Dimanche 19 décembre 1875

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1875-12-19 pages 1-4.jpg original de la lettre 1875-12-19 pages 2-3.jpg


Paris le 19 Décembre 1875

Mon Père chéri,

Voilà bien bien longtemps que je ne t’ai écrit ce que tu me pardonneras j’espère car tu te rappelles que c’est hier qu’avait lieu le fameux examen et que par conséquent j’avais bien des choses à repasser toute la semaine dernière.

Tu as sans doute assez envie de connaître le résultat de cette séance. Je t’avouerai qu’après m’être un peu bourrée de toutes mes leçons j’étais légèrement anxieuse le matin ce qui cependant ne m’avait retiré comme dit oncle[1], ni le boire ni le manger.
Pour me consoler je n’ai dit que des bêtises toute la matinée et à midi nous sommes parties pour arriver à une heure. J’ai retrouvé là toutes mes compagnes et j’ai constaté que de toutes c’était moi qui m’en faisait faisais le moins d’affaire. Cette pauvre Marthe Tourasse n’avait plus sa tête à elle, elle n’avait pas déjeuné et était en proie à une frayeur profonde.
Enfin à 1h ½ MM. [Lemant] et Pitolet[2] sont arrivés et il a été décidé que nous ne ferions que l’examen écrit et que l’oral aurait lieu Mardi prochain. Nous avons donc commencé par la dictée que nous avons faite dans le temps et dans les mêmes conditions qu’à l’hôtel de ville, puis un devoir d’arithmétique et enfin une composition d’histoire dont le sujet était : Lutte de la Neustrie et de l’Ostrasie. Ces Messieurs ont emporté toutes les compositions pour les corriger et nous donner des points d’après lesquels ils nous diront si nous serions reçues ou refusées ; nous ne savons pas encore le résultat mais j’ai aperçu à l’envers de ma dictée une faute ½ et ont peut en avoir 3 ; Mlle Bosvy qui a été initiée à tous les secrets avait l’air content et a dit à tante[3] que j’avais de bonnes notes ; l’histoire pour laquelle nous étions elle était partie ne doit pas être mauvaise non plus car M. Pitolet s’est penchée vers Mlle Des Essarts lui a demandé qui était Marie Mertzdorff et a dit c’est très bien. Je t’assure que loin de m’ennuyer ce petit examen m’a fait assez de plaisir car j’ai vu que ces Messieurs (qu’à l’examen je croyais les plus sévères) sont très-bons et ne m’ont pas fait peur du tout. Mardi ce sera l’examen oral et je ne m’en agite plus.

Aujourd’hui nous avons été à la messe, puis chez bonne-maman[4] ; oncle a été déjeuner chez M. Grandidier[5] et ne rentre qu’à l’instant nous sommes rentrées directement et j’ai fait mes comptes qui je t’assure en avaient bon besoin. Demain j’aurai mon cours, Mardi encore rue du Bac pour la fin de l’examen, et Mercredi cours.

Et toi mon bon petit père quand te verrons-nous ? C’est Sais-tu que c’est Samedi Noël et que par conséquent ton arrivée ne va pas tarder ; oh ! mon bon petit papa, quel bonheur de te voir ! Tu sais que ta petite visite du mois dernier ne comptait pas et que cette fois tu nous en dois une bien longue.
Voilà bien longtemps que nous n’avons eu de tes nouvelles j’espère qu’elles ne se feront plus beaucoup attendre et que ta prochaine missive nous fixera le jour de ton arrivée.

Ce pauvre oncle est enrhumé comme un loup ainsi que tous les habitants de la maison à l’exception d’E.[6] et de moi pour qui ça a été l’affaire de 2 jours ; François[7] est dans son lit, Élise très patraque et Maria[8] sur qui tout repose s’enrhume aussi. Nous avons reçu des nouvelles de Cécile[9] qui est toujours à Lyon ; sa mère[10] se porte de même et tante vient de lui écrire de rester autant que cela lui ferait plaisir.

Adieu, mon papa chéri, il se fait tard et je vais donner ma lettre à Mme Dumas[11] ; je t’embrasse de toutes mes forces et j’espère que bientôt je te réécrirai.
J’embrasse aussi bon-papa et bonne-maman[12] à laquelle je demande bien pardon de n’avoir pas écrit.

Ta fille qui t’aime de tout son cœur
Marie


Notes

  1. Alphonse Milne-Edwards.
  2. Amédée Pitolet, inspecteur de l'Instruction primaire.
  3. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  4. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  5. Alfred Grandidier.
  6. Émilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  7. François, domestique chez les Milne-Edwards.
  8. Élise et Maria, domestiques chez les Milne-Edwards.
  9. Cécile Besançon, bonne des demoiselles Mertzdorff.
  10. Marguerite Besancenez, veuve de Pierre Joseph Besançon.
  11. Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
  12. Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Dimanche 19 décembre 1875. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_19_d%C3%A9cembre_1875&oldid=60693 (accédée le 15 novembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.