Vendredi 5 août 1870 (A)

De Une correspondance familiale


Lettre d’Eugénie Desnoyers (Paramé) à son époux Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1870-08-05A page1.jpg original de la lettre 1870-08-05A pages2-3.jpg


Paramé

Vendredi matin

Bonjour, mon cher Charles, Te voici rentré dans tes domaines. Comment es-tu ? Bien fatigué, et ennuyé. Je voudrais avoir quelque chose à te conter ; mais les évènements font défaut. Bien dormir, bien manger, bien rire, un peu travaillé, voilà le sommaire de la vie des habitants de la Bella Riva. Marie[1] commence à t'écrire son journal mais la pauvre enfant attendra que les pages se remplissent pour faire partir sa lettre. Le plus remarquable est un magnifique coucher de soleil qui a fait notre admiration hier soir (Voir une description de J. J. Rousseau dans les leçons de littérature). En ce moment nous allons nous mettre en fabrication de paquets et nous restons toujours à écrire. Le temps est superbe. J'avais fait le projet d'écrire à oncle Georges[2] et je ne sais comment cela se fait voilà que c'est à toi, bon Ami chéri, que je m'adresse. Tu vois qu'on n'est pas toujours maître, même de sa plume.

1 h. La poste ne nous a apporté qu'une lettre de Mme Duval[3] qui tout occupée des secours aux blessés va aller à Niort pour organiser la même société qu'à Versailles ; M. Duval est à Avignon, Frédéric va passer son examen de droit ; Raymond va rejoindre à Châlons le général de division dont il est nommé officier d'ordonnance.

Peut-être Aglaé[4] gardera-t-elle encore Hortense[5] à Paris, si Mme Lafisse[6] ne peut pas la prendre.

La mer est magnifique, assez forte pour que le bain ait eu du piquant en roulant la petite jeunesse malgré la main du baigneur ; au grand regret des 3 fillettes[7] elles n'ont pas pu nager.

Une délicieuse petite barque à voile se promène devant nos fenêtres, avec le soleil c'est un charmant effet.

J'aimerais à rester à causer avec toi, mais il faut que j'écrive à Élise[8] dont j'ai reçu une lettre ; elle est à Fontenay vient d'avoir une angine mais va mieux, ses enfants[9] vont très bien, elle ne me parle pas de de ses parents. puis même besogne pour Victorine[10], Émilie[11], maman[12] et les idées ne sortent pas.

Je pense que tu auras eu Alfred[13] au chemin de fer de l'Est et que ce n'est que demain que j'aurai de tes nouvelles.

Adieu, cher Ami, reçois mes meilleurs baisers et ceux de nos deux bonnes fillettes ; et charge-toi de nos amitiés pour les grands-parents Duméril[14] et pour oncle et tante Georges[15].

Encore un bon bec, écris-moi maintenant à Paris

toute à toi

Eugénie M

Si tu es un jour sans lettre ne te tourmente pas


Notes

  1. Marie Mertzdorff.
  2. Georges Heuchel.
  3. Bathilde Prévost, épouse d’Alphonse Duval, mère de Frédéric et Raymond Duval.
  4. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  5. Hortense Duval.
  6. Constance Prévost épouse de Claude Louis Lafisse, tante d’Hortense.
  7. Marie et Emilie Mertzdorff et Hortense Duval.
  8. Élisabeth Mertzdorff, dite Élise, épouse d’Eugène Bonnard.
  9. Charles et Pierre Bonnard.
  10. Victorine Duvergier de Hauranne, épouse de Paul Louis Target.
  11. Émilie Mertzdorff, épouse d’Edgar Zaepffel.
  12. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  13. Alfred Desnoyers.
  14. Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril.
  15. Georges Heuchel et son épouse Élisabeth Schirmer.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Vendredi 5 août 1870 (A). Lettre d’Eugénie Desnoyers (Paramé) à son époux Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_5_ao%C3%BBt_1870_(A)&oldid=61033 (accédée le 21 novembre 2024).

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