Samedi 23 octobre 1869
Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Morschwiller) à sa mère Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers (Montmorency)
Vieux-ThannMorschwiller
Samedi[1] 11 h
Ma bonne petite mère,
Il fait si beau que je pense que tu vas vouloir, malgré le froid, prendre la route de Montmorency et je veux que demain tu y reçoives la visite de tes enfants alsaciens[2].
Merci pour les paroles si affectueuses que tu nous adresses dans ta bonne lettre de Mercredi, nous sommes bien contents de vous savoir arrivés sans froid et sans encombre, et c'est à nous à vous remercier pour la joie que vous nous avez donnée en venant nous trouver.
Tu vois par l'en-tête de ma lettre que je t'écris de Morschwiller pendant que bonne-maman Duméril[3] veille aux préparatifs du dîner et que ces Messieurs sont à la fabrique. Nous sommes en grand nombre. Georges[4] est venu à cheval, il se trouve bien de l'exercice et s'en retourne à Mulhouse, M. Paul est aussi venu de son côté et Charles, Julien[5], les enfants et moi sommes arrivés en voiture à la grande joie de MmeDuméril qui ne comptait que sur les Messieurs et mais a montré que la surprise lui était agréable. Elle me charge de tant d'amitiés, de bonnes choses pour toi, papa[6], Aglaé[7] que je n'en finirais pas. Julien est bien ; toujours quelques petits ornements sur le nez ou aux environs mais ce n'est rien, il est gai, entrain, s'occupe activement de l'école qui va se terminer pour le milieu de la semaine. Sois tranquille, bonne mère, nous le soignons bien, ce cher garçon, et hier nous l'avons revêtu d'une cotte de maille grise, comme celle que portait un des ouvriers de papa ; à l'aide de combinaisons ingénieuses on n'aperçoit pas cette double pelure qui n'est vraiment pas de trop par ce froid. Nous avons de la glace. Peut-être va-t-il rester ici ce soir si on insiste.
Je serai contente de recevoir mon manteau pour faire quelques visites. Le paletot d'hiver de Julien ne sera pas de trop.
Je remercie Aglaé de s'être occupée des robes des enfants. Si elle trouve une autre étoffe que le drap aussi bien, elle peut l'avoir, elles grandissent tant qu'on est effrayé de faire des robes ajustées qui deviennent de suite trop petites.
Si Aglaé vient te voir parle-lui donc pour savoir de quelle façon je pourrais m'y prendre pour faire faire à mon filleul Bonnard[8] un petit paletot garni d'astrakan et étant à sa taille ou si elle ne me conseillerait pas d'envoyer simplement la fourrure et le drap à la maman qui ferait faire le vêtement à la taille du bonhomme, ce serait des étrennes en avance bien entendu.
Merci à papa pour le livre Durant. Demain nous ferons une liste d'arbres fruitiers, et je vous écrirai. Nous ne voyons pas les prix marqués. Rien de neuf à la maison ; la lessive est sèche et pliée mais je ne pourrai avoir les repasseuses que l'autre semaine. Les fillettes vont très bien, elles embrassent bien bonne-maman et tante Aglaé.
L'eau coulait hier si abondamment au rocher que papa eût été satisfait de son œuvre ; c'est réellement beau. Adieu, ma chère maman, je t'embrasse de tout cœur ainsi que papa.
Toute à toi
Eugénie M.
Ferme le plus tôt possible Montmorency il fait bien bien froid et tu sais que tu en souffres. Bien des amitiés à notre bon François et à notre bonne Pauline[9].
Notes
- ↑ Cette lettre non datée est à situer fin octobre, entre le retour à Paris des Desnoyers (mi-octobre) et celui de Julien Desnoyers (1er novembre), probablement le samedi 23 octobre (voir la lettre du 16 septembre-24 octobre).
- ↑ Eugénie Desnoyers, son époux Charles Mertzdorff et les petites Marie et Emilie Mertzdorff.
- ↑ Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Georges Léon Heuchel.
- ↑ Julien Desnoyers.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Pierre Bonnard.
- ↑ François et Pauline, domestiques chez les Desnoyers.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Samedi 23 octobre 1869. Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Morschwiller) à sa mère Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers (Montmorency) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Samedi_23_octobre_1869&oldid=35501 (accédée le 21 novembre 2024).
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