Mardi 8 février 1876 (B)

De Une correspondance familiale




Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris)


original de la lettre 1876-02-08B pages 1-4.jpg original de la lettre 1876-02-08B pages 2-3.jpg


Mardi 8 février 76.

Ma bonne grosse Marie chérie

il y a bien longtemps que je ne t’ai écrit mais il y a si peu d’évènements intéressants, bien heureusement, que l’on ne s’y sent pas poussé tout en pensant continuellement à tout ce que j’ai de chéri bien loin, trop loin d’ici.

Dimanche j’ai eu la bonne visite des parents de Morschwiller[1]. Il y avait longtemps qu’ils n’étaient venu & il leur tardait bien de voir le moulin & Vieux-thann. Bon-papa a bien changé, il ressemble maintenant tout à fait à son père & Mme Stoecklin qui ne connait que le portrait trouve une ressemblance frappante. Du reste c’est l’avis de toutes les personnes d’ici que ce pauvre père a bien changé, il est tout maigre, souvent très pâle & a vieilli. bonne-maman ne peut pas maigrir elle a moins changé.

Après le dîner nous étions à pied au moulin. Léon[2] était resté à la maison & comme il vient journellement ici, il a préféré passer sa journée à Mulhouse.
La maison du Moulin, que nous n’avions pas visitée depuis longtemps demande pas mal de réparations, surtout [in]térieurement. Pas mal de peintures & tous les papiers. Mais enfin c’est une bonne petite maison une fois mise en état qui sera une charmante habitation si seulement elle était moins isolée & il faudra de ce côté que je cherche à y créer quelques ménages de bons ouvriers pour donner plus de sécurité aux habitants. Montre à la main en allant tout doucement il nous a fallu 15 minutes pour en revenir.

Nous avons fait un séjour de 2 h au moulin, en rentrant il était 3 ½ h l’on m’a quitté pour aller faire visite aux Dames Heuchel & Stoecklin.

Moi de mon côté j’étais un peu plus tard faire visite à Mme Berger[3] où j’ai rencontré la famille Gast[4] avec leur petite fille[5] qui n’est plus au couvent depuis fort longtemps, elle n’y a fait qu’un petit séjour, parce qu’elle s’est y a été malade elle est rentrée pour se faire soigner & n’y est plus retournée. La voilà grande fille, je ne l’aurais pas reconnue, elle a été fort gentille, m’a demandé beaucoup de détail sur vous[6] & m’a fait promettre qu’à votre séjour ici, vous ailliez la voir. du reste Mme Gast aussi m’a chargé avec de [ ] ses amitiés pour vous deux.

J’étais installé au salon de Mme Berger lorsque Marie B[7] est venue me dire que M. & Mme Duméril, ayant manqué le chemin de fer sont à la maison. les dames ont trop bavardé, le temps se passait ainsi & arrivé à la fabrique Kestner le train passait, Il faisait pas mal froid & cet accident les forçait à rentrer bien tard, ils tenaient à rentrer. Nous avons passé un petit bout de soirée ensemble & de suite après souper la voiture les a conduits au train. Je sais par Léon que l’on est bien rentré à 9½ h. sans avoir souffert du froid & n’a pas eu de mauvaise influence sur leur santé.

Je reçois à l’instant la bonne lettre de tante[8] qui me dit qu’Émilie est un peu souffrante, j’espère bien que ce n’est rien & vous prie de m’écrire de suite comment elle va. Tu sais ma [malle] est vite faite. Mme Dumas[9] est à la veille d’aller à Cannes, pourvu que ce séjour fasse du bien aux deux[10] car c’est un grand sacrifice pour la maman.

De Nancy j’ai reçu de bonnes nouvelles, Zaepffel[11] est souvent souffrant d’après [ ] dire des deux ; cependant il va continuellement à la chasse, cela ne doit donc pas être bien sérieux. Ma sœur[12] a passé un bon hivers grâce a quelques petites précaution pour contre le froid. Il paraît que Nanette[13] a fait la confidence à Mme Heuchel qu’elle quittera en Avril, elle ne m’en a rien dit & je pense la demander ce soir, où elle viendra faire ses comptes.  

Broesch vient de terminer la chambre de Léon qui est fort belle & je pense que ces Messieurs[14] vont emménager un de ces jours.

Je viens de faire cadeau à Ma tante Georges[15] de tout mon rucher du Moulin, bonne-maman n’y tient pas & comme il s’agissait de faire un rucher neuf, je saisis l’occasion pour me défaire du tout. Ce miel donne un travail épouvantable à la maison & une fois en pots il y reste, c’est par que plusieurs centaines de Kilogrammes que cette douceur encombre les armoires.

Remercie bien Tantinette de sa bonne lettre, je ne doute pas un instant que la position d’Alphonse[16] au Jardin ne souffrira pas l’ombre de difficulté. Embrasse bien pour moi [la] petite sœur un peu souffrante & [pour] ma grosse mes meilleurs baisers. Ton père qui t’aime ChsMff

Il a pas mal neigé hier, fait beau aujourd’hui, mais cette neige a fait que les domestiques ont laissé une voiture à Mulhouse & sont heureusement rentrés en mettant 8 chevaux à chacune des autres 2 voitures. Demain ils retourneront à Mulhouse ce n’est donc pas si terrible. Il ne fait pas froid & cette neige ne restera pas longtemps.

Mlle Marie André n’est à Paris que depuis Jeudi dernier, elle a passé quelques [jours à] Nancy & Bar le duc, elle y restera un mois & ils rentreront tous.

Marie Zaepffel se marie en Avril, ne feriez-vous pas bien de lui envoyer par tante Z. un joli souvenir. Demandez tante, je crois que ce serait convenable, vous pouvez demander & je le ferai, ce qui peut lui faire plaisir.

Notes

  1. Louis Daniel Constant Duméril (bon-papa) et son épouse Félicité Duméril (bonne-maman).
  2. Léon Duméril.
  3. Joséphine André, épouse de Louis Berger.
  4. La famille de Victor Édouard Gast et son épouse Marie Caroline Thaler.
  5. Caroline Gast.
  6. Marie et sa sœur Émilie Mertzdorff.
  7. Marie Berger.
  8. « Tante », « Tantinette » : Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  9. Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
  10. Mme Dumas et son fils Jean Dumas.
  11. Edgar Zaepffel.
  12. Émilie Mertzdorff, épouse d’Edgar Zaepffel (« tante Z. »).
  13. Annette, cuisinière chez Charles Mertzdorff.
  14. Léon Duméril et Georges Duméril.
  15. Élisabeth Schirmer, épouse de Georges Heuchel.
  16. Alphonse Milne-Edwards.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mardi 8 février 1876 (B). Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_8_f%C3%A9vrier_1876_(B)&oldid=60677 (accédée le 21 novembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.