l’on trouvera beaucoup de fleurs autres que quelques Azalées. Mais les jardins sont en bon état très proprets & soignés & comme tout est d’un beau vert, il y avait plaisir à le voir des fenêtres & même s’y promener, si l’on s’y promenait.

Les ouvriers sont toujours à la maison du moulin qui une fois finie sera une très gentille petite maison d’habitation. Il y a déjà quelques jours que je n’y étais & ne sais pas trop où en sont les travaux.
les papiers qui viennent de Paris n’étaient pas encore ici, c’est ce qui retardera un peu l’achèvement. Je ne crois pas qu’à Morschwiller[8] l’on soit fixé sur ce que l’on fera, est-ce avant l’entrée à Morschwiller ou après que l’on ira à Paris ; mais il est toujours question de ce voyage. M. Dumeril ne va pas mal il est encore bien maigre & je crois qu’il lui faut encore bien des soins avant d’être tout à fait bien, cependant il va & vient, est souvent au Moulin, car c’est lui qui dirige ces travaux avec son aide Louis Buisson.

Je ne serai pas à Paris pour ton jour de naissance, je ne puis donc le fêter avec toi, mais mes pensées ne seront pas loin. Ma présence ici est encore très utile, l’on n’avance pas, rien ne se fait qu’à pas de tortues. Tu ne vas pas trop te fatiguer ma chérie ; ces quelques jours d’attente & surtout ne pas t’inquiéter. Tu sais c’est pour moi que je te demande cela en vrai papa égoïste qui pense plus à sa fille qu’à son usine qui cependant a le talent de le retenir ici.

Je vais aller chez M. le Curé, t’embrasse avant ainsi que sœur, Oncle & tante[9], tout à toi
ChsMff


Notes

  1. Louis Berger et son épouse Joséphine André.
  2. Antoine Albert Deguerre (27 ans), futur époux de Marie André (28 ans).
  3. Marie, Hélène et Julie (Lili) Berger.
  4. Elisa Heuchel, épouse de Jean Stoecklin.
  5. Georges Heuchel.
  6. Marie Mertzdorff et sa sœur Emilie.
  7. Louis Oesterlé, curé de Vieux-Thann.
  8. Morschwiller où habitent Louis Daniel Constant Dumeril et son épouse Félicité Dumeril, avant de s’installer au Moulin.
  9. Alphonse Milne-Edwards et son épouse Aglaé Desnoyers.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mercredi 12 avril 1876. Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_12_avril_1876&oldid=41114 (accédée le 22 décembre 2024).

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