Lundi 10 juillet 1871
Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son épouse Eugénie Desnoyers (Montmorency)
CHARLES MERTZDORFF
AU VIEUX THANN
Haut-Rhin[1]
Lundi matin 10 Juillet 71
Ma chère Nie je ne t'ai pas écrit hier & cependant je n'ai pas fait grand chose.
Samedi soir Léon[2] a passé ici pour venir nous demander l'amidon qui lui manquerait dans la journée si je n'en avais pas. Il a été à Lachapelle voir la douane & un local qu'il n'a pas arrêté, j'irai très probablement cette semaine pour finir. Voulant faire une promenade à cheval il n'est pas venu hier Dimanche par contre Paul & sa femme, l'oncle[3] & Barbé ont dîné avec moi. Quoique ce monde soit resté jusqu'à 6h soir la journée n'a pas été très animée, je ne suis pas fait pour recevoir & mon temps eut été bien plus agréablement dépensé même tout à fait seul. Mais ce n'est pas une raison pour ne pas espérer nous voir bientôt réunis de nouveau.
M. Jaeglé ne rentre que demain, il a dû aller jusqu'à la frontière près Neufchâtel < > Verrières où se trouvent 3 à 400 balles qui sont là depuis 3 mois faute de papiers, très probablement ces papiers sont enfouis dans quelque coin de la douane où il n'y a pas assez de monde travaillant pour débrouiller l'immense quantité de marchandises de toute sorte qui entre de tous côtés. Les employés sont surchargés de besogne & ne suffisent de longtemps pas.
ajoutant à cela le mauvais vouloir des compagnies, celui des prussiens, l'on arrive à cet état intolérable où rien ne circule.
Ne suffisant pas pour l'expédition de nos balles à Mulhouse Vogt a dû se mettre à conduire de Mulhouse & très probablement tout ce mois il en sera ainsi. Les allemands nous promettent une marche régulière de chemin de fer pour le 20 courant ce qui nous permettra de supprimer les voituriers de houille. Mais en France le désarroi est encore plus grand qu'ici.
Tout est tranquille ici ces deux derniers dimanches (de fête de village) l'on n'a pas entendu un cri, la population comprendrait-elle ?
Depuis mon retour ici je n'ai plus pas parlé à Léon de nouveaux projets du reste si je continue à <m’en> occuper à moi tout seul, il n'en a plus été question. Chacun a trop à faire maintenant, il faut que le calme se fasse & que l'on entrevoit un peu mieux un avenir quelconque. Ce sont les détails, très compliqués du moment qui m'absorbent bien plus que je ne voudrais, nos courriers sont très volumineux, cela se comprend.
Depuis 3 jours les voitures ont ordre de rentrer à vide, ce qui se fait c'était le seul moyen de se reconnaître.
J'ai reçu ton petit mot écrit à Paris avant ton départ à Montmorency. J'ai la satisfaction de vous voir tous en bonne santé. Tu feras bien, comme tu en avais le projet de consulter M. Gosselin[4] pour Mimi[5]. Comme tu ne m'en parles plus je suppose que cela n'est pas encore fait ; il faudrait le faire cependant & je compte sur ta sollicitude habituelle.
J'avoue qu'il me tarde de vous revoir tous, les journées se passent plus difficilement. avez-vous fixé quelque chose ? Quant à moi je saurai bien prendre 3 ou 4 jours pour aller vous chercher ; mais mon grand désir n’est pas de vous voir ne doit en rien influencer votre retour ; c'est à toi à savoir ce qui est le mieux à faire, il ne faut laisser ta mère[6] seule à Montmorency surtout si elle n'est pas tout à fait bien. Dans la semaine je n'ai guère de temps à me morfondre & mes soirées d'habitude, je les passe avec vous tous.
Je pense qu'il se passera encore une 10ne de jours ainsi ; mais encore c'est à toi à me dire lorsque tu voudras que j'aille te chercher, à moi à choisir alors mon jour.
Il est midi, je termine en t'embrassant bien, toi, enfants[7] & parents[8]. tout à toi
Charles M
Notes
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Lundi 10 juillet 1871. Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à son épouse Eugénie Desnoyers (Montmorency) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_10_juillet_1871&oldid=40204 (accédée le 14 novembre 2024).
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