Samedi 24 juin 1871

De Une correspondance familiale

Lettre de Marie Mertzdorff (Montmorency) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


Montmorency 24 Juin Samedi

Cher petit père

Je ne veux pas passer trop longtemps sans venir te dire un petit bonjour et te demander si tu as fait bon voyage.

Nous avons été mercredi à Paris nous devions partir vers 10 ou 11 heures, mais madame la pluie nous en a empêchées (Emilie[1] m'appelle pour aller jouer en bas, mais quoique maman[2] vienne de me faire un peu travailler je lui ai répondu que non, et je viens encore un tout petit peu bavarder). Enfin, elle cesse et nous partons pour Enghien où nous arrivons 5 min trop tard, et nous sommes obligés d'attendre le train de 2 h moins 5 min. Enfin nous partons arrivons bien, quittons bonne-maman[3] qui va faire des commissions et prenons l'omnibus qui nous conduit au jardin ; tante[4] est à l'ancienne ambulance, nous allons la rejoindre ; maman nous y laisse et elle va avec Cécile[5] arranger la maison pour nous coucher. Après avoir aidé tante à ranger les bandes par grandeur && nous rentrons chez tante ; Jean[6] avait fini sa leçon et Estelle[7] la robe de première communion d'une très gentille bossue ; comme elle est très propre tante nous emmène pour la lui porter, et nous avons eu le bonheur de voir la joie de cette pauvre petite qui marche sur des béquilles ; tante lui a essayé ; cela lui va très bien ; sa mère la femme Berger a bien remercié. Nous avons dîné chez tante et moi j'y ai couché ; pas Emilie car elle était un peu enrhumée et maman a préféré l'avoir avec elle, du reste maintenant cela est complètement passé.

Tante est venue me réveiller à 6 h et m'a habillée avant d'aller prendre maman et Emilie et d'aller à la première communion. Nous avions une excellente place et nous avons très bien vu tous les enfants une dame a emmené la petite bossue à l'autel car elle avait trop de peine à marcher toute seule et surtout à monter les quelques marches de l'autel, est-ce triste d'être dans cet état-là ! Nous sommes rentrées chez bonne-maman qui nous a donné à déjeuner puis tante nous a emmenées chez elle où nous avons joué et goûté avec Jean puis elle a été avec maman chez Mme Trézel[8] et nous avons été 20 min après la rejoindre à l'omnibus qui nous conduisit à la tour St Jacques nous avons notre correspondance et bonne-maman ne peut avoir que les numéros 40 jusqu'à 45 et l'on en était au 12 ; nous attendons ; deux omnibus passent un complet, l'autre une place ; impossible d'attendre nous laissons bonne-maman et Cécile à la station et nous voilà bravement parties avec maman pour la gare du Nord, cela a été on ne peut plus amusant nous dépassions tout le monde, maman a pris nos billets et nous avons pu partir toutes les trois toutes seules pour Montmorency. Tu vois que c'était bien amusant. Quant à bonne-maman elle est allée à pied jusqu'à la porte St Denis où elle a pu attraper une voiture

Elle me charge de toute ses amitiés pour toi et te fait dire : qu'elle te remercie bien de te priver de nous enfin tu comprends je ne peux pas m'expliquer.

Emilie qui fait des pâtés au jardin te crie par la fenêtre qu'elle t'embrasse bien fort et qu'elle t'écrira bientôt elle a d'abord dit demain ensuite lundi ne compte pas trop sur ces promesses

Cécile <> dire un petit bonjour de sa part à Nanette et Thérèse[9] puis un autant de la même Adieu.

Hier nous avons été faire visite à Mme Dollfus[10] où nous sommes restées très longtemps. La grosse lapine a 10 petits qu'on nous montrera demain. Miss[11] est à Paris et chasse le < > l'autre jour elle a eu une attaque de nerfs. Mon tablier bleu est fini tu sais pas celui de poupon l'autre que je me fais je l'ai sur moi. Maman te fait dire qu'elle est très contente de ses petites filles et elle t'embrasse bien fort, pour ma part j'en fais autant et te serre[12] bien fort. Ta petite Marie qui t'aime beaucoup. Pardon pour cette horrible écriture je me suis bien dépêchée.


Notes

  1. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  2. Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff.
  3. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  4. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  5. Cécile, bonne des petites Mertzdorff.
  6. Jean Dumas.
  7. Estelle, domestique chez les Milne-Edwards.
  8. Auguste Maxence Lemire, veuve du général Camille Alphonse Trézel.
  9. Annette et Thérèse Neeff, domestiques chez les Mertzdorff.
  10. Noémie Martin, veuve de Frédéric Dollfus.
  11. Miss, chienne d’Alphonse Milne-Edwards.
  12. Marie écrit : « sert ».

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Samedi 24 juin 1871. Lettre de Marie Mertzdorff (Montmorency) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_24_juin_1871&oldid=35511 (accédée le 14 novembre 2024).

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