Mercredi 25 novembre 1874

De Une correspondance familiale

Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris)

original de la lettre 1874-11-25 pages 1-4.jpg original de la lettre 1874-11-25 pages 2-3.jpg


Ma chère Marie

Ta bonne lettre reçue hier me dit que vous allez tous bien ; cela fait toujours plaisir à constater.

De malade ici il n'y en a plus. l'Oncle Georges[1] est de retour à son bureau & même aujourd'hui il est allé à Mulhouse & l'autre Georges[2] s'il n'a pas bonne mine c'est dans sa nature, il n'a pas une santé bien robuste. Quant à ton papa je puis t'assurer qu'il va tout à fait bien. Ce matin par un froid de 8° j'étais par les prés au moulin où nous avons encore des maçons qui ne font pas grand chose.

Monsieur Henriet[3] vient de m'écrire il savait sans doute que je suis de retour, mais il m'adresse sa lettre officielle à Paris pour uniquement me faire part de la mort de M. le Curé[4]. Je m'attends toujours avoir la visite de Sœur Bonaventure, l'on ne sait encore rien de l'orphelinat. il faut espérer qu'il aura <désigné> pour que cette institution puisse rester. mais l'on m'assure qu'il n'a pas encore été trouvé de testament. C'est la grande préoccupation de bien des personnes en ville & je comprends que la bonne sœur soit inquiète.

Tu voudras bien dire à ta petite chérie[5] que je viens d'écrire à Bibi[6] en lui remettant son souvenir de 1ere communion.

Dans la maison je fais faire quelques petits changements ; voulant <nous> tenir dans votre chambre d'étude, je ferai transporter bibliothèques & livres de mon cabinet, il me semble que pour le travail du soir cela sera plus commode & je laisserai le petit salon comme il a toujours été pendant les temps où nous étions tous ensemble.

Tu vois que les changements ne seront pas grands & que vous saurez encore vous y reconnaître lorsque vous viendrez passer quelques jours dans votre village.

Le ruisseau qui traverse le Jardin est entièrement gelé, mais il n'y a pas de neige ni en plaine ni sur les premières collines. La Rangen n'a qu'un tout petit nez blanc, tandis que le gros Rossberg est un vrai glacier. Les rivières ne sont pas fortes, l'eau a beaucoup diminué & pour peu qu'il ne neige plus, nous serons encore une fois à court d'Eau.

La fabrique marche, elle produit tout ce qu'elle peut faire, même en dépassant les heures de travail, l'on veille souvent ce que je n'aime pas beaucoup, car le soir passé 7h je ne sors plus je reste à lire dans notre petit salon, tandis que Georges[7] va fumer sa pipe au laboratoire, car dans la maison l'on ne fume pas plus qu'au bureau, nous ne sommes pas encore assez prussiens pour cela.

Ainsi pendant que vous êtes à table à 6 1/2h il est 7h ici & nous sommes aussi dans la salle à manger, mais comme l'on ne cause pas beaucoup 20 minutes nous suffisent & lorsque vous vous levez de table tu me trouves installé devant la table du petit salon ou devant le feu à me chauffer les pieds.

Quant à vous je vous cherche régulièrement dans l'enfilade avec Oncle & tante[8], ce soir Mercredi c'est différent. Dans ta prochaine tu me diras comment vont bonne-maman Desnoyers[9] & Mme Camille[10]

J'espère bien que ta prochaine me dira que bonne-maman est levée & qu'elle va mieux. M. Desnoyers[11] est rentré bien portant ? toutes nouvelles qui m'intéressent comme tu le penses bien

J'étais si pressé en vous écrivant Dimanche dernier que je ne sais pas trop si je vous ai dit que M. Girol[12] est placé à Colmar ce qui me fait bien plaisir. ils[13] ont eu leur bonne leçon, il est bon qu'ils sortent de la peine.

Par le journal je sais qu'il n'y a rien de changé au Jardin & cependant ici je lis rarement le journal & m'occupe fort peu de politique que je ne comprends plus. & ne suis pas sûr y avoir jamais rien compris

Voilà l'heure du souper bonne nuit ma toute chérie, embrasse bien ta bonne tante & petit Oncle, pour Emilie chérie mille baisers & toi ma grosse crois à l'affection de ton père qui t'aime de loin comme de près

Charles Mff

tu voudras bien faire mes bonnes amitiés à Cécile[14]

Mercredi Soir 25 9bre 74.


Notes

  1. Georges Heuchel.
  2. Georges Duméril.
  3. Louis Alexandre Henriet.
  4. Jean Baptiste Grienenberger, curé de Thann.
  5. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  6. Bibi, surnom d’une personne non identifiée.
  7. Georges Duméril.
  8. Alphonse Milne-Edwards et son épouse Aglaé Desnoyers.
  9. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  10. Louise Ida Martineau, épouse d’Antoine Camille Trézel.
  11. Probablement Jules Desnoyers.
  12. Xavier Jules Oscar Girol.
  13. Xavier Jules Oscar Girol et son épouse Marie Reisser.
  14. Cécile, bonne des demoiselles Mertzdorff.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mercredi 25 novembre 1874. Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_25_novembre_1874&oldid=35112 (accédée le 16 avril 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.