Lundi 16 avril 1877

De Une correspondance familiale


Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


original de la lettre 1877-04-16 pages 1-4.jpg original de la lettre 1877-04-16 pages 2-3.jpg


Paris le 16 Avril 1877.

Mon Père chéri,

Comme tu as vu, j’avais déjà commencé à t’écrire Samedi mais Emilie[1] désirant le faire aussi je lui ai passé ma feuille elle t’a écrit longuement mais nous sommes sorties ; et la pauvre lettre est restée dans le buvard et n’a pu partir qu’hier matin.
J’ai trouvé aussi hier soir en rentrant ton petit mot dont je te remercie mille et mille fois et sur lequel je comptais bien un peu. Je suis bien contente de te savoir tout à fait remis et j’espère que cette vilaine indisposition ne recommencera plus.

Hier nous avons eu une journée très amusante ; nous avons été à la messe de 7h1/2 puis à 8h nous avons pris l’omnibus au Collège de France qui nous a conduits à la gare du nord ; nous devions emmener Hortense et Jeanne Duval, Paule[2] et Jeanne Brongniart mais les 1ères avaient une soirée de contrat de leur amie Marthe Liesta qui les avait fait coucher très tard ; la 2e venait d’être réunie à sa maman[3] qui arrivait de Saint-Gobain et elle ne voulait pas naturellement s’en aller ; la 3e enfin allait à Bellevue voir sa grand-mère[4]. Donc nous étions réduits à nous-mêmes mais nous ne nous en sommes pas moins fort amusées ; il faisait beau mais cependant pas très chaud et aujourd’hui encore le temps s’est beaucoup rafraîchi ; nous avons passé notre journée dans le jardin à nous promener et à faire des bouquets ; Emilie et Jean[5] ont eu une grande lutte avec oncle[6] mais moi je ne m’en suis pas mêlée.

Mon petit Père chéri sais-tu bien quel âge j’ai eu hier ? Peux-tu y croire ? 18 ans ! cela m’étonne ; si tu savais comme j’avais envie de t’embrasser et comme j’ai pensé à toi une partie de la journée. J’aurais bien aimé je t’assure être encore avec toi.

J’ai une grande nouvelle à t’annoncer ; rassure-toi elle ne te paraîtra pas bien grande ; c’est que je suis décidément le cours de géographie ; j’y ai été Samedi pour la 1ère fois et j’en ai été ravie on commençait justement l’Asie de sorte que cela me fera cependant un tout complet.
Aujourd’hui nous retournons au cours d’anglais[7] mais nous n’avons rien fait. Il faut que je te dise que nous, ou du moins nos esprits, sont encore un peu en noce, oncle prétend que nous ne sommes pas bien réveillées et c’est assez vrai. Mais aussi on ne marie pas un oncle[8] tous les jours. D’après ta lettre il me semble que le jeune ménage a un peu changé son itinéraire ils ne devaient pas aller à Marseille je crois.
Oncle Auguste[9] et tante Eugénie[10] sont-ils encore pour longtemps à Vieux-Thann ?
Nous n’avons pas revu nos amies Berger[11] depuis Vendredi mais je pense que cela ne tardera pas. Ecrivent-elles beaucoup à leurs parents[12] ?

Adieu mon cher Papa, je vais m’habiller pour sortir je t’embrasse de toutes mes forces comme je t’aime.
[ ] distribuer mes amitiés à tous ceux qui t’entourent commençant pas bon-papa et bonne-maman[13].
ta vieille fille qui t’aime beaucoup beaucoup beaucoup
Marie

Nous sommes invitées à dîner Samedi prochain chez Mme Vaillant[14].


Notes

  1. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  2. Paule Arnould.
  3. Paule Baltard, épouse d’Edmond Arnould.
  4. Catherine Edmée Davésiès de Pontés, veuve d’Adolphe Simonis Empis.
  5. Jean Dumas.
  6. Alphonse Milne-Edwards.
  7. Cours d’anglais donné par Céline Silvestre de Sacy, épouse de Frédéric Foussé.
  8. Marie Mertzdorff vient d’assister au mariage de son oncle Léon Duméril avec Marie Stackler.
  9. Charles Auguste Duméril.
  10. Eugénie Duméril, veuve d’Auguste Duméril et sœur du précédent.
  11. Marie et Hélène Berger.
  12. Louis Berger et son épouse Joséphine André.
  13. Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril.
  14. Henriette Jeanne Hovius, épouse de Léon Vaillant.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Lundi 16 avril 1877. Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_16_avril_1877&oldid=40285 (accédée le 15 novembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.