Lundi 11 juillet 1887 (C)

De Une correspondance familiale

Lettre de Marie Stackler, épouse de Léon Duméril (Vieux-Thann) à sa nièce Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris)


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Vieux-Thann ce lundi[1]

Ma chère Marie,

Depuis ta lettre reçue hier, nous étions bien angoissés et pourtant nous espérions encore, ne voulant pas accepter un si grand malheur[2]. Le voici consommé et nous ne pouvons plus que prier, non seulement pour Celle qui fut un modèle en tout, mais pour son pauvre mari et vous tous !

Si tu savais, combien je plains Monsieur Edwards et combien je songe-à-toi, ma chère Marie et à Émilie[3]. Il me semble que je vous aime encore plus qu’autrefois, tant votre douleur devient mienne ; comme je voudrais être auprès de vous, mes chères petites nièces, nous pleurerions ensemble en parlant de cette sainte amie que j’affectionne et vénère profondément. Au premier moment, je voulais accompagner mon mari[4] à Paris, mais ma santé ne s’y prête guère, en ce moment, puis mes beaux-Parents[5] se décidant à rester, ma place est ici auprès d’eux, ils ont besoin d’affection ; mon petit André[6], sans être malade, souffre un peu d’un dérangement d’estomac, qui le force à rester couché depuis deux jours, nous ne sommes nullement inquiets, mais il a besoin de sa maman, tous ces motifs me retiennent ici et Léon partira seul ce soir.

Mon mari allait vraiment beaucoup mieux, il était beaucoup plus gai et moins nerveux, mais cette épreuve le bouleverse plus que nous ne le pensions. Il aimait Mme Edwards, comme une sœur, et cette épreuve qu’il ne voulait pas admettre l’a beaucoup ébranlé. Il ne compte passer à Paris que deux ou trois jours, mais comme M. Jaeglé[7] n’est pas encore parti pour les bains, je voudrais absolument qu’il consulte dès maintenant, un médecin spécialiste dont mon frère[8] lui a parlé, sans attendre son voyage en Angleterre, qui avec tous ces retards, n’aura guère lieu que fin Août. A ce moment les grands médecins sont généralement absents, vous ne serez pas à Paris, mon frère peut-être non plus, personne enfin pour le pousser à faire cette visite ennuyeuse mais nécessaire, il ne la fera pas, et nous perdrons notre été pour sa santé, si au contraire, vous pourriez le décider à consulter maintenant, nous serions fixés, et pourrions prendre nos dispositions en conséquence. Je ne veux pas trop lui en parler aujourd’hui ; il est trop bouleversé, mais après la triste cérémonie. lendemain ou surlendemain j’espère qu’il [    ] Merci d’avance.

Mes beaux-Parents sont très tristes, mais courageux, et leur santé ne paraît pas trop ébranlée par cette nouvelle épreuve.

Adieu ma bien chère petite Marie sois mon interprète auprès de M. Edwards, Mmes Dumas[9] et Pavet[10]. Ma mère[11] partage bien votre affliction et me charge de vous exprimer la part qu’elle y prend. J

e t’embrasse ainsi qu’Émilie, comme je vous aime

Marie Duméril

Papa et maman voulaient partir ce soir, bien heureusement, ils y renoncent et nous restent ; je crois que c'est le parti le plus sage ! Pardon pour cette lettre, je t'écris à côté d'André qui ne cesse de me questionner.


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Aglaé Desnoyers, épouse d'Alphonse Milne-Edwards, est décédée le 10 juillet.
  3. Émilie Mertzdorff, épouse de Damas Froissart et sœur de Marie.  
  4. Léon Duméril.
  5. Louis Daniel Constant Duméril et son épouse Félicité Duméril (« Papa et maman »).
  6. André Duméril.
  7. Frédéric Eugène Jaeglé, gérant de l’usine.
  8. Le docteur Henri Stackler.
  9. Cécile Milne-Edwards, épouse d'Ernest Charles Jean Baptiste Dumas.
  10. Louise Milne-Edwards, veuve de Daniel Pavet de Courteille.
  11. Marie Stéphanie Hertzog, veuve de Xavier Stackler.

Notice bibliographique

D’après l’original.

Pour citer cette page

« Lundi 11 juillet 1887 (C). Lettre de Marie Stackler, épouse de Léon Duméril (Vieux-Thann) à sa nièce Marie Mertzdorff, épouse de Marcel de Fréville (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Lundi_11_juillet_1887_(C)&oldid=53065 (accédée le 3 octobre 2024).

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