Dimanche 14 avril 1878 (B)

De Une correspondance familiale


Lettre de Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann) à leur petite-fille Marie Mertzdorff (Paris)

original de la lettre 1878-04-14B pages 1-4.jpg original de la lettre 1878-04-14B pages 2-3.jpg


Vieux-Thann 14 Avril 1878.

C’est demain, ma bonne petite Marie, que tu auras tes dix-neuf ans accomplis, et depuis ta naissance et celle de notre chère petite Emilie[1] vous nous avez, toutes deux, donné sans cesse des causes de bonheur soit par votre caractère, soit par la droiture de vos intentions, soit par le résultat de vos études. Votre manière d’agir a bien souvent rempli délicieusement le cœur de vos vieux parents[2] qui, dans les grandes épreuves de leur vie, ont compris que Dieu venait à leur aide en vous donnant pour Mentors votre excellente tante Aglaé et votre cher oncle Alphonse[3] qui se sont joints à votre excellent père[4] pour ne faire qu’un avec lui dans la direction de la parfaite éducation que vous avez reçue, éducation qui portera ses fruits à toutes les époques de votre vie et dans laquelle vos vieux parents puisent sans cesse des consolations. Continuez toutes deux mes chères enfants, à marcher dans cette bonne voie qui vous donnera toujours du calme et de la sérénité ; ne vous laissez jamais décourager, et sans avoir de présomption, que votre humilité ne soit pas excessive car les plus belles qualités poussées trop loin deviennent des défauts, c’est à toi surtout, ma petite Marie que j’adresse cette observation parce que j’ai souvent peur que tu ne te juges trop défavorablement. Remercie Dieu des dons qu’il t’a faits, que tu sauras toujours employer pour le bien mais auxquels je désire que tu joignes une certaine confiance en toi-même.

Plus nous voyons notre chère belle-fille[5] et plus nous apprécions ses aimables et solides qualités, chez elle la raison se joint à une charmante animation. Ce que nous voudrions à présent c’est que sa santé reprit des forces, elle va beaucoup au jardin depuis quelques jours avec sa petite Hélène[6] qui est bien gentille. Je ne te parle pas de Madame Stackler[7] car je crois t’avoir déjà dit que c’est une femme remarquablement douée et qui a beaucoup de bonté de cœur.

Dans ce moment nous sommes fort occupés du projet de mariage de Georges[8] avec Mlle Lomüller[9] que tu as vue l’an dernier chez Madame Miquey[10]. Toutes les personnes qui la connaissent en font l’éloge ; nous-mêmes nous avons été à même de l’apprécier dans un séjour qu’elle a fait à Vieux-Thann chez Marie Duméril. On ne sait pas encore l’époque du mariage qui n’aura probablement lieu qu’en Juillet.

Je te quitte ma bonne petite Marie pour donner la plume à ton grand-père[11] qui veut aussi t’adresser quelques lignes, mais avant de te quitter je t’embrasse comme je t’aime ainsi que notre petite Emilie, ta chère tante et ta bonne-maman Desnoyers[12]

Félicité Duméril

Que te dirais-je de plus, ma chère enfant, que ce que contient la lettre de ta bonne-maman ? mais je désire pourtant que ma plume te porte aussi ma part de souhaits pour cette vingtième année que tu vas commencer. Qu’elle fasse une heureuse suite aux dix-neuf qui l’ont précédée & nous ne pourrons demander mieux.
Prends confiance en toi-même ; tu vois combien ton père en a en toi car il te met au courant de bien des choses qui le concernent et dont tous les pères n’entretiennent pas leurs filles, même plus âgées que toi : ce n’est pas seulement par bonté qu’il le fait, mais parce qu’il sait que tu es à même de les comprendre, enfin parce qu’il a confiance en toi.

Nous attendons dans la semaine de Pâques ton oncle de Moulins[13] & Paul probablement ; ils feront connaissance de leur future belle-fille et belle-sœur car ton oncle n’avait pas remarqué MlleLomüller le jour du mariage. Paul lui l’avait distinguée.

Tout ce que je t’offre pour le jour de ta naissance, c’est un bon baiser mais tu sais qu’il vient du fin fond de mon cœur. J’en envoie un également tout pareil [ ]
N’oublie pas de faire nos bien cordiales amitiés à ta tante & à ton Oncle ils savent combien nous les aimons.

C. Duméril


Notes

  1. Emilie Mertzdorff, sœur de Marie.
  2. Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril.
  3. Aglaé Desnoyers (« ta chère tante ») et son époux Alphonse Milne-Edwards.
  4. Charles Mertzdorff.
  5. Marie Stackler, épouse de Léon Duméril (« Marie Duméril »).
  6. Hélène Duméril.
  7. Marie Stéphanie Hertzog, veuve de Xavier Stackler.
  8. Georges Duméril.
  9. Maria Lomüller.
  10. Joséphine Fillat, épouse d’Étienne Miquey.
  11. Louis Daniel Constant Duméril.
  12. Jeanne Target, épouse de Jules Desnoyers.
  13. Charles Auguste Duméril et son fils Paul Duméril.

Notice bibliographique

D’après l’original

Pour citer cette page

« Dimanche 14 avril 1878 (B). Lettre de Félicité Duméril et son époux Louis Daniel Constant Duméril (Vieux-Thann) à leur petite-fille Marie Mertzdorff (Paris) », Une correspondance familiale (D. Poublan et C. Dauphin eds.), https://lettresfamiliales.ehess.fr/w/index.php?title=Dimanche_14_avril_1878_(B)&oldid=39350 (accédée le 15 novembre 2024).

D'autres formats de citation sont disponibles sur la page page dédiée.