Dimanche 20 novembre 1870
Lettre de Jeanne Target, avec quelques mots de son époux Jules Desnoyers (Paris) à leur fille Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann)
Paris, le[1] Dimanche 20 9bre 1870
Ma chère petite Nie,
Toujours sans nouvelles de toi, je risque encore ce mot ; S'il te parvient, il te dira, comme les précédents, que nous sommes tous en parfaite santé. Aucun mal ne nous est, jusqu'ici, arrivé. Bien que privé de communication avec le reste de la France, Paris a encore des vivres suffisants. Depuis quelques jours, beaucoup de familles ont reçu lettres des leurs. Nous ne sommes pas aussi heureux, j'aimerais tant à voir ta chère écriture ! Enfin il faut se résigner et attendre patiemment. Tous, nous ne nous décourageons pas. Alfred[2], comme non marié, est dans la garde nationale mobilisé, que Dieu le garde, le cher enfant !...
Julien[3] est toujours au fort d'Issy et continue, comme je te l'ai déjà dit, d'être attaché au bureau du génie militaire. Alphonse[4] reste gardenationale sédentaire. On compte d'ici à peu sur une affaire importante ; chacun est déterminé à se défendre, on espère, avec succès. Les nouvelles de la province sont bonnes ; vous devez savoir cela mieux que nous par les journaux ; Paris est parfaitement calme.
Ton papa[5] t'a écrit Mercredi 16 te disant que les obsèques de ce bon M. Auguste[6] avaient eu lieu le Mardi et que les différents discours prononcés sur sa tombe par messieurs Coquerel, de Quatrefages[7], Larrey[8] et Gervais[9] ont été très bien, surtout ceux des 3 premiers. Moi je t'avais marqué le triste évènement dès le Dimanche, te priant d'en faire part à nos bons amis[10], Mme Auguste m'en ayant particulièrement chargée. Aujourd'hui elle me charge de bien vous dire à tous et à ses chers sœur et frère, qu'elle a beaucoup de courage au-dessus même de ce qu'elle pouvait espérer. La pensée de certitude du bonheur dont jouit < [11]> un calme dont elles remercient Dieu « De même qu'il nous a rendues heureuses pendant sa vie, me disaient-elles, il nous rend heureuses après la mort ». Ce bon M. Auguste a écrit le 7 à m. C[12]. Il disait « ne vous faites pas de chagrin à mon sujet ».
Paul Duméril est à Issy comme garde mobile, et se trouve souvent avec Julien, quoique n'étant pas <>. M. D.[13] l'Ingénieur a pris domicile au jardin auprès de sa sœur[14] et de sa nièce[15], cette bonne Adèle est on ne peut plus courageuse ; comme nous, ne recevons pas des vôtres, elle ne reçoit pas de nouvelles de son mari. Si tu es auprès de nos bons amis, dis-leur toute notre sympathie et que cette lettre est pour eux en même temps que pour vous, mes chers enfants.
Où est notre cher Charles[16] ? peut-être es-tu en Suisse, et lui à Vieux-Thann. Qu'il est triste de ne rien savoir de ceux que l'on aime tant !... Aglaé[17] et Alfred t'ont écrit ces jours derniers. Le 15 et le 17 ne sont pas passés sans que nous y ayons beaucoup pensé, ma chère petite fille, ces deux dates nous rappellent toujours de bien douces pensées et nous ne pouvons t'en donner la preuve qu'en te répétant que tu es dans notre cœur
Mère amie
Mille bons bons baisers à mes chères petites-filles[18].
Nous vous avons indiqué les différentes voies de correspondance. Le télégraphe paraît la meilleure.
Bonjour et bien tendres amitiés à tous mes chers enfants. Bons souvenirs à nos amis Duméril dont nous < > d'épreuves < >.
Notes
- ↑ Mention imprimée.
- ↑ Alfred Desnoyers.
- ↑ Julien Desnoyers.
- ↑ Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Auguste Duméril, époux d’Eugénie Duméril.
- ↑ Armand de Quatrefages, Discours prononcé aux obsèques de M. Auguste Duméril.
- ↑ Hippolyte Larrey, Institut de France. Académie des sciences. Discours prononcé aux obsèques de M. Auguste Duméril, le 15 novembre 1870.
- ↑ Paul Gervais, Discours prononcé sur la tombe de M. le professeur Auguste Duméril.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril (frère d’Auguste) et son épouse Félicité Duméril (sœur d’Eugénie).
- ↑ Voir le texte restitué dans une lettre ultérieure.
- ↑ Louis Daniel Constant Duméril.
- ↑ Charles Auguste Duméril, père de Paul.
- ↑ Eugénie Duméril.
- ↑ Adèle Duméril, épouse de Félix Soleil.
- ↑ Charles Mertzdorff.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards.
- ↑ Marie et Emilie Mertzdorff.
Notice bibliographique
D’après l’original.
Annexe
par ballon monté
Madame Mertzdorff
département Haut-Rhin
Pour citer cette page
« Dimanche 20 novembre 1870. Lettre de Jeanne Target, avec quelques mots de son époux Jules Desnoyers (Paris) à leur fille Eugénie Desnoyers, épouse de Charles Mertzdorff (Vieux-Thann) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_20_novembre_1870&oldid=39486 (accédée le 18 décembre 2024).
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