Mardi 14 mars 1865

De Une correspondance familiale

Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris)

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Vieux-Thann

14 Mars 65

Ma bonne petite Gla,

Je voudrais écrire à toi et à Maman[1] ! et comment faire, car je n’ai pas des choses bien intéressantes à vous conter. Le seul moyen c’est de charger cette feuille de papier de vous porter toutes mes amitiés et de vous dire combien je vous aime.

Ma pauvre belle-mère[2] est malade ; depuis 6 jours elle garde le lit avec fièvre et sans manger ; elle souffre d’oppression, c’est asthme et catarrhe, son mal habituel qui a augmenté par ce vilain hiver &&. Nous avons été un peu préoccupés car son âge on a plus de peine à se remettre et à chaque atteinte de ce vilain mal, il lui reste un peu plus de difficulté dans la respiration. Mais pour cette fois le médecin[3] nous rassure et aujourd’hui elle est mieux. Charles[4] l’a veillée ces 2 nuits, elle est si contente de l’avoir près d’elle, et lui est si attentif et si bon garde-malade. Dans la journée c’est moi qui reste près d’elle ; les enfants[5] sont avec Cécile[6]. Elle prétend qu’elle est mieux soignée qu’une impératrice.

Que je suis heureuse de savoir maman bien ; qu’elle n’en fasse pas trop surtout, je crains les courses de Montmorency, car si je la savais malade loin ça me préoccuperait, enfin tu es chargée de lui faire toutes les recommandations imaginables.

Et toi tu vas tout à fait bien et tu te prépares à venir te reposer de tous tes dîners et festins au Vieux-Thann. On sera si content de t’y voir ainsi qu’Alphonse[7]. Le Rossberg[8] est toujours blanc, et il neigeait encore ce matin, depuis 5 mois nous n’avons eu que 2 jours de soleil, aussi tout est-il en retard mais cependant sitôt que le soleil paraît tu sens que c’est le printemps.

A propos, ma petite Gla, ne fais rien faire au chapeau gris des enfants ce n’est plus de saison ; nous verrons l’année prochaine. Mais si tu veux bien faire blanchir les chapeaux de paille des enfants et en faire garnir 2, ça me ferait plaisir de les avoir lorsque tu viendras car tout le monde trouve que les chapeaux fermés leur vont bien mal. Fais faire des fonds bas si cela se fait et des bords un peu larges parce qu’elles les mettront souvent, pour moi tu peux encore laisser le mien de côté ; j’ai mon rond noir que je pourrai mettre en commençant. Pour les enfants des têtes fortes 6 ans et 4 ans. Les chapeaux fermés sont trop petits.

Merci à Maman pour sa bonne lettre, je pense qu’aujourd’hui la cage[9] arrivera ; tout ce que vous me dites m’intéresse et me fait toujours grand plaisir. Tes salons doivent être splendides. Je n’ai pas récrit à Céline[10], tu lui diras mille choses aimables de ma part quand tu la verras, je pense bien à elle la pauvre enfant, quelle existence triste.

Adieu, ma petite Gla, je t’embrasse bien fort, envoie nos meilleures amitiés à nos chers parents[11] et à frères, Alph.[12] et Julien[13], est-ce que ce petit dernier ne pourrait pas venir avec vous ?

Charles vous adresse aussi toutes ses amitiés.

EM

Tout le monde me charge de mille compliments pour vous. Léon[14] va bien. Les enfants sont toujours en bon état mais la coquine de Founichon pleure sitôt qu’elle voit un visage qui n’est pas de nous.


Notes

  1. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  2. Marie Anne Heuchel, veuve de Pierre Mertzdorff.
  3. Probablement François Joseph Conraux.
  4. Charles Mertzdorff, fils de la malade et époux d’Eugénie Desnoyers.
  5. Marie et Emilie (Founichon) Mertzdorff, filles de Charles.
  6. Cécile, domestique chez les Mertzdorff.
  7. Alphonse Milne-Edwards, époux d’Aglaé Desnoyers.
  8. Rossberg, mont qui s’élève entre la vallée de la Doller et celle de la Thur, aux confins des cantons de Masevaux et Thann.
  9. La cage à oiseaux (voir la lettre du 9 février).
  10. Céline Desmanèches, dont la sœur Amélie, épouse d’Emile Delapalme, vient de mourir.
  11. Jeanne Target et Jules Desnoyers.
  12. Eugénie a sans doute voulu écrire « Alfred », prénom du frère aîné.
  13. Julien Desnoyers, jeune frère d’Eugénie et Aglaé.
  14. Léon Duméril, beau-frère de Charles.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Mardi 14 mars 1865. Lettre d’Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) à sa sœur Aglaé, épouse d’Alphonse Milne-Edwards (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Mardi_14_mars_1865&oldid=40712 (accédée le 15 novembre 2024).

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