Lundi 26 juin 1871 (A)

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (Montmorency) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann), avec quelques lignes d’Emilie Mertzdorff


original de la lettre 1871-06-26 (A) pages1-4.jpg original de la lettre 1871-06-26 (A) pages2-3.jpg


Montmorency le 26 Juin 1871[1]

Cher et bon père,

C'est encore moi qui prends la plume pour te donner de nos nouvelles qui au reste sont excellentes ; maman[2] est à Paris pour arranger avec tante Eugénie[3] à propos des meubles qu'on lui a achetés elle en profitera aussi pour faire quelques courses elle a fait ce matin un déjeuner [à] la viande à 8 1/2 elle est partie avec tante[4] oncle Alfred[5] et Jean[6], oncle Alphonse[7] était parti avant pour dîner avec un missionnaire qui vient de Chine.

Nous n'avons pas encore reçu une seule lettre de toi je ne doute cependant pas que tu nous aies complètement oubliées et je suis sûre que tu nous as déjà écrit. je t'en supplie ne te lasse pas, une ligne de toi nous fera un si grand plaisir, adresse-toi aussi une fois à nous. Chaque jour nous nous arrangeons pour qu'il parte une lettre à la destination de Vieux-Thann. Je t'ai déjà écrit deux fois, une fois Samedi et l'autre fois aujourd'hui. Tu ne Je crois bien que j'avais raison dans ma dernière lettre de douter du bon vouloir d’Émilie[8] qui joue comme une reine avec ses petits pâtés de sable.

Dimanche c'est à dire hier oncle bonne-maman[9] et tante ont collé le papier de la salle à manger moi j'étais la petite servante et faisait les commissions.

Ce matin nous avons été aidé bonne-maman à coller la bordure du bas de ce fameux papier. Voilà la mère Beland la blanchisseuse qui arrive, non c'est la matelassière.

Hier M. Edwards[10] est venu dîner. Quand Émilie a appris par la fenêtre que c'était à toi petit père que j'écrivais elle a dit moi j'écris aussi de sorte que je lui cède la place Adieu.

je t'embrasse comme je t'aime et

suis ta petite Marie qui t'aime beaucoup beaucoup

MM

Bonjour cher papa je m'amuse beaucoup ici je fais des pâtés de sable. Maman est partie ce matin avec tante et Jean ce qui m'a fait un peu pleurer mais je me suis consolée en collant avec avec bonne-maman la bordure de la salle à manger. Maman reviendra à 6 heures pour dîner.  

Je pense que tante et Jean te font bien embrasser.

Bien des choses de la part de maman bonne-maman et Cécile[11]'.  

M. Tu sais papa ce tablier neuf dont je te parle dans l'autre lettre, je lui ai fait un immense trou pas exprès je t'assure.

E. Père Marie grogne. Non papa pas du tout c’est que. Je l'ai seulement priée de ne pas réfléchir aussi longtemps je crois qu'elle a un peu envie de pleurer.

Elle m'a priée un peu trop fort alors.

Cessons cette atroce querelle. Les lapins sont charmants deux mères ont des petits nous les balayons tous les soirs après les avoir couchés ils mangent très bien dans la main.

Papa est ce que je n'écris pas mieux qu'elle ?    

Non pas. C'est très amusant ici et ce le serait encore plus si tu y étais. Émilie était très embarrassée l'autre jour pour savoir si le verbe « arbeiten[12] » était irrégulier ou régulier.

Adieu mon cher papa je t'embrasse fort fort  

Ta petite Emilie Mertzdorff et Marie en fait autant

Hier il est venu des Prussiens pour visiter les ruines et un tout petit peu plus j'étais obligée de leur parler oncle Alfred n'étant pas là. Cécile fait dire un joli ((Guten Morgen)) à Nanette et Thérèse[13].


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff.
  3. Eugénie Duméril, veuve d’Auguste Duméril.
  4. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  5. Alfred Desnoyers.
  6. Jean Dumas.
  7. Alphonse Milne-Edwards.
  8. Emilie Mertzdorff, petite sœur de Marie.
  9. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers, sa fille Aglaé et son gendre Alphonse restaurent la maison après l’occupation des Prussiens.
  10. Henri Milne-Edwards.
  11. Cécile, bonne des petites Mertzdorff.
  12. Arbeiten : travailler (en allemand).
  13. Annette et Thérèse Neeff, domestiques chez les Mertzdorff.

Notice bibliographique

D’après l’original


Pour citer cette page

« Lundi 26 juin 1871 (A). Lettre de Marie Mertzdorff (Montmorency) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann), avec quelques lignes d’Emilie Mertzdorff », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_26_juin_1871_(A)&oldid=51466 (accédée le 21 décembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.