Dimanche 30 novembre 1873 (A)

De Une correspondance familiale

Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)


Paris le 30 Novembre 73[1]

Mon père chéri

Comme je te l'ai dit la petite lettre d'hier ne compte pas et je viens aujourd'hui réparer ma faute en causant un peu avec toi.

Émilie[2] a reçu ce matin ta bonne lettre où tu nous dis que pour l'orphelinat cela ne marche pas très bien ; comme il y a des gens ridicules au monde pourquoi Mme Kestner[3] s'en est-elle occupée n'y ayant jamais rien fait ? Ont-ils beaucoup d'enfants ? Ce que tu nous dis au sujet de Jules[4] nous intrigue fort c'est depuis la rentrée que cela s'est passé n'est-ce pas ?

Quant à Louis Berger[5] as-tu su ce qu'il devenait ? Voilà deux jeunes compatriotes qui ne font pas honneur à leur village espérons que les filles auront droit à plus de gloire.

Il est 4h nous revenons de Conflans[6] où malgré un assez vilain temps nous étions allées. Nous avons trouvé Marie et Hélène très bien elles ne nous ont rien chargé de particulier cependant elles espèrent être associées des enfants de Marie la semaine prochaine Hélène n'en est pas tout à fait sûre mais Marie croit la chose décidée Comme nous étions ensemble arrive la fameuse tante Berger, dame très-bien et qui venait pour la 2ème fois. Alors ne pouvant plus voir nos amies nous sommes parties. Mais à peine avions-nous fait quelques pas qu'une pluie affreuse commence à tomber ; accompagnée d'un vent furieux contre lequel nous avions grand peine à résister, la tourmente augmente et pas un endroit où nous abriter déjà loin du Sacré Cœur au milieu d'une boue épouvantable enfin nous sommes arrivées tant bien que mal au bateau trempées et dans un état déplorable là nous nous sommes réchauffées puis sommes rentrées à la maison où nous avons changé de tout depuis les jupons et les pantalons mais heureusement cela ne nous a fait de mal ni aux unes ni aux autres et en somme nous ne regrettons pas notre excursion.

Pendant ce temps oncle[7] était au ministère pour l'installation de son nouvel habitant[8].

Hier toutes nos courses ont parfaitement réussi nous avons d'abord été chez Mme Bureau[9] que nous avons vue ainsi que son mari ils sont on ne peut plus inquiets de leur petit Joseph aujourd'hui nous en avons encore été prendre des nouvelles il ne va ni mieux ni moins bien le médecin leur a dit que ce ne serait que demain ou Mardi qu'il ne serait plus en grand danger. De là nous avons été acheter de la doublure puis chez Mme Trézel (Camille)[10] qui n'y était pas puis chez sa belle-mère[11] qui va beaucoup mieux là nous avons vu Mme Martineau[12] qui a dit à tante qu'elle lui ferait descendre le parapluie qu'elle avait prêté Mercredi à sa fille puis nous allons chez Mme Boyer qui n'y était pas mais que nous avons rencontrée quelques pas plus loin.

Et nos leçons sont arrangées nous commencerons de Samedi en huit et ce sera tous les mois.

Nous avons été ensuite chez Mme Fröhlich[13] qui a été très aimable et avec laquelle nous sommes restées longtemps puis nous sommes passées prendre notre parapluie mais le concierge était parti et bien que nous le voyons sur son lit il nous a été impossible de le ravoir.

Adieu mon papa mignon j'aurais encore beaucoup à te dire mais je ne veux pas faire aller au grand bureau.

Émilie qui copie son analyse de catéchisme à côté de moi me charge de bien t'embrasser.

Amitiés à tout le monde

ta petite fille qui t'embrasse beaucoup

Marie Mertzdorff


Notes

  1. Lettre sur papier deuil.
  2. Émilie Mertzdorff.
  3. Probablement Marguerite Rigau, veuve de Charles Kestner.
  4. Jules non identifié.
  5. Louis Jules Berger.
  6. Conflans, où Marie et Hélène Berger sont en pension.
  7. Alphonse Milne-Edwards.
  8. Le 26 novembre 1873, dans le 2e ministère de Broglie (Mac Mahon président de la République), Oscar Bardi de Fourtou succède à Anselme Batbie au ministère de l’Instruction publique, des Cultes et des Beaux-Arts.Référence inconnue #ftn8
  9. Marie Decroix, épouse d’Édouard Bureau.
  10. Louise Ida Martineau, épouse de (Antoine) Camille Trézel.
  11. Auguste Maxence Lemire, veuve de Camille Alphonse Trézel.
  12. Ida Marie Malgrange, veuve de Henri Jean Baptiste Martineau.
  13. Éléonore Vasseur, veuve d’André Fröhlich.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Dimanche 30 novembre 1873 (A). Lettre de Marie Mertzdorff (Paris) à son père Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_30_novembre_1873_(A)&oldid=62201 (accédée le 22 décembre 2024).

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