Lundi 14 et mardi 15 mai 1877
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris le 14 Mai 1877.
Mon Père chéri,
Encore la journée passée sans t’écrire ! C’est bien mal et je t’en demande bien pardon ; tout cela vois-tu ce sont les suites du bal nous sommes encore un peu endormies et nous ne pensons pas à faire les choses à temps. Je ne t’ai pas écrit depuis la fameuse soirée et tu ne sais pas que tout s’est très bien passé. Nous avions des robes neuves c’est-à-dire une partie de robe seulement était neuve ; moi j’étais décolletée car Mme Dumas[1] en avait témoigné le désir ; Emilie[2] était exactement pareille à moi mais avec un corsage ouvert seulement. Il y a avait énormément de monde même beaucoup trop jusqu’à minuit ou une heure et les cavaliers manquaient il est vrai que même s’il y avait eu plus de danseurs on n’aurait pas pu danser plus faute de place. Nous nous sommes beaucoup amusées et Marthe[3] aussi qui m’a dit tout bas au milieu de la soirée : Je croyais bien m’amuser mais jamais je n’aurais pensé que ce serait autant. Nous avons retrouvé une foule de personnes de connaissance nous connaissions même presque tout le monde. Vers deux heures on a commencé un cotillon conduit par les jeunes mariés[4] et qui a été très amusant nous n’étions plus trop nombreux et on se connaissait très bien et on a tant tant dansé que ce n’est qu’après 4h que nous avons repris le chemin du logis ainsi que cette pauvre tante Louise[5] qui d’abord bien décidée à partir à minuit a cédé aux instances de sa fille et est restée jusqu’au bout. Nous avons dormi d’un somme jusqu’à onze heures nous avons été à la messe puis dans la journée nous avons été à la 1ère séance de la retraite de Jean[6] car c’est Jeudi décidément qu’il fait sa 1ère communion et nous allons tâcher de suivre sa retraite ; aujourd’hui (toujours suite du bal) nous nous sommes levées fort tard, comme la séance à Saint-Étienne était à 9h nous avons remis notre déjeuner à 11h ; et tante Eugénie[7] est venue nous surprendre juste au moment où nous nous mettions à table et elle a bien voulu partager notre modeste repas ; à 1h tante Louise est venue nous chercher pour le cours d’anglais[8] et maintenant nous voilà de retour ; je t’écris en attendant le retour dîner.
M. H. Stackler[9] est venu pendant notre absence et a dit à François[10] que ton intention était de partir Vendredi ou Samedi ; mon père chéri quel bonheur de te revoir ! Nous attendons chaque jour une lettre de toi car tu sais qu’il y aura demain huit jours que tu ne nous as écrit.
Mardi matin. Ma dernière phrase d’hier est inutile puisque ce matin une bonne lettre est venue nous mettre au comble de la joie en nous annonçant que c’est décidément Vendredi ou Samedi que nous aurons le bonheur de t’embrasser.
Je n’ai rien d’extraordinaire à te dire (quelle mauvaise plume j’ai et quelle incongruité elle vient de commettre !!) Bonne-maman Desnoyers[11] est revenue hier de Montmorency où elle était depuis Mercredi dernier je ne l’ai pas encore vue mais elle va bien paraît-il ; par contre elle a laissé le vieux François[12] très souffrant car il venait d’avoir plusieurs petites attaques et tout le monde croit qu’il ne vivra plus longtemps.
Nous attendons nos amies cette après-midi si toutefois leur mère n’est pas trop fatiguée.
Adieu mon Père chéri je viens de prendre ma leçon de Mlle Bosvy[13] et maintenant je vais faire mon devoir d’anglais. Je t’embrasse de toutes mes forces en attendant que je puisse le faire en réalité
ta fille qui t’aime
Marie
Mary
[Manix]
comme tu voudras
Notes
- ↑ Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Marthe Pavet de Courteille.
- ↑ Jean Baptiste Noël Dumas et son épouse Louise de Tournemine.
- ↑ Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille et mère de Marthe.
- ↑ Jean Dumas.
- ↑ Eugénie Duméril, veuve d’Auguste Duméril et grand-tante de Marie Mertzdorff.
- ↑ Cours d’anglais donné par Céline Silvestre de Sacy, épouse de Frédéric Foussé.
- ↑ Henri Stackler.
- ↑ François, employé par les Milne-Edwards.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ François, employé par les Desnoyers.
- ↑ Marguerite Geneviève Bosvy.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Lundi 14 et mardi 15 mai 1877. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_14_et_mardi_15_mai_1877&oldid=40260 (accédée le 22 décembre 2024).
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