Lundi 19 juillet 1880

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Villers-sur-mer) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1880-07-19 pages 1-4.jpg original de la lettre 1880-07-19 pages 2-3.jpg


Villers-sur-mer 19 Juillet 80.

Nous voilà donc arrivés et installés à Villers mon cher Papa, et je viens te dire tout de suite que notre voyage s’est admirablement bien passé, sans la moindre petite fatigue, qui je pense te fera plaisir à apprendre. Nous avons quitté Paris hier matin à 9h et nous étions à 3h à Villers qui m’a paru bien changé[1] ou alors j’en avais tout à fait perdu le souvenir, je n’ai même pas pu retrouver les chalets Louvard ! Nous sommes ici dans une petite maison très gentille et tout près de la mer ; nous sommes à côté du chalet de M. Schlumberger[2] que tu te rappelles peut-être et de là, en passant au travers d’un petit champ on est en un instant sur la plage. Hier soir déjà nous avons fait un petit tour pour contempler la mer qui est toujours bien jolie et qu’on ne se lasse pas d’admirer ; c’est un nouveau plaisir chaque année que de retrouver ces vagues et cette immense étendue d’eau. Ce matin nous avons défait nos caisses et rangé nos affaires, nous venons de déjeuner et dans un instant nous allons repartir pour la plage, la mer sera basse et Marcel[3] a bien envie de commencer à pêcher moi je me contenterai de regarder les petits habitants des flaques et je m’offrirai peut-être le très grand plaisir de décoller quelques actinies[4] bien gluantes.
Il fait un temps superbe et même chaud aussi nous nous réjouissons bien d’être au bord de la mer plutôt que d’étouffer encore à Paris. Marcel a apporté ici 2 énormes liasses de papiers de la Cour et il va travailler un peu ici afin d’être complètement libre le mois prochain.  Moi j’ai comme toujours apporté une masse énorme de livres mais je ne sais pas si je profiterai de tous.

Nous attendons notre Mère[5] dans le 1ers jours d’Août elle ne s’est pas décidée à partir en même temps que nous afin de continuer à aider Louise[6] jusqu’à son départ. Sa chambre est prête et ici et nous serons bien contents de la voir arriver.
J’ai emmené Armandine[7] avec moi et nous la garderons ici jusqu’à ce que notre mère arrive avec ses 2 bonnes, alors je l’enverrai dans son pays où elle passera tout le reste des vacances.

Je suis bien contente de savoir que tante Marie[8] est remise et qu’elle a pu partir pour Cauterets ; te voilà bien seul [pour le moment] mon Papa chéri et tu dois [encore] il me semble avoir beaucoup à faire surtout ne te fatigue pas trop.

Adieu, mon bon Père, je ne sais trop quand cette lettre te parviendra, j’ai peur que ce ne soit que dans longtemps mais dans tous les cas je la charge d’une quantité de baisers et d’amitiés pour toi, je voudrais bien, je t’assure pouvoir t’embrasser réellement et je serais très contente si je savais qu’un de ces jours nous allions te voir arriver à Villers.
J’embrasse bien bon-papa et bonne-maman[9], je te prie de vouloir bien dire à bonne-maman que j’ai envoyé avant de partir le petit cahier à Mme Gastambide[10].
ta fille heureuse,
Marie

Marcel qui vient de lire ma lettre veut que j’y rajoute bien vite beaucoup d’amitiés de sa part mais je prétends que cela est naturellement sous-entendu.


Notes

  1. Marie Mertzdorff avait passé les vacances d’été à Villers en 1868.
  2. Probablement Charles Schlumberger, époux de Mélanie Zuber.
  3. Marcel de Fréville, époux de Marie Mertzdorff.
  4. Actinies : nom scientifique des anémones de mer.
  5. Sophie Villermé, veuve d’Ernest de Fréville.
  6. Louise de Fréville, épouse de Roger Charles Maurice Barbier de la Serre, vient d’accoucher de son quatrième enfant.
  7. Armandine, jeune bonne.
  8. Marie Stackler, épouse de Léon Duméril.
  9. Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
  10. Emilie Delaroche, veuve d’Adrien Joseph Gastambide.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Lundi 19 juillet 1880. Lettre de Marie Mertzdorff (épouse de Marcel de Fréville) (Villers-sur-mer) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_19_juillet_1880&oldid=40335 (accédée le 15 novembre 2024).

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