Lundi 21 octobre 1816

De Une correspondance familiale


Lettre d’Alphonsine Delaroche (Paris) à sa belle-mère Rosalie Duval (Amiens)

original de la lettre 1816-10-21 page1.jpg original de la lettre 1816-10-21 page2.jpg original de la lettre 1816-10-21 page3.jpg original de la lettre 1816-10-21 page4.jpg


n° 238 A

Paris 21 Octobre 1816

Ma très chère maman, je suis bien blâmable de n’avoir pas su trouver le moment de répondre plus tôt à la bonne et amicale lettre que j’ai eu la satisfaction de recevoir de votre part peu de jours après mon retour du Havre ; aujourd’hui je ne veux pas laisser partir M. Fauchon[1] sans lui remettre une petite lettre de moi qui vous exprimera à quel point j’ai été sensible à la manière détaillée et pleine d’une affection de grand-maman, dont vous me parlez de mon petit Auguste[2] ; je vois qu’à Amiens il a su se faire aimer comme à Paris, et je suis extrêmement heureuse que ce projet de voyage, (qui était fait depuis deux à trois mois) ait pu s’exécuter, puisque la présence de ce cher enfant vous a procuré des jouissances. Sa bonne figure et son aimable caractère nous en procurent de bien grande. Je suis au reste bien heureuse mère, mes deux enfants me témoignent une tendresse qui est pour moi d’un prix que je ne puis assez exprimer ; leur caractère et leur obéissance nous donnent aussi la plus grande satisfaction. J’espère que mon Auguste conservera toujours au moins un léger souvenir de ce petit séjour auprès de grands-Parents aussi bons que ceux qu’il a trouvés à Amiens. La tendresse de sa Tante Reine lui était connue. Elle lui en a donné de nouveau des preuves auxquelles j’ai été extrêmement sensible ; veuillez le lui bien témoigner de ma part. Je ne puis dire dans quelle parfaite sécurité j’étais à son sujet pendant ce temps qu’il a passé au milieu de vous. Je pressentais toutes les caresses et amitiés qu’on lui faisait, et j’en jouissais comme vous pouvez le penser.

M. Fauchon pourra vous dire qu’il le laisse dans le même état de santé que vous lui connaissez. Constant[3] a eu cette nuit un mal de gorge assez fort, qui l’est beaucoup moins fort aujourd’hui, ainsi j’espère que cela ne sera rien du tout. Du reste il est bien mieux portant qu’avant notre petit séjour en Normandie, et il est bien moins maigre qu’il ne l’était cet été.

Quant à Constant Père[4] il est encore en voyage après avoir passé ici deux jours il y a une semaine, il est reparti pour une tournée[5] qui doit durer une quinzaine. C’est avec M. Cloquet le cadet[6] qu’il fait cette dernière tournée, l’aîné[7] ayant eu quelques affaires qui exigeaient sa présence à Paris. J’attends mon mari le 31 Octobre. Je suis depuis quelques jours sans nouvelles de lui, j’espère beaucoup avoir une lettre ce soir. Je trouve comme vous que les occupations accumulées qu’il a dans ces voyages demanderaient plus de séjour dans chaque ville, cependant il n’en a pas été trop fatigué ; et à son dernier séjour ici il était très content de sa santé. Il fait ici depuis 2 jours un temps tout à fait d’hiver, et ce n’est pas sans bien du chagrin qu’on voit arriver cette saison si triste. Je voudrais bien apprendre ma chère maman que le beau temps qu’on a eu ce mois-ci a été favorable à votre santé. Vous étiez fort souffrante lorsque vous m’écriviez, je l’ai appris avec bien de la peine, et j’aime à espérer que cela n’aura pas duré, ou du moins que vous êtes beaucoup mieux.

Je ne puis vous dire quel plaisir nous goûtons à avoir sous les yeux l’excellent portrait de notre cher Papa[8], auquel je vous prie d’avoir la bonté de dire que ma jeune et jolie amie Mlle de Carondelet a été très sensible à tout ce que contient d’aimable pour elle, la dernière et amicale lettre que j’ai reçue de lui, elle m’a chargée de lui exprimer que c’est pour elle une véritable affection satisfaction de sentir que le Père de ses bons amis lui porte de l’affection. Si vous la connaissiez ma chère Maman je suis bien persuadée que vous auriez aussi de l’amitié pour elle. Elle envoie mille compliments affectueux à ma belle-sœur[9]. Je vous prie d’en distribuer de ma part autour de vous et de recevoir ainsi que mon cher Papa l’expression de mon tendre et respectueux attachement. Maman[10] vous prie l’un et l’autre de recevoir l’expression de son souvenir ainsi que ses compliments les plus empressés.

A. Duméril


Notes

  1. Probablement Alexandre Fauchon.
  2. Auguste Duméril.
  3. Louis Daniel Constant Duméril.
  4. André Marie Constant Duméril.
  5. Tournée des jurys de médecine.
  6. Jules Cloquet.
  7. Hippolyte Cloquet.
  8. Il s’agit du portrait de François Jean Charles Duméril peint par Louis Léopold Boilly, que son fils André Marie Constant fera lithographier par Nicolas Henri Jacob – voir la lettre du 9 mai 1818.
  9. Reine Duméril.
  10. Marie Castanet, veuve de Daniel Delaroche.

Notice bibliographique

D’après l’original (il existe également une copie dans le livre des Lettres de Monsieur Constant Duméril, 3ème volume, p. 146-150)

Annexe

A Madame

Madame Duméril

À Amiens

Pour citer cette page

« Lundi 21 octobre 1816. Lettre d’Alphonsine Delaroche (Paris) à sa belle-mère Rosalie Duval (Amiens) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_21_octobre_1816&oldid=61139 (accédée le 21 novembre 2024).

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