Jeudi 29 janvier 1880
Lettre d’Edgar Zaepffel (Nancy) à sa nièce Marie Mertzdorff (Paris)
Nancy 29 janvier 1880[1]
Ma chère Marie, je viens à mon tour te féliciter, te dire toute la part que je prends à ce grand événement de ta vie et t’exprimer tous les vœux que je forme pour ton bonheur[2].
J’ai de bonnes et de sérieuses raisons pour t’adresser mes félicitations car j’ai entendu dire le plus grand bien de ton fiancé. Ne rougis pas trop en lisant la longue énumération de ses qualités et prépare-toi à entendre son éloge. Les émotions trop vives ne valent jamais rien, si agréables qu’elles soient. Ce que je sais pertinemment, le voici : c’est que M. de Fréville est fort bien de sa personne, distingué de manières, intelligent, travailleur et très apprécié à la Cour des Comptes. Ce que je sais encore, c’est qu’il a été chargé d’un travail considérable comme auditeur, et qu’il s’en est acquitté d’une manière remarquable. Je n’invente rien, je cite pour ainsi dire textuellement. Il ne te déplaira pas sans doute, ma chère Marie, d’entendre répéter ce que tu savais déjà, et d’apprendre ce que tu ignorais peut-être. Quant à moi, j’éprouve un véritable plaisir à t’en faire part.
Quel hiver désolant, que de misères ! Le ciel pourrait bien être un peu plus clément pour ces pauvres humains. On dit, il est vrai, que ce sont des épreuves envoyées à l’homme pour le rendre meilleur. Ce n’est pas cependant le système des corrections qui est généralement en usage dans les familles comme moyen d’éducation. Mais passons. Ta tante[3] et moi nous supportons médiocrement cette température anormale, qui se traduit encore une fois par 15 à 20° au-dessous de zéro. Ta tante tousse comme une malheureuse nuit et jour, depuis 15 jours, malgré tous les rigolos[4] et sirops possibles. Quant à ton vieux bonhomme de parrain, il est au trois quart congelé. Au début, le froid stimule, à la longue il engourdit, je ne m’en aperçois que trop.
Nous avons appris avec peine la mort de M. Mertzdorff[5]. C’était à prévoir à l’âge avancé où il était arrivé, mais la séparation n’en est pas moins douloureuse pour ceux qui restent.
Je te prie de présenter mes respectueux hommages à Madame Edwards[6], de me rappeler au souvenir de son mari et d’offrir mes souhaits de bienvenue à M. de Fréville, dont je me réjouis de faire la connaissance.
Quant à toi, ma chère Marie, je t’embrasse bien affectueusement ainsi qu’Émilie[7].
E. Zaepffel
Notes
- ↑ Papier avec monogramme EZ.
- ↑ Marie Mertzdorff va épouser Marcel de Fréville.
- ↑ Émilie Mertzdorff, épouse d’Edgar Zaepffel.
- ↑ Le Rigollot (ou rigolo ?) est un cataplasme à base de graine de moutarde.
- ↑ Frédéric Mertzdorff, né en 1790.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Émilie Mertzdorff, sœur de Marie.
Notice bibliographique
D’après l'original.
Pour citer cette page
« Jeudi 29 janvier 1880. Lettre d’Edgar Zaepffel (Nancy) à sa nièce Marie Mertzdorff (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Jeudi_29_janvier_1880&oldid=40053 (accédée le 15 novembre 2024).
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