Lundi 3 avril 1843

De Une correspondance familiale


Lettre d’Eugénie Duméril (Lille) à son cousin et fiancé Auguste Duméril (Paris)


d’Eugénie Duméril.

Le 3 Avril 1843.

Papa[1] me permet de répondre, mon cher cousin, aux questions que vous m’adressez : je l’aurais fait plus tôt, si mes journées de vendredi et de samedi n’avaient été employées en achats indispensables, et si celle du dimanche m’avait laissé quelque loisir, mais, ce jour-là, la messe, les vêpres, et les visites de famille, emploient beaucoup de temps. Aujourd’hui, je me hâte de vous prier de demander à votre cousin et à votre cousine[2], ce que jugerez convenable. Je sortirai un de ces jours avec papa pour les présents que nous comptons faire à Auguste et à Adine[3]. Ne pourrais-je pas acheter une douzaine de couteaux de chaque espèce, ou quinze, suivant le prix qui se rapprochera le plus de celui que vous m’indiquez vouloir y mettre ?

Remerciez beaucoup ma bonne tante[4] des cadeaux qu’elle me destine, mon cher Auguste : dites-lui que la robe que je recevrai aura un double prix, choisie par elle, et que je suis très reconnaissante de l’affection qu’elle et mon oncle[5] me témoignent. Je désire que le châle que vous me donnerez soit de votre goût. Je suis très confuse d’occuper, en ce moment, tant de monde. Ce que vous m’avez transcrit de la lettre de Mme de Tarlé[6] me fait craindre qu’elle ne se fasse de moi une trop bonne opinion. Ne manquez pas de lui dire cependant, que je suis fort touchée qu’elle veuille bien exprimer d’une manière si aimable son désir de me connaître. J’avais entendu parler de Mlle Rath[7] : c’est vous qui avez écrit son nom sur une lettre de faire-part du mariage d’Auguste, que j’ai retrouvée ici.

Papa trouve comme vous que nous devrions bien visiter mon oncle Désarbret[8], pendant le cours de notre petit voyage. Nous sommes étonnés de ne pas recevoir de réponse de Paris, et nous pensons qu’aujourd’hui nous apprendrons quelle est l’époque qui vous convient pour le mariage. Pour qu’il eût lieu dans la semaine de Pâques, il faudrait être affichés dimanche prochain. La condition des dispenses est que vous juriez devant témoins que les enfants seront élevés dans la religion catholique, et que vous me laisserez entièrement libre de remplir mes devoirs religieux. Cet engagement devra aller à Cambrai, et papa désirerait que vous puissiez venir avec Félicité[9]. M. le curé[10] vient de lui dire, tout à l’heure, qu’il suffit que vous arriviez peu de temps avant le mariage. Maman[11] sait que l’on va en fixer l’époque. La maison sera bientôt toute disposée, mais, en ce moment, rien n’est en place. On arrange ma chambre, ce qui me gêne un peu pour écrire, à cause de maman, qui pourrait arriver, et qui ignore que je m’adresse à vous. J’ai été contente hier de voir maman me proposer d’aller chez ma couturière pour lui parler de la forme de ma robe de noce. Je fais des vœux bien vifs pour que tout se passe avec calme, pendant votre séjour, et celui de mon oncle et de ma tante, mais il ne faut pas trop y compter.

Adieu, mon bon cousin ; recevez la nouvelle assurance de mes sentiments très affectueux, et faites agréer à mon oncle et à ma tante, celle de mon respectueux et entier dévouement. Papa vous envoie ses meilleures amitiés.

E. Duméril.

Le mariage étant remis d’un mois, mon cher cousin, le temps ne nous manquera pas pour faire les emplettes. Je viens d’en causer avec papa, et nous avons pensé que je n’ai pas bien compris ce que vous me disiez, dans votre première lettre : vous manifestez l’intention de faire présent à Auguste et à Adine : moi, du plat d’argent, et vous, d’une douzaine de couteaux en argent, et d’une douzaine en acier, mais papa pense que ce cadeau coûtera plus que vous ne le pensez, et je préfèrerais que vous vous chargiez d’en faire l’achat, si cela vous convient.

Il suffira que vous soyez ici 6 ou 7 jours avant le mariage, pour l’engagement que vous avez à prendre.

Adieu, encore une fois, mon bon Auguste.


Notes

  1. Auguste Duméril (l’aîné).
  2. Charles Latham et son épouse Pauline Elise Delaroche.
  3. Charles Auguste Duméril, frère d’Eugénie, et son épouse Alexandrine Brémontier, dite Adine.
  4. Alphonsine Delaroche.
  5. André Marie Constant Duméril.
  6. Suzanne de Carondelet, épouse d’Antoine de Tarlé, amie qui vit au Havre.
  7. Henriette Rath, peintre à Genève, est une parente d’Auguste, côté maternel.
  8. Joseph Marie Fidèle Duméril dit Désarbret.
  9. Félicité Duméril, sœur d’Eugénie.
  10. Le curé doyen de Saint-Maurice à Lille est Auguste Deleruyelle.
  11. Alexandrine Cumont.

Notice bibliographique

D’après le livre de copies : lettres de Monsieur Auguste Duméril, 1er volume, p. 356-360

Pour citer cette page

« Lundi 3 avril 1843. Lettre d’Eugénie Duméril (Lille) à son cousin et fiancé Auguste Duméril (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_3_avril_1843&oldid=40512 (accédée le 16 avril 2024).

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