Dimanche 27 août 1882

De Une correspondance familiale

Lettre d'Aglaé Desnoyers, épouse d'Alphonse Milne-Edwards (Vieux-Thann) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Villers-sur-mer)


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Vieux-Thann Dimanche

27 Août[1]

Ma chère petite fille,

Je quitte décidément Vieux-Thann demain soir pour être à Paris Mardi matin, je viens te demander si tu n’as pas quelques commissions à me donner, car rien ne me serait plus facile que de les faire et de charger ton mari[2] de ce que tu m’aurais demandé de choisir. C’est surtout à l’ouvrage que tu désirais faire à ta tante[3] que je pense… seulement dis-moi bien si c’est toujours pour le coussin que tu penches. Il faudrait me répondre de suite afin que je reçoive ta lettre Mardi matin. Je ne sais trop comment se passera la semaine, si papa[4] le veut bien, je le conduirai à Launay ; pour après revenir recevoir ton oncle[5] à Paris ; si au contraire il continue à s’y refuser, et que malgré mes instances je ne puisse le faire changer, je resterai au jardin tranquillement. J’ai reçu Vendredi une dépêche de Vigo, ces 2 mots : « bonne santé » m’ont fait grand plaisir ; mais maintenant je voudrais savoir le temps qu’il fait dans ce golfe de Gascogne où ton oncle doit être en ce moment, et quel jour il arrivera à Rochefort.

Je t’avais écrit que ton papa[6] sans nous en parler avait demandé à M. et Mme Duméril[7] de venir passer ici le mois de Septembre. Une lettre de ton bon-papa annonce leur arrivée pour la première semaine de Septembre, de cette manière, ils passeront près de 2 mois en Alsace ; j’en suis contente pour bonne-maman qui va pouvoir respirer un peu et surtout se reposer avant de recommencer son hiver.

Léon[8] qui est à Paris depuis 8 jours revient Mardi ; il est très satisfait de son voyage ; les échantillons qu’il avait portés ont été trouvés parfaits ; ce sont des mousselines de couleur pour l’exportation dont lui seul s’est occupé ; et il paraît qu’il obtient un résultat parfait très bon. Vers la fin de la semaine ou le commencement de l’autre, M. et Mme Léon[9], Mme Stackler[10] et les 2 enfants partent ; probablement pour une montagne ; on ne sait pas encore exactement la station qu’on choisira, car il faut un endroit où il ne fait pas trop froid à cause du tout petit. On ne compte pas revenir avant la fin de Septembre ou le commencement d’Octobre.

Ton cher père va vraiment mieux, il le dit lui-même ; hier nous sommes allés à pied chez sœur Bonaventure[11], elle nous a montré ses 5 vaches et ses nombreux petits cochons de vrais, qu’on élève avec succès. Ses enfants vont bien, elle paraît contente.

Nous sommes allés Vendredi refaire visite à Hélène B[12] nous l’avons trouvée bien portante et paraissant tout à fait heureuse, son mari a l’air ouvert, est très aimable, et ne cache pas son bonheur..  il a beaucoup de Georges Duméril. Aujourd’hui, cette jeune femme reçoit toute sa famille, ce qui lui fait un couvert de 12 personnes. Tu sais qu’il y a une nouvelle institutrice chez les Berger[13]. On la trouve en ce moment une perfection.

Ton père a reçu une lettre de Mme Henriet[14] lui parlant de tous ses chagrins ; il paraît qu’ils  payent pour leurs 3 pensions 3000 F, ce qui n’est pas trop, et ils ne reçoivent que 2000 F. Quelle triste position. Jeanne Baudry[15] a vendu ses meubles et est au havre avec son mari et ses enfants.

Je suis sûre que nous trouverons Jeanne[16] bien changée, son séjour avec ses cousins[17] a dû l’avancer sans que tu t’en aperçoives. Quelle gentille lettre elle m’a écrite, embrasse-la de ma part pour la remercier cette bonne petite Chérie. Hélène[18] est folle d’E.[19] elle veut toujours peindre ou se faire montrer des images. Mme Léon va bien, mais elle va passer la semaine presque dans son lit par prudence. Je ne sais rien des Fernet[20].

Nous venons de recevoir une lettre de Marie Flandrin et une de sa mère[21] ; on te remercie de ta lettre, on est à Fontainebleau.

Ce petit coin va renfermer mes tendres amitiés pour toi et Marcel ; tu n’es pas jalouse. C’est que je l’aime beaucoup.

AME  


Notes

  1. Lettre sur papier-deuil.
  2. Marcel de Fréville.
  3. Eugénie Duméril, veuve d'Auguste Duméril ?
  4. Jules Desnoyers.
  5. Alphonse Milne-Edwards, au retour d'une expédition maritime scientifique.
  6. Charles Mertzdorff.
  7. Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril (« Bon-papa et « bonne-maman »).
  8. Léon Duméril.
  9. Léon Duméril et son épouse Marie Stackler, parents d'Hélène et André Duméril.
  10. Marie Stéphanie Hertzog, veuve de Xavier Stackler.
  11. Sœur Bonaventure, qui s'occupe de l'orphelinat de Vieux-Thann.
  12. Hélène Berger, épouse d'Émile Poinsot.
  13. Dans les années 1870 c'est Marie Auguste Escbaccher qui occupait cette fonction.
  14. Célestine Billig épouse de Louis Alexandre Henriet.
  15. Jeanne Henriet, épouse de Paul Baudry et mère de Marie Paul et Charles (le jeune) Baudry.
  16. Jeanne de Fréville.
  17. Les enfants Barbier de la Serre : Louis, Étienne, Maurice et René.
  18. Hélène Duméril.
  19. Émilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  20. Probablement Émile Fernet et son épouse Pauline Burnouf, sollicités pour trouver un mari à Émilie Mertzdorff.
  21. Aline Desgoffe, épouse de Paul Flandrin.

Notice bibliographique

D’après l’original.

Pour citer cette page

« Dimanche 27 août 1882. Lettre d'Aglaé Desnoyers, épouse d'Alphonse Milne-Edwards (Vieux-Thann) à Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Villers-sur-mer) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_27_ao%C3%BBt_1882&oldid=43240 (accédée le 27 avril 2024).

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