Lundi 14 avril 1873

De Une correspondance familiale

Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à ses filles Marie et Emilie Mertzdorff (Paris)

original de la lettre 1873-04-14 pages 1-4.jpg original de la lettre 1873-04-14 pages 2-3.jpg


14 Avril 73.[1]

Je vous écris, mes chers Enfants, du Salon de nvotre chère Maman[2], quoiqu'il soit 11h du matin ; c'est vous dire que je m'y trouve souvent, c'est en effet l'endroit de la maison où je préfère me tenir.

Comme convenu, j'ai passé ma journée d'hier avec à Morschwiller. Léon[3] était invité à dîner chez M. Stoecklin de sorte que nous avons passé la journée avec les 2 bons parents[4] au Jardin. Le temps, comme aujourd'hui, était très beau, ce qui nous a permis de descendre des chaises au Jardin & de bavarder à notre aise. Bonne-maman[5] a beaucoup raconté des anciens temps. Les Tachard sont de retour dans leur château, mais ils ont leur petit garçon[6] très malade l'on craint une fluxion de poitrine, ce qui est toujours très grave. Madame Tachard[7] n'est pas très bien non plus. Ils sont revenus un peu trop tôt d'Italie où il faisait déjà très chaud, tandis qu’ici ces derniers jours une bise froide & désagréable a enrhumé bien du monde.

Depuis Vendredi nous avons ici Vogt, le cocher, très malade. Hier au soir l'on croyait qu'il ne passerait pas la nuit ; ce matin l'on me dit qu'il va une idée mieux.

J'ai à aller à Wattwiller cet après-midi & c'est Tschirret qui va me conduire.

Je profiterai de l'occasion pour visiter les Henriet.

Léon est aujourd'hui en grande partie à cheval avec quelques amis.

J'avais proposé à Bonne-Maman de partir Mercredi prochain mais elle a préféré Jeudi, c'est donc Vendredi matin que nous aurons le plaisir de vous embrasser.

Demain est ta fête, ma chère Marie[8], je ne sais encore si je puis t'écrire ; mais puisque je suis loin de toi, je t'embrasse bien fort, en attendant ce bon Vendredi que je réserve pour me saturer bien à mon aise de toutes les caresses & tous les baisers de mes chers enfants.

Je Tu sais que je pense continuellement à vous chères petites amies & demain tout particulièrement je demanderai à Dieu pour qu'il veuille bien te faire à l'image de tes tendres & bonnes mères[9]. Héritière de leurs douces & aimables vertus, tu es assurée de faire le bonheur de tous ceux qui t'entourent & d'une meilleure vie dans un autre monde meilleur.

Nanette[10] s'en va demain à Colmar, d'abord pour conduire sa nièce, je ne sais où, & pour mettre en ordre son petit mobilier qu'elle a laissé là-bas & qu'elle se décide à vendre. Ce sera donc Thérèse[11] qui va être chargée de la cuisine & des petits soins de ma personne, qui n'en demande pas beaucoup.

Aujourd'hui Lundi de Pâques l'on ne travaille pas, mais l'on boira beaucoup.

La fille de la femme Kohler qui était à Moyenmoutier est rentrée ; avec la <bourse> vide, mais quantité de belles coiffures & de belles robes, la pauvre mère est désolée.

La population ouvrière d'Alsace est incontestablement Meilleure que celle de l'autre côté des vosges. Et cependant elle n'est pas bien édifiante.

M. le curé d'ici[12] a bien du mal avec les garçons qui ont fait la première Communion avec toi. Ce sont tous des ouvriers de Mme André[13] & qui ne promettent rien de bien bon. Les petites filles par contre sont très bien.

J'ai déjà mis de côté ce que tu me demandes grammaire allemande & musique & catéchisme.

Ne voyant plus rien à vous dire, je vous prie de bien embrasser tante & Oncle[14], bon-papa & bonne-maman[15], ne pas oublier Cécile[16] & de garder pour vous mes chéries mes plus affectueux baisers

votre père qui vous aime

Charles M.


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Eugénie Desnoyers (†), épouse de Charles Mertzdorff.
  3. Léon Duméril.
  4. Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril.
  5. Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril.
  6. André Pierre ou son frère Pierre Albert Tachard.
  7. Wilhelmine Grunelius, épouse d’Albert Tachard.
  8. Marie Mertzdorff est née le 15 avril 1859.
  9. Caroline Duméril (†) et Eugénie Desnoyers (†), épouses de Charles Mertzdorff.
  10. Annette, cuisinière chez les Mertzdorff.
  11. Thérèse Neeff, domestique chez les Mertzdorff.
  12. François Xavier Hun, curé de Vieux-Thann.
  13. Marie Barbe Bontemps veuve de Jacques André.
  14. Aglaé Desnoyers et son époux Alphonse Milne-Edwards.
  15. Jules Desnoyers et son épouse Jeanne Target.
  16. Cécile, bonne des petites Mertzdorff.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Lundi 14 avril 1873. Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à ses filles Marie et Emilie Mertzdorff (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_14_avril_1873&oldid=40256 (accédée le 3 octobre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.