Vendredi 13 janvier 1843

De Une correspondance familiale

Lettre d’Eugénie Duméril (Lille) à sa tante Alphonsine Delaroche (épouse – Duméril), par l’intermédiaire de sa sœur Félicité (Paris)


d’Eugénie Duméril

Lille 13 Janvier 1843.

Ma chère et bonne tante,

C’est avec bien du bonheur que je prends la plume pour m’adresser à vous, et je voudrais savoir vous exprimer ce que je ressens. Permettez-moi d’abord de vous dire combien je suis touchée du joli souvenir que j’ai reçu hier, et de la lettre si affectueuse que vous m’avez adressée. Cette affection et cette bonté que vous me témoignez me rendent si heureuse, ma chère tante ! Mes pensées se portent fort souvent vers vous et vers mon oncle[1], et mes vœux pour votre bonheur et pour le sien, sont bien vifs : s’il m’était donné un jour d’y contribuer, le mien s’en augmenterait beaucoup. Je souhaite que ma tendresse puisse apporter quelques charmes à vos moments de loisir : elle sera celle d’une fille toute dévouée, et je recevrai toujours avec une reconnaissance bien sentie les marques de votre affection. Je pense avec joie que vous jouissez souvent de la société des habitants de la rue St Victor[2], et que la vue du développement si satisfaisant de Caroline et de Léon, amène chez vous la jouissance que nous avons éprouvée pendant leur séjour à Lille. Il est impossible, en effet, de voir des enfants plus intéressants que cela, et nous nous plaisons souvent à nous en entretenir. Cette bonne Félicité qui pense toujours à moi, vient de m’envoyer un ouvrage qui m’a paru devoir être intéressant, et dont je compte la remercier ainsi que Constant, l’un de ces jours. Je suis chargée par Eléonore[3], qui a passé hier une partie de la journée avec moi, d’être son interprète auprès de vous : mais surtout de vous exprimer combien elle est reconnaissante de l’affection que vous lui témoignez, et dont elle est toute confuse.

Papa[4] a reçu hier de M. Delaroche[5] une lettre on ne saurait plus aimable : papa en est fort touché et compte y répondre incessamment. Nous avons, en ce moment, Eugène[6], qui est ici depuis huit jours, et nous quittera demain : il nous a apporté de bonnes nouvelles d’Eléonore[7], qui continue à aller de mieux en mieux. Nous pensions partir pour Arras à la fin de cette semaine, mais une lettre d’Auguste[8] nous a appris qu’Adine a été assez fortement indisposée, à la suite d’un saisissement occasionné par un incendie, qui s’est déclaré près de chez elle, ce qui l’a forcé de garder le lit, et de sevrer Clotilde, qui, fort heureusement, ne s’en est pas aperçu : notre voyage se trouve donc différé d’une dizaine de jours, et j’espère que nous aurons moins de pluie qu’en ce moment.

Je me fais une fête de mon petit séjour à Arras. Papa et moi trouverons sûrement Clotilde bien changée. Je suis gâtée par tout le monde, car ma bonne sœur Adine, qui m’a écrit le jour de l’an, m’a annoncé avoir apporté de Paris un souvenir pour moi.

Adieu, ma chère et bonne tante : recevez, je vous prie, ainsi que mon cher oncle, la nouvelle assurance de ma vive tendresse et de mon entier dévouement, et veuillez être, auprès de mon cousin[9], l’interprète de mes sentiments affectueux. Mes parents[10] me chargent de vous faire agréer l’expression de leur amitié bien sincère.

Votre reconnaissante nièce E. Duméril.


Notes

  1. André Marie Constant Duméril.
  2. Rue St-Victor habitent Louis Daniel Constant Duméril, son épouse Félicité et leurs deux enfants, Caroline et Léon.
  3. La cousine Eléonore Vasseur, un des enfants d’Angélique Cumont et de Léonard Vasseur, sert parfois d’intermédiaire pour le courrier.
  4. Auguste Duméril l’aîné.
  5. Michel Delaroche, frère d’Alphonsine.
  6. Eugène Duméril, fils de Florimond l’aîné, cousin.
  7. Eléonore Duméril, sœur d’Eugène.
  8. A Arras, habite la famille de Charles Auguste Duméril, frère d’Eugénie ; il est marié avec Alexandrine Brémontier, dite Adine. Leur fille Clotilde est née le 20 juin 1842.
  9. Auguste Duméril, fiancé d’Eugénie.
  10. Auguste Duméril l’aîné et Alexandrine Cumont.

Notice bibliographique

D’après le livre de copies : lettres de Monsieur Auguste Duméril, 1er volume, p. 317-319

Pour citer cette page

« Vendredi 13 janvier 1843. Lettre d’Eugénie Duméril (Lille) à sa tante Alphonsine Delaroche (épouse – Duméril), par l’intermédiaire de sa sœur Félicité (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Vendredi_13_janvier_1843&oldid=35742 (accédée le 7 octobre 2024).

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