Lundi 26 juin 1871 (B)
Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son épouse Eugénie Desnoyers (Montmorency)
CHARLES MERTZDORFF
AU VIEUX THANN
Haut-Rhin[1]
Samedi Soir Lundi 27 Juin 71[2]
Ma chère Nie
Je ne t'ai pas écrit hier Dimanche ayant profité de ma journée tranquille pour faire mes petits rangements de papiers & mes comptes. Depuis quelques jours l'oncle[3] est un peu souffrant. (même mal de reins) Ce matin je l'ai trouvé au lit, son petit Jules[4] est malade aussi, fièvre muqueuse, Conraux absent, c'est Mairel qui les soigne & que j'ai trouvé là ce matin. Il trouve le petit garçon un peu mieux & ne pense pas que la maladie dégénère en un mal plus grave. Mais en attendant la pauvre tante[5] a bien du mal, d'autant plus qu'elle ne sait pas se faire aider & qu'elle a une fille tout nouvellement chez elle.
Je viens de faire imprimer une circulaire pour prier que l'on arrête les expéditions, nous ne savons plus où donner de la tête. Cette circulaire ne sera pas bien reçue à Mulhouse & Paris ; mais à l'impossible nul n'est tenu. Du reste il y a très peu de marchandises, le mal est donc moins grand.
Ma santé est bonne & ne me sens nullement fatigué comme quelquefois cela m'arrive.
Mon dimanche s'est passé sans qu'il y ait eu de lettre de toi ou des enfants[6], mais j'espère que toute la petite Colonie va bien & si l'on pouvait seulement passer journellement quelques minutes avec vous, je ne me plaindrais pas. Chacun a sa tâche à remplir ici-bas.
Ce matin avant 6 h j'étais levé ayant à 7 h un mariage & me doutant bien que l'oncle ne viendrait pas. Cet après-midi j'ai à faire avec le curé[7] la liste des enfants de l'école & ce soir à 8 h mon conseil municipal. Voilà aussi Wattwiller qui va me prendre quelques heures pour éviter un procès !
Lundi soir. Je comptais recevoir de vos bonnes nouvelles aujourd'hui, mais le courrier de Paris n'est pas venu. Pourquoi ? personne d'ici n'en sait rien. De même depuis 15 jours nous ne pouvons expédier une balle & les marchandises en Suisse que nous avons chargées nous-mêmes sur les wagons il y a 6 semaines ne sont pas encore à destination. C'est réellement désolant !
De Morschwiller j'ai de bonnes nouvelles l'on va bien et je pense que Léon[8] viendra ici cette semaine & moi-même dès que je ne serai plus si seul compte y aller.
Pendant mon absence l'oncle a acheté un petit cheval pour la voiture, il est bien plus petit que son camarade, je l'ai vu passer ce matin, ce n'est pas très élégant ni beau, mais pour peu qu'il marche bien suffisant.
Je vois Thérèse[9] qui fait la toilette des chambres d'Elise[10] & son père, Nanette prépare des conserves de petits pois.
Je t'ai dit je crois qu'Elise a un paquet souliers de St Amarin ici adressé par poste à toi avec lettre d'avis & que par contre je crois avoir un parapluie chez elle.
J'oubliais que j'ai conseil !! Je rentre, quoiqu'un peu tard, il faut que je mette la lettre sous enveloppe autrement elle n'est pas sûr de partir, car demain matin je ne prévois pas avoir un instant. Je vous vois toutes trois dormant du sommeil du juste & vous faites bien. Je vous envoie tous mes meilleurs baisers & n'ai qu'un regret c'est de pas pouvoir appliquer ces bonnes choses sur ces bonnes joues que l'on aime bien. Mais je compte bien me faire payer capital & intérêts un peu plus tard.
J'oubliais j'ai écrit à Marie[11] & suppose que ma lettre aura trouvé l'adresse & que bientôt mon futur secrétaire particulier me donnera de ses nouvelles. Dis bien à Maman[12] que je suis très heureux de vous savoir près d'elle toujours si bonne pour nous tous. Tu l'embrasseras bien pour moi sans oublier père.
Ici tout est tranquille beaucoup de Jeunes gens quittent faute de travail, surtout pour la Suisse où le travail a repris une grande activité. Le temps est toujours à la pluie, aujourd'hui il a fait froid à reprendre ses habits d'hiver, ce que j'ai fait, cependant le baromètre remonte un peu. La récolte du raisin est compromise si d'ici 2, 3 jours il ne fait pas chaud ; Partie du foin coupé est perdu ou mauvais ; avec cela la quantité manque. Pourvu que nous n'ayons pas une trop mauvaise récolte. que < >
Bonsoir ma chère amie, distribue tes bons baisers que tout le monde aime recevoir tout autour de tous ceux que j'aime. Je compte bien demain soir écrire à ma petite Emilie bien aimée. tout à toi
CHMF
< > est à prévoir pour les <2> suivants
Notes
- ↑ En-tête imprimé.
- ↑ Le 26 juin plutôt.
- ↑ Georges Heuchel.
- ↑ Jules Heuchel.
- ↑ Elisabeth Schirmer, épouse de Georges Heuchel.
- ↑ Marie et Emilie Mertzdorff.
- ↑ François Xavier Hun, curé de Vieux-Thann.
- ↑ Léon Duméril habite avec ses parents à Morschwiller.
- ↑ Thérèse Neeff et Annette, domestiques chez les Mertzdorff.
- ↑ Elisabeth Mertzdorff, épouse d’Eugène Bonnard, qui a séjourné à Vieux-Thann avec son père Frédéric Mertzdorff et ses fils Charles et Pierre Bonnard.
- ↑ Marie Mertzdorff.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Lundi 26 juin 1871 (B). Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son épouse Eugénie Desnoyers (Montmorency) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_26_juin_1871_(B)&oldid=51672 (accédée le 21 novembre 2024).
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