Mardi 30 avril 1878 (B)

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1878-04-30B pages 1-4.jpg original de la lettre 1878-04-30B pages 1-4.jpg


Paris, 30 Avril 1878.

Mon Père chéri,

Emilie[1] t’a écrit Dimanche et depuis il s’est passé si peu de choses que je ne sais vraiment pas si elles suffiront à remplir ma lettre ; je ne veux cependant pas manquer au jour règlementaire et me voilà auprès [de] toi ; si je n’ai pas de nouvelles à t’apprendre je pourrai au moins te dire que nous pensons beaucoup à toi et que nous t’aimons beaucoup.

C’est demain jour de grande fête ici on ne travaillera nulle part, les administrations seront fermées, les collèges auront vacances && et le soir la ville entière sera illuminée le tout en l’honneur de l’ouverture de l’exposition qui n’est cependant pas achevée. Ce sera je crois très beau comme représentation tous les corps constitués sont convoqués M. Edwards[2] a pour lui seul 6 cartes différentes, mais il ira avec le conseil Supérieur. Nous avions d’abord eu l’intention de profiter des cartes non personnelles mais tante[3] pense que pour une grande fatigue on ne verra que peu de choses et fatigue contre fatigue elle préfère employer sa journée à préparer l’appartement de Mme Dumas[4] qui arrive Dimanche ou Lundi ; Marthe[5] a obtenu de passer par Moulins où demeure sa petite filleule aussi elle ne reviendra que Mardi 7 avec sa mère[6]. Nous avons reçu ce matin une lettre de chacun des membres de la colonie[7].

A propos de Moulins il paraît qu’hier tante et Emilie qui allaient chez le dentiste[8] ont rencontré Paul Duméril sur le quai Voltaire ; tu comprends leur étonnement ! Il leur a dit qu’il était à Paris depuis quatre jours et qu’il repartait le lendemain. Oncle Auguste[9] doit être en ce moment à Vieux-Thann il paraît que sa santé n’est pas bonne en ce moment ; Paul en paraissait inquiet.

Pendant que cette rencontre extraordinaire avait lieu moi j’étais bien tranquillement chez M. Flandrin[10] à terminer ma tête d’Auguste[11] dont j’ai fait au dire de M. Flandrin une tête de Napoléon. Mon dessin m’amuse plus que jamais en ce moment et je voudrais vraiment pouvoir lui consacrer plus de temps quant au piano il me produit l’effet contraire et il branle fort dans le manche ; si je n’y avais pas déjà consacré tant d’heures je l’abandonnerais mais je crois que j’aurais tort. Qu’en penses-tu ?
J’ai enfin fini Dimanche mon long devoir de littérature sur les historiens latins et me voilà de nouveau [en] courant je regrette de voir bientôt finir mon cours qui me faisait bien travailler et qui m’amusait beaucoup.
Heureusement qu’on a découvert hier au déjeuner que je ne savais pas un mot d’histoire contemporaine, me voilà une occupation toute trouvée je vais probablement lire l’histoire de M. Thiers[12] puis ensuite celle que tu m’as donnée au jour de l’an seulement le nombre des volumes m’effraie.

Voilà demain le 1er Mai donc suivant ta promesse nous voilà sommes en droit de t’attendre tous les jours. Quel bonheur de te revoir, mon Père chéri ! Quand arriveras-tu ? J’espère que le beau temps te suivra et qu’il nous accompagnera dans notre voyage ? Quels sont tes projets ? Nous ne savons plus maintenant à quelle époque tu comptes partir car nous pensions que d’abord que cette semaine nous serions déjà chez tante Z[13].

Adieu Père que j’aime. Mme Lima[14] est là. je t’embrasse de tout mon cœur.
ta fille affectionnée
Marie


Notes

  1. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  2. Henri Milne-Edwards.
  3. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  4. Cécile Milne-Edwards, épouse d’Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
  5. Marthe Pavet de Courteille.
  6. Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
  7. Les deux sœurs Milne-Edwards avec leurs enfants Marthe Pavet de Courteille et Jean Dumas séjournent à Cannes.
  8. E. Pillette, dentiste.
  9. Charles Auguste Duméril, père de Paul Duméril.
  10. Paul Flandrin.
  11. Probablement Auguste (63 avant J.-C.-14 après J.-C.), premier empereur romain.
  12. En 1870-1872, la 13e édition de l'Histoire de la Révolution française d'Adolphe Thiers (1797-1877) compte 10 volumes in-8.
  13. Emilie Mertzdorff, épouse d’Edgar Zaeppfel.
  14. Mme Lima, professeur d’allemand.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mardi 30 avril 1878 (B). Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_30_avril_1878_(B)&oldid=40973 (accédée le 19 avril 2024).

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