Samedi 6 novembre 1875
Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris le 6 Novembre 1875.
Mon Père chéri,
Que de nouvelles importantes contenait ta lettre et que tu es bon d’avoir tout de suite pensé à nous l’écrire tu ne saurais croire combien nous t’en sommes reconnaissantes.
C’est une grosse affaire en effet que celle dont tu nous parles mais tous ici nous ne pouvons que t’approuver ; Morschwiller était pour toi un assez gros souci sans jouissance et je crois que pour bon-papa et bonne-maman[1] ce ne peut être une peine car ils n’avaient pas de lien sérieux les y rattachant ; toutefois ce sera un changement dans leurs habitudes ce qui est toujours pénible lorsqu’on est arrivé à un certain âge. Il est probable qu’à l’heure où je t’écris tout est déjà terminé, Dieu veuille que ce soit pour le mieux ; je suis sûre que mère[2] aurait complètement approuvé ta décision.
L’idée que tu as quant à l’appartement de bonne-maman Mertzdorff[3] me paraît excellente et c’est il me semble le meilleur et pour ainsi dire le seul parti à prendre bien que tante[4] ait pensé d’abord que bonne-maman et bon-papa préfèreraient retourner au moulin ; mais je trouve que l’autre arrangement serait bien préférable car ainsi l’on serait près les uns des autres sans pour cela être tout à fait ensemble. Seulement, mon pauvre petit Père, cela va te donner bien à faire car que de choses à déménager et à arranger de nouveau. Oh que je voudrais être grande et pouvoir d’aider un peu ! mais hélas, cela m’est impossible et je dois me contenter de travailler avec ardeur tout en pensant à toi ce que je fais bien et je t’assure que j’ai été au moins autant à Vieux-Thann qu’à Paris aujourd’hui si ce n’est plus.
Une plus petite chose mais bien bien importante aussi à notre point de vue que renfermait ta lettre, c’est que toutes ces affaires quelque importantes qu’elles soient ne te font pas oublier tes filles[5] et que ta visite si attendue n’est pas abandonnée ce qui nous réjouit bien. O papa vois-tu tu es trop bon je crois qu’il n’y a personne au monde d’aussi bon que toi. Si tu savais comme je t’aime et comme je me réjouis de t’embrasser !
Nous pensons bien à cette pauvre tante Georges[6] et d’après ta lettre je vois qu’elle a plus souffert qu’elle ne s’y attendait, j’espère que dans ta prochaine lettre tu nous donneras de ses nouvelles.
Jean[7] va mieux, Emilie[8] a été y passer une heure pendant ma leçon et il allait se lever pour la première fois ce pauvre chéri cela a été bien long et il a bien perdu sa bonne mine.
On ne sait pas bien ce qui a causé cette indisposition.
Hier bonne-maman Desnoyers[9] était dans son lit elle avait pris froid Jeudi et avait mal à la gorge. Je n’ai pas encore eu de ses nouvelles aujourd’hui, car tante qui devait y aller n’est pas rentrée.
Hier ce pauvre oncle[10] a eu une grande contrariété que tu comprendras bien ; on est venu lui dire qu’il était membre du jury pour le 16 9bre lui qui croyait si bien avoir été oublié, et qui commence ou plutôt devait commencer (car cela change tous ses projets) son cours le 12 à l’école de pharmacie. M. Edwards[11] va bien et est en plein conseil de l’instruction publique ce qui l’occupe énormément. Friquet chéri est un peu enrhumée, mais elle ne tousse pas ce qui te prouve que ce n’est rien ; tante finit son rhume et moi je me porte comme le pont neuf.
Maintenant que je t’ai passé en revue toute la maisonnée il ne me reste plus qu’à t’embrasser et t’embrasser encore puis te dire adieu et te souhaiter de bien réussir et de conclure cette affaire.
Ta fille qui t’aime de tout son cœur
Marie
Inutile de te dire avec quelle impatience nous attendons ta prochaine lettre.
Notes
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
- ↑ Eugénie Desnoyers (†), seconde épouse de Charles Mertzdorff.
- ↑ Marie Anne Heuchel (†), veuve de Pierre Mertzdorff.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Marie et Emilie Mertzdorff.
- ↑ Elisabeth Schirmer, épouse de Georges Heuchel.
- ↑ Le petit Jean Dumas.
- ↑ Emilie Mertzdorff (« Friquet »), sœur de Marie.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Henri Milne-Edwards.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 6 novembre 1875. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_6_novembre_1875&oldid=51970 (accédée le 18 décembre 2024).
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