Dimanche 15 novembre 1863 (A)
Lettre d’Eugénie Desnoyers (Montmorency) à Félicité Duméril (Morschwiller)
15 Novembre 1863
Bien chère Madame,
J'ai bien tardé à vous répondre, et cependant ma pensée est bien souvent près de vous, mais ces derniers temps nous avons toujours été sur la route de Paris et, avec ces voyages, les journées sont tellement coupées qu'on ne peut pas faire tout ce qu'on voudrait.
Vous comprenez cela, chère Madame, vous qui vous partagez entre Morschwiller et Vieux-Thann et dont la vie est remplie si utilement, aussi je veux vous remercier des lignes si affectueuses que vous m'avez adressées malgré vos nombreuses occupations. Je n'ai pas besoin de vous dire que je suis bien sensible aux bonnes paroles que vous m'écrivez, car j'ai trop aimé votre chère Enfant[1] pour ne pas être touchée de l'affection que vous me témoignez tous.
Je suis bien heureuse de savoir les petites[2] en bonne santé, et j'espère qu'elles vont passer un bon hiver et que vous n'aurez pas de préoccupations de ce côté-là.
Aglaé[3] va mieux, elle continue cependant à garder le canapé, car vous devinez bien que, puisqu'elle a eu la raison de rester tranquille, son mari et maman[4] ne la laisseront pas reprendre sa vie active avant qu'il ne soit plus du tout question de malaise. Quoiqu'elle soit fort raisonnable et très bien entourée, elle voudrait bien nous voir définitivement rentrés à Paris. De temps en temps papa[5] m'emmène passer avec elle un bon moment, et ça lui fait plaisir, mais d'un autre côté ça m'ennuie de laisser maman, et la présence de maman est trop utile en ce moment, à Montmorency pour qu'on puisse quitter.
Papa s'est décidé à faire faire à la grande maison les travaux dont nous vous avons parlé ; ce sont des travaux assez considérables pour qu'une surveillance continuelle soit nécessaire, et il est probable que nous serons forcés de rester encore ici un certain temps. Les ouvriers viennent un jour, le lendemain ils ne viennent plus, il faut être continuellement sur leur dos, sans quoi il y a toujours quelque chose à leur faire défaire, aussi cette pauvre mère se donne bien du mal, heureusement qu'elle se porte bien.
Alfred[6] vient de passer le commencement de la semaine à Paris, il était venu nous trouver ici Dimanche et nous l'avons reconduit de façon à ce qu'Aglaé profite aussi de sa présence. Je n'ai pas vu Adèle[7], tout mon temps est pour Aglaé lorsque je suis au Jardin. Adèle comprend cela et lorsque nous serons rentrés définitivement j'espère que nous pourrons nous voir un peu maintenant qu'elle a un moins grand nombre de leçons.
Adieu, chère Madame, Maman et moi vous embrassons bien tendrement et vous prie de croire toujours à mon respectueux et profond attachement
Eugénie Desnoyers
Mes plus tendres caresses à ma petite Miky et à sa petite sœur.
Papa me charge de ses compliments et amitiés pour vous et votre bon entourage.
Notes
- ↑ Caroline Duméril, épouse de Charles Mertzdorff et fille de Félicité est décédée en 1862 ; Eugénie Desnoyers était l’amie de Caroline.
- ↑ Marie (Miky) et Emilie Mertzdorff, filles de Caroline.
- ↑ Aglaé Desnoyers, épouse d’Alphonse Milne-Edwards et sœur d’Eugénie.
- ↑ Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
- ↑ Jules Desnoyers.
- ↑ Alfred Desnoyers, frère aîné d’Eugénie.
- ↑ Adèle Duméril, nièce de Félicité.
Notice bibliographique
D’après l’original
Pour citer cette page
« Dimanche 15 novembre 1863 (A). Lettre d’Eugénie Desnoyers (Montmorency) à Félicité Duméril (Morschwiller) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_15_novembre_1863_(A)&oldid=56978 (accédée le 22 décembre 2024).
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