Samedi 20 octobre 1877
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris le 20 Octobre 1877.
Mon petit papa chéri,
Combien je te remercie pour la longue lettre que j’ai reçue ce matin ! tu m’as trouvée essayant de dessiner d’après la bosse une tête de Minerve que je ne réussissais pas et tu es venu me récompenser et me donner du courage je suis restée à la travailler pendant 1 heure ½ ; depuis nous avons déjeuné et me voilà maintenant lancée au grandissime galop à t’écrire, il faut dans un instant nous habiller et partir au cours nous voulons encore passer chez Mme Dumas[1] qui est toujours un peu souffrante il ne faut donc pas perdre de temps ; je te demande à l’avance pardon pour l’orthographe et l’écriture. Nous avons beaucoup de prétentions aujourd’hui, nous irons au cours où Mlle Kheinhans[2] commencera la géographie ; je me réjouis énormément de la retrouver car je l’aimais beaucoup. A 4h nous courrons au Luxembourg pour connaître le résultat de l’examen de cette pauvre Emilie Allain, je la plains bien je t’assure et depuis ce matin je ne fais que de penser à elle ; cela doit être si pénible et elle doit tant craindre ayant échoué une 1ère fois. De là nous prendrons une voiture et nous irons à la gare attendre bonne-maman[3] qui revient décidément de Launay aujourd’hui. De tout cela tu vois que je ne ferai pas grand’chose ; je coudrai pendant le cours mais encore mon ouvrage n’est-il pas préparé et je vais être forcée d’en prendre un plus facile ; aussi tante[4] me charge-t-elle de te dire que je suis une petite horreur ! Tu le savais peut-être déjà ?
Hier nous ne sommes sorties que pour prendre l’air, nous avons été jouer pendant une heure ½ dans le jardin de tante Louise[5]. Je croque de plus en plus mal il n’y a que lorsqu’on prend comme règle de ne jouer que de la main gauche que j’arrive à gagner la partie ; c’est peu honorable comme tu vois.
Oncle[6] a dîné hier en ville ce qui l’amusait fort peu ; c’est demain, comme tu sais que nous allons à Fleury[7] cela nous amuse assez Emilie[8] et moi nous nous réjouissons de connaître cette propriété qui est paraît-il superbe et dont nous entendons parler souvent. Elle appartient au frère de M. A. Grandidier[9] qui est veuf pour la 2e fois et qui n’a pas d’enfants il y passe une grande partie de l’année ; depuis la mort de sa mère[10] c’est sa belle-sœur Mme Grandidier[11]que nous connaissons qui tient la maison.
Je ne sais plus ce que je te dis ; je vois la pendule qui avance et mon esprit rendu stupide par cette vue ne veut absolument plus me dire quelque nouvelle qui puisse t’intéresser ; je vais donc te quitter, mon papa chéri, pour me livrer à l’immense plaisir de m’habiller au froid mais il le faut. Adieu, je t’embrasse de toutes mes forces.
Ta fille qui t’aime de tout mon cœur,
Marie
Il gèle depuis quelques jours le matin mais comme nous avons le soleil toute la journée, nous n’avons pas encore pensé à faire du feu. M. Edwards[12] par contre en a toujours.
Notes
- ↑ Cécile Milne-Edwards, épouse de Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
- ↑ Caroline Kleinhans.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Fleury Mérogis.
- ↑ « E » : Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Ernest Grandidier, frère d’Alfred Grandidier.
- ↑ Probablement Henriette Cardon, veuve de Jacques Louis Grandidier et belle-mère des frères Grandidier.
- ↑ Jeanne Louise Marie Vergé, épouse d’Alfred Grandidier.
- ↑ Henri Milne-Edwards.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 20 octobre 1877. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_20_octobre_1877&oldid=35458 (accédée le 21 novembre 2024).
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