Samedi 29 janvier 1881 (A)
Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris 29 Janvier 81
Mon cher Papa,
Il est l’heure à laquelle tu venais ordinairement me faire ta petite visite et, comme malheureusement je ne puis espérer de te voir aujourd’hui, je vais me dédommager un peu en causant avec toi. Tu viens probablement de finir de dîner et comme il fait très doux et que le soleil brille je pense que je te trouverai fumant ton cigare dans le jardin. Émilie[1] m’a donné Mercredi ta bonne lettre à lire et je crois que j’ai [eu aussi] des nouvelles de toi plus récentes par Marie Berger qui me dit que tu as pris part au grand dîner de fiançailles et qui semble très reconnaissante que tu aies bien voulu déroger en son honneur à tes habitudes casanières. Tu auras bien pu voir le fiancé[2] et même un peu le juger. J’espère que ton impression aura été bonne car je désire vivement que Marie soit heureuse. Tout ce que je lui souhaite c’est de l’être comme moi il me semble qu’on ne peut l’être davantage, plus je vais, plus je trouve mon bonheur parfait. D’après ta lettre je vois que le jeune homme est déjà installé à Vieux-Thann, mais il ne doit cependant pas loger chez eux[3] ?
Je t’écris tout en ayant l’oreille tendue pour écouter la sonnette car j’attends un peu tante[4] et Émilie avant leur cours. Hier j’ai passé un long moment avec elles et nous sommes un peu sorties ensemble. Jeudi je n’ai pas bougé, c’était mon jour de visites et malgré le mauvais temps j’ai eu 5 personnes.
- Mes prévisions ne me trompaient pas, mon Père chéri, je viens de voir mon cher monde un petit instant bien court mais qui m’a fait grand plaisir. Émilie tenait à la main son devoir de littérature qu’elle portait au cours et a passé une partie de son temps à le lire pendant que tante me défaisait un immense paquet de layette comme elle m’en apporte chaque fois qu’elle vient. Aussi je t’assure que les tiroirs de bébé[5] sont bien meublés, il aura en abondance chemises, brassières et langes et s’il n’est pas bien propre ce ne sera certes pas de la faute de ceux qui se sont occupé de lui confectionner son trousseau.
Sa chambre est charmante aujourd’hui il y fait chaud rien qu’à cause du soleil, et si cette bonne exposition ne le rend pas gai et heureux je ne sais ce qu’il faudrait inventer.
Je pense que vous avez comme nous depuis 3 jours un dégel complet, la neige a été bien longue à fondre dans notre petit jardin[6] mais il n’en reste plus trace maintenant. Les rues sont moins boueuses et je vais recommencer à faire quelques courses sans aucun enthousiasme je t’assure. Ce soir nous dînons chez mon oncle Villermé[7] avec les d’Arleux[8]. Demain au contraire nous aurons tante, oncle[9], notre mère[10] et Émilie chez nous ; il ne manquera que notre Papa chéri pour que la bonne réunion soit complète.
Adieu, mon cher petit Père, je t’embrasse de tout mon cœur ; quel malheur de ne pouvoir [encore] t’écrire à bientôt ! ta fille
Marie.
J’embrasse bien fort bon-papa et bonne-maman[11].
Notes
- ↑ Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
- ↑ Paul Henri Rich.
- ↑ Dans la famille de Louis Berger.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Jeanne de Fréville naîtra le 19 mars 1881.
- ↑ Le jardin du pavillon de la rue Cassette.
- ↑ Louis Villermé.
- ↑ Les Morel d’Arleux.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards et son épouse Aglaé Desnoyers.
- ↑ Sophie Villermé, veuve d’Ernest de Fréville.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 29 janvier 1881 (A). Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_29_janvier_1881_(A)&oldid=35564 (accédée le 5 octobre 2024).
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