Mercredi 13 juillet 1881
Lettre de Louis Daniel Constant Duméril (Rosult près de Valenciennes), à sa petite-fille Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Launay près de Nogent-le-Rotrou)
Rosult 13 Juillet 1881
Ma chère Marie,
Je veux te tenir un peu au courant de nos faits & gestes & te faire savoir quand nous serons de retour à Paris pour que tu puisses aussi nous donner des nouvelles de la petite colonie de Launay qui intéresse tant & à laquelle nous pensons bien souvent. Nous espérons que tout s’y passe bien, que la mère & l’enfant[1] continuent à aller aussi bien qu’à Paris & qu’enfin tout est pour le mieux, que les nouvelles que vous recevez de cette chère dame Desnoyers[2] ne vous donnent pas de préoccupation ; peut-être même qu’elle est déjà près de vous, car il me semble que l’époque où votre bon-papa[3] pensait être libéré est à peu près arrivée.
Quant à nous, nous poursuivons heureusement nos pérégrinations : notre départ de Paris s’est trouvé un peu retardé parce que Léon[4] a passé trois jours à Paris & qu’il venait nous voir tous les matins. Nous avions annoncé notre arrivée ici pour le mardi soir, mais nous avons reçu le lundi matin une dépêche qui nous engageait à ne pas nous mettre en route par cette température de 34 degrés & nous engageait à voyager de nuit : c’est ce que nous avons fait en effet ; nous sommes partis le mercredi à onze heures du soir & sommes arrivés chez nos chers parents[5] jeudi matin à 9 heures. Je ne pourrais pas te dire sur ce papier avec quelle amitié nous avons été reçus, ni quelles attentions on a constamment pour nous : enfin nous sommes fort heureux de retremper ici une vieille affection.
Nous avons passé la journée de lundi à Lille, dont nous ne sommes qu’à une heure de chemin de fer, & nous y avons passé tout notre temps avec l’Hortense[6] dont ta bonne-maman[7] t’a si souvent parlé & qui a été si heureuse de nous revoir qu’elle n’a pas voulu nous quitter, nous y avons fait nos repas & nous a promenés en voiture pour nous faire revoir la ville qui a été transformée depuis l’époque où nous l’avions vue, elle nous attendait au chemin de fer & elle nous y a reconduits. Nous avons trouvé en elle une femme distinguée de physique & de manières, modeste ne faisant aucun embarras de sa position sociale actuelle, parfaitement sensée dans ses idées & la manière de les exprimer : mais la pauvre femme s’est tuée à soigner son mari, qui a été très longtemps malade tandis qu’elle devait aussi s’occuper de son commerce & nous avons appris avec douleur que le médecin la regarde comme perdue & qu’elle peut mourir d’un moment à l’autre, quoiqu’elle soit admirablement soignée par sa fille & par son gendre[8]. Nous avons été bien heureux de lui avoir procuré cette journée de bonheur, bonté qu’elle nous a si bien exprimé.
Dimanche dernier nous avons dîné chez notre cousin le percepteur[9] à Saint Amand[10] & nous avions déjà fait la veille la connaissance de sa femme qui est très bien aussi : ils avaient dîné ici ce jour-là & ils reviendront encore ici le 14 jour où la recette est fermée. Nous repartirons le 15 au matin ; je viens d’écrire à Louis[11] que nous dînerions ce jour-là à la rue Cassette. Nous pensons y rester de manière à y voir Tante[12] & Émilie[13] au mariage de Mlle Brongniart[14] & nous partirons pour Tonnerre d’où Charles de Torsay[15] vient de nous écrire une charmante lettre pour nous dire qu’on nous y attend avec impatience. Nous comptons ensuite passer un jour ou deux à Dijon pour y voir Marie Léon[16] & notre petite Hélène, comme Léon nous y a si fortement engagés ; j’en ai prévenu Marie. En somme tout notre voyage nous a procuré de bien douces émotions & tout s’est passé sans trop de fatigue grâce à la bonne hospitalité que Marcel[17] & toi nous avez si gracieusement offerte. Il ne me reste que la place d’envoyer pour toi & ton entourage l’expression des tendres sentiments des vieux grands-parents.
C. Duméril
Notes
- ↑ Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville, et sa fille Jeanne de Fréville.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Léon Duméril.
- ↑ La famille Vasseur.
- ↑ Probablement Hortense Lebon, veuve de Charles Angelo.
- ↑ Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Adrienne Angelo et son époux Augustin Alphonse Couttenier.
- ↑ Charles Cumont, époux de Mathilde Mesnil.
- ↑ Saint-Amand-les-Eaux dans le département du Nord.
- ↑ Louis, domestique chez les de Fréville .
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Émilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Jeanne Brongniart épouse Maxime Cornu.
- ↑ Charles Courtin de Torsay.
- ↑ Marie Stackler épouse de Léon Duméril et mère d’Hélène Duméril.
- ↑ Marcel de Fréville.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Pour citer cette page
« Mercredi 13 juillet 1881. Lettre de Louis Daniel Constant Duméril (Rosult près de Valenciennes), à sa petite-fille Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Launay près de Nogent-le-Rotrou) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mercredi_13_juillet_1881&oldid=53864 (accédée le 15 novembre 2024).
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