Mardi 21 décembre 1875

De Une correspondance familiale

Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris)

original de la lettre 1875-12-21 pages 1-4.jpg original de la lettre 1875-12-21 pages 2-3.jpg


Ma chère Marie

En écrivant hier à tantinette[1] j’étais tellement pressé que je ne lui ai même pas répondu à sa demande.
La leçon de physique pour Emilie[2] sera très intéressante & nous aurions le plus grand tort de ne pas faire suivre à cette chérie un cours qui lui fera certainement plaisir, c’est du reste ce que tante a pensé & comme elle a toujours raison nous sommes trop heureux tous à suivre ses bons conseils & ses bonnes idées.

Ta lettre d’hier qui me donne tous les détails de ton cours d’Examen m’a fait grand plaisir : comme tu le penses bien j’étais avec toi tout cet après-midi de samedi & que je suis avec toi de même ce soir Grand jour pour l’Oral. Cela se fait comme je vois tout à fait dans les règles. & vous allez être si bien habituées, que vous irez au Luxembourg comme si vous alliez à une leçon de Danse.

Je passerai les fêtes de Noël ici, comme la prise de possession de Morschwiller se fait pour le nouvel an j’ai encore bien des choses à faire & tiens à être ici jusque vers les derniers jours.

Hier Léon[3] est venu, son père[4] est encore couché, mais ne va pas mal c’est en effet un rhumatisme qui n’a pas l’air de vouloir se fixer & j’espère qu’il se lèvera dans un ou 2 jours. bonne-maman[5] est enrhumée, mais sans être malade.

Ici nous allons tous bien, malgré ce temps humide, mais qui n’est pas désagréable pour un blanchisseur qui craint bien plus de geler dans son travail que de s’enrhumer. Par-ci par-là quelques petites douleurs, mais comme ce sont de vieilles connaissances nous faisons bon ménage ensemble. Ce serait un excellent temps pour voyager & c’est bien malgré moi si je n’en profite pas ; mais comme je te le disais je me crois très nécessaire ici pour ces derniers jours de l’année.
Je n’ai pas besoin de te dire combien je me réjouis d’aller vous embrasser dans le courant de la semaine prochaine & d’ici là je vous écrirai encore & serai à même de vous fixer le jour.

Ce soir je vais encore avoir une assez longue séance au barrage du moulin, Mercredi j’irai probablement à Morschwiller & Mulhouse. Jeudi j’ai rendez vous avec M. Lalance[6] pour Morschwiller tu vois que mes journées sont prises & que je n’ai pas de temps à donner pour ici.

M. GeorgesDuméril est de retour depuis Samedi, il n’a pas bonne mine, cependant il va au bal, mais moins à la fabrique.
Je viens de voir Jeangele qui est toujours souffrant de son accident de vache, mais aussi le voilà qui se met à l’Eau de vie & je vais être forcé de lui faire la morale ou de le mettre à la porte.
Voilà Vogt[7] qui fait avec ses deux chevaux le service du Moulin & comme toutes les machines travaillent il a plusieurs voyages à faire & je suis content de lui. C’est le Jardinier[8] qui a la vie la plus agréable chez moi, il n’a absolument rien à faire en hiver.
De la fabrique rien de particulier, nous allons assez bien de ce côté & j’espère bien que lorsque Léon sera tout à fait ici, nous irons encore mieux.

La pluie d’hier a tout fait balayé la neige, il n’y a que le Roosberg qui soit encore blanc, le soleil est chaud & l’on aurait envie de faire un tour de Montagne.

Nanette[9] va bien seulement comme elle n’a pas encore reçu de lettre de son fils elle est de mauvaise humeur avec raison, car voilà 2 mois qu’il que son fils était ici & il aurait bien pu donner de ses nouvelles.
Aussi je crois qu’elle que la maman n’a plus aucune envie d’aller en Algérie.
Thérèse[10] m’a persuadé que je devais payer 10 F pour vous toutes pour le denier de la Ste Enfance ; c’est ce que j’ai fait avec plaisir & si ce n’est pas bien, je ne puis rien ; cet argent n’est pas perdu.

Tu vois ma chérie que je suis bien pauvre en nouvelles. J’aurai l’esprit plus ouvert un autre jour. Je t’embrasse bien ainsi que ta Sœurette chérie. Embrasse pour moi tante & Oncle[11] & crois-moi ton père qui t’aime
ChMff  
Mardi 21 Xbre 75.


Notes

  1. Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
  2. Emilie Mertzdorff (« sœurette »), sœur de Marie.
  3. Léon Duméril.
  4. Louis Daniel Constant Duméril.
  5. Félicité Duméril, épouse de Louis Daniel Constant Duméril.
  6. Probablement Auguste Lalance.
  7. Ignace Vogt, cocher de Charles Mertzdorff.
  8. Hypothèse : Édouard Canus.
  9. Annette, cuisinière chez Charles Mertzdorff.
  10. Thérèse Neeff, domestique chez Charles Mertzdorff.
  11. Aglaé Desnoyers et son époux Alphonse Milne-Edwards.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mardi 21 décembre 1875. Lettre de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa fille Marie Mertzdorff (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_21_d%C3%A9cembre_1875&oldid=60322 (accédée le 29 mars 2024).

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